Cent ans ont passé : il était temps de régler son compte au patron des bolcheviks, qui bénéficia le XXe siècle durant d’une mansuétude inouïe de la part des historiens. Stéphane Courtois le fait avec sagesse, érudition et profondeur, éclairant d’un jour neuf la généalogie des totalitarismes.
Présenter Lénine comme « l’inventeur du totalitarisme » ainsi que le fait Stéphane Courtois suscite encore l’émoi dans bien des milieux. L’opération de blanchiment du XXe congrès (1956), qui pré- tendait revenir aux fondamentaux du léninisme que Staline aurait trahis, et la persistance de la mythologie trotskyste qui, l’une et l’autre, opposent le « bon » Lénine au « méchant » Staline, la Seconde Guerre Mondiale et l’« effet Stalingrad » faisant oublier l’alliance soviéto-nazie du 23 août 1939 et la complicité objective des trois totalitarismes dans le déclenchement de la guerre, y sont sans doute pour beaucoup. Le débat autour de « l’unicité de la Shoah », la querelle des historiens autour de La guerre civile européenne d’Ernst Nolte, ont laissé des traces au point qu’une véritable histoire des complicités objectives, des filiations et des mimétismes inter-totalitaires qui permettrait de fonder ce que Nolte appelait « une version historico-génétique de la théorie du totalitarisme » n’a pas été poussée jusqu’au bout.
À bien y réfléchir, le titre audacieux de l’ouvrage constitue sa nouveauté même. Lénine n’est pas seulement le lecteur des nihilistes russes qui lui ont inspiré le modèle du révolutionnaire professionnel et de la terreur, il n’est pas seulement (...)
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