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Le cinéma c’est aussi les sorties VOD et DVD. On profite de l’été pour une session de rattrapage pour voir ou fuir les sorties ciné manquées.
READY PLAYER ONE
De Steven Spielberg
Avec Tye Sheridan, Olivia Cooke, Ben Mendelsohn
Dès l’ouverture, la caméra de Spielberg suit, au rythme de Jump de Van Halen, le jeune Wade Watts qui parcourt son bidonville version futuriste. Il évolue ainsi dans une décharge géante où s’amoncellent des containers en guise d’habitat, et où les personnages, tous sortis des années 80, sont affublés pour l’occasion d’un casque de réalité virtuelle. Nous sommes en 2045. Le monde est au bord du chaos. Les êtres humains se réfugient dans l’OASIS, univers virtuel mis au point par le brillant et excentrique James Halliday. Avant de disparaître, celui-ci a décidé de léguer son immense fortune à quiconque découvrira l’œuf de Pâques numérique qu’il a pris soin de dissimuler dans l’OASIS. L’appât du gain provoque une compétition planétaire. Mais, Wade Watts, qui n’a pourtant pas le profil d’un héros, décide de participer à la chasse au trésor et est plongé dans un monde parallèle à la fois mystérieux et inquiétant…
Après Pentagon papers, Lincoln et Le Pont des espions, Spielberg revient au genre qu’il affectionne particulièrement, la fable fantastique. Si les humains, à l’exception de rares nantis, vivent dans des conditions précaires, tous peuvent s’échapper dans l’Oasis pour faire et devenir ce qu’ils veulent. Dès l’ouverture, le réalisateur de Minority Report prend soin d’opposer le réel, terne et délimité, au virtuel flamboyant et sans limites. Mais entre la satire sombre de l’addiction (la démocratisation d’internet et l’émergence de la réalité virtuelle), et la célébration du virtuel, Spielberg joue au danseur, préférant finalement le pas de côté, un peu facile, qui consiste à révéler le réel par le virtuel. On le comprend tant sa maîtrise de l’image et son génie créatif trouvent leur apogée dans ce monde numérique.
Rarement, le cinéma numérique a été aussi bien utilisé. Son utilisation de l’espace, des corps, des décors et des couleurs est prodigieuse et ne souffre aucune limite. Dans cet Oasis, le moindre mouvement de caméra révèle tout autre chose, à chaque fois plus surprenante. Spielberg navigue avec virtuosité d’univers en univers, truffant son film de références cinématographiques, littéraires et musicales sans jamais ralentir son récit. Fabuleux conteur, le réalisateur immerge, avec la même virtuosité, le spectateur dans une course en Delorean (la mythique voiture de Retour vers le futur) semée d’embûches (King-Kong, le T-Rex de Jurassik Park), ou dans l’hôtel Overlook de Shining. Comme toutes les fables, Ready Player One offre une lecture politique de notre monde contemporain. L’ombre menaçante du capitalisme plane sur ce monde de libertés qu’offre le virtuel. Ce sont les avatars qui s’émiettent en pièces lorsqu’ils sont tués, poussant Wade à guetter la mort pour s’enrichir ou la firme de l’affreux Sorrento s’emparer de l’Oasis. Mais cette dénonciation se heurte à l’âme d’enfant de Spielberg, comme si la mainmise du virtuel sur le réel condamnait l’existence de personnages incarnés jusqu’à les rendre interchangeables. Un obstacle qui se confirme dans le dernier tiers du film, qui, malgré l’abondance de prouesses visuelles et de « Madeleines de Proust » offertes au spectateur, révèle un scénario bien pauvre sans ses habits de lumière.
LA PRIERE
De Cédric Kahn
Avec Anthony Bajon, Damien Chapelle, Alex Brendemühl
Thomas a 22 ans. Pour sortir de la dépendance, il rejoint une communauté isolée dans la montagne tenue par d’anciens drogués qui se soignent par la prière. Il va y découvrir l’amitié, la règle, le travail, l’amour et la foi…
Dès l’ouverture, Cédric Kahn donne le ton. La caméra fixe Thomas (Anthony Bajon d’une candeur et d’une intensité remarquables) de profil, il tourne la tête et jette un regard vers le spectateur. Nul besoin d’explication, ce simple plan suffit pour s’accrocher à lui et ressentir toute sa détresse. Chez Kahn, pas de romanesque. Nous sommes dans le dur, le terreux, la sueur. Un cheminement qui râpe les genoux et gifle mais qui ne nous laisse jamais seul. C’est le grand frère qui allume la lumière et te relève quand tu convulses, c’est la (charmante) voisine qui t’accueille quand tu es perdu et c’est Dieu qui te porte quand tout t’abandonne. Après L’Apparition de Xavier Giannoli, voici un deuxième film français d’un réalisateur reconnu par la profession, la critique et le public (récompensé du prix du meilleur acteur au Festival de Berlin il y a quelques jours) qui aborde un sujet explicitement chrétien.
Lire aussi : Christianisme et cinéma, la résurrection ?
« Filmer la Foi ne va pas forcément de soi. J’ai résolu cette question par le doute », explique Cédric Kahn. Le réalisateur n’esquive pas. Par sa mise en scène du doute, ses cadres épurés mais d’une beauté saisissante, il filme le mystère. Il nous fait percevoir une présence que seules les images rendent perceptible. Ce sont des chants en chapelle, des marches dans la montagne ou l’écho dans le brouillard, des choses rationnelles qui révèlent une présence invisible. Mais Kahn n’enjolive pas. Si Thomas fait le choix de rejoindre cette communauté, accompagnée par un prêtre (en col romain !), qui prie, accueille, s’entraide et se protège, sa conversion reste un chemin de croix. Un chemin difficile à suivre, qu’on peut feindre d’embrasser ou quitter librement en un instant, mais c’est un chemin qui sauve. Osé et lumineux.
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