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Tribune des généraux : le gouvernement et la gauche rejouent l’antifascisme

Depuis quelques jours, une tribune publiée par une vingtaine de généraux en retraite – déjà signés par près de 5 500 militaires de tout rang – secoue la sphère médiatique. Dans ce texte à l'initiative de Jean-Pierre Fabre-Bernadac, ancien capitaine de gendarmerie et responsable du site Place d’Armes, les militaires interpellent les gouvernants français, considérant que leur antique sens de l’honneur les obligeait à prendre publiquement position sur le délitement de « nos valeurs civilisationnelles » : « L’heure est grave, la France est en péril, plusieurs dangers mortels la menacent ». Tour à tour, ils dénoncent l’islamisme galopant qui annexe de trop nombreux morceaux de notre terre et décapite nos professeurs ; la gauche devenue raciste par antiracisme qui sape les possibilités du bien commun en créant les conditions d’émergence d’une guerre communautaire ; la violence du quotidien, celle des racailles, des manifestants et des antifas qui s’en prennent aux forces de l’ordre.

Leur solution est claire : « Appliquer sans faiblesse des lois qui existent déjà », faute de quoi le pays risque une « explosion et l’intervention de nos camarades d’active dans une mission périlleuse de protection de nos valeurs civilisationnelles et de sauvegarde de nos compatriotes sur le territoire national ». En conclusion, ils mettent en garde contre les tergiversations : « Demain la guerre civile mettra un terme à ce chaos croissant, et les morts, dont vous porterez la responsabilité, se compteront par milliers ».

Marine Le Pen approuve, les généraux temporisent

D’abord passée sous les radars médiatiques, la tribune a fait scandale après que Marine Le Pen a publiquement soutenu l’initiative, et appelé les généraux à la rejoindre : « Je vous invite à vous joindre à notre action pour prendre part à la bataille qui s’ouvre, qui est une bataille certes politique et pacifique, mais qui est avant tout la bataille de la France ». [...]

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Enquête : le malheur de l’anthroposophie

Appuyée solidement sur une œuvre dense et complexe, la pensée de Rudolf Steiner ne saurait être réductible à ses successeurs actuels, lesquels se situent dans des sphères différentes de la société. Polymathe, enfant de la fin du XIXe siècle qui vit l’émergence de nombreux mouvements spiritualistes, Rudolf Steiner est principalement connu comme fondateur d’une doctrine parareligieuse forgée après sa séparation de la Société théosophique d’Helena Blavatski, dont il fut le secrétaire général pour l’Allemagne entre 1902 et 1912. Cet admirateur de Goethe aux grandes ambitions se rêvera même un temps prophète du nouveau siècle, porte-étendard de la lutte contre ce qu’il a appelé le « matérialisme kantien » et les hérésies de la modernité. C’est en ça qu’il est, ce n’est pas un paradoxe, exemplaire de la post-modernité. Contrairement aux tenants de la tradition primordiale, tels que Julius Evola ou René Guenon, qui retournaient aux sources les plus antiques pour retrouver l’essence de la spiritualité humaine, Rudolf Steiner avait quelque chose du touche-à-tout tenté par les syncrétismes les plus baroques.

Dans Le Monde d’hier, souvenirs d’un Européen, l’Autrichien Stefan Zweig se remémorait la forte impression que lui avait laissée Rudolf Steiner, lorsque jeune homme il fit sa rencontre : « Il ne donnait pas comme Herzl l’impression d’un chef, mais plutôt celle d’un séducteur. Dans ses yeux sombres résidait une force hypnotique, et je l’écoutais avec un sens critique plus en éveil, quand je ne le regardais pas, car son visage émacié d’ascète, marqué par la passion spirituelle, était bien propre à exercer un pouvoir de conviction – et pas seulement sur les femmes ». Des dons particuliers qui, associés à une capacité de travail impressionnante et un caractère obsessionnel, pour ne pas dire plus, allaient aider ce personnage oublié sous nos latitudes à construire un mouvement durable, un mouvement qui lui survécut. Zweig en fut d’ailleurs un peu déçu, trouvant que les réalisations de Rudolf Steiner s’étaient accomplies « dans le domaine de réalités largement accessibles et même, à certains égards, dans le banal ». Il confessait même ne pas avoir compris ce que l’anthroposophie voulait ou ce qu’elle signifiait.

« Il ne donnait pas comme Herzl l’impression d’un chef, mais plutôt celle d’un séducteur. Dans ses yeux sombres résidait une force hypnotique, et je l’écoutais avec un sens critique plus en éveil »

Rudolf Steiner serait-il un prédécesseur de Ron Hubbard, le fondateur de la scientologie ? Nos entretiens avec d’anciens adeptes et la lecture de sites de lanceurs d’alerte le laissent entendre. Autant d’anciens adeptes qui ont d’ailleurs tenu à rester anonymes : l’anthroposophie a les moyens de faire taire les voix dissonantes, n’hésitant pas à multiplier les procès en diffamation et même à créer des blogs calomniant des individus nommément, ainsi que le font certaines sectes et certains mouvements politiques radicaux. Un homme nommé Grégoire Perra en a fait les frais, qui dénonçait depuis des années l’influence délétère du mouvement ainsi que sa puissance. Église, multinationale et ONG, l’anthroposophie dispose de plusieurs organes œuvrant dans des univers très complémentaires : la banque (La Nef), l’agriculture biodynamique (Demeter), l’éducation (écoles Waldorf Steiner, dont quatre sous contrats d’association en France), le paramédical (Weleda), etc.

Le 9 septembre 1924 à Dornach, Rudolf Steiner déclarait : « Si Mars, par exemple, venait à tomber sur la terre, il ne pourrait pas ravager la terre ferme mais seulement l’inonder. Si l’on examinait Mars, pour autant qu’on puisse l’examiner, ce que l’on ne pourra jamais par la seule physique et sans le recours à la science de l’esprit, on verrait au regard spirituel qu’il est constitué d’une masse aqueuse moins liquide que l’eau, mais comme une gelée de confiture. Il contient certes également des parties solides, mais leur consistance est plutôt celle de la corne animale ou des bois animaux. Ces parties plus dures apparaissent puis se dissolvent à nouveau. Il nous faut admettre que la consistance de Mars est tout à fait différente de celle de la terre ». Licence poétique ? Non, affirmation littérale d’un génie dérangé – et amusant – qui a malheureusement été crue par des millions d’adeptes beaucoup moins brillants, en quête d’un manuel de survie spirituelle dans le chaos du monde. Un manuel qui les enferme dans des postures de vie rigides, les coupant même du reste de l’humanité, des « infidèles » pris évidemment pour des imbéciles parce qu’ils s’abandonnent à ces triviales passions qui font le sel de la vie.

Autoproclamée « communauté des chrétiens », l’anthroposophie a tout d’une hérésie pour un vrai chrétien, tant l’individualisme apparent de sa doctrine ne conduit qu’à l’effacement de l’individu dans ce qu’il a de plus particulier, de plus personnel

Cela ne serait pas dérangeant si des vies n’étaient pas en jeu, des vies d’enfants parfois changées à jamais et coupées du reste de la société. S’il est souvent question de rituels, auxquels les enfants participent sans avoir conscience de ce qu’ils signifient, à l’image de la spirale de l’avent lors de laquelle les jeunes sont enfermés dans le noir avant de parader avec des bougies, qui n’est pas même païenne ou d’un christianisme hétérodoxe, mais d’un caractère post-moderne et sacrilège à la limite du glauque, il est rarement question d’amour quand il s’agit d’anthroposophie. Autoproclamée « communauté des chrétiens », l’anthroposophie a tout d’une hérésie pour un vrai chrétien, tant l’individualisme apparent de sa doctrine ne conduit qu’à l’effacement de l’individu dans ce qu’il a de plus particulier, de plus personnel. Toute la vie est dictée par les enseignements du maître, jusqu’aux arts codifiés et rigides (livres pour enfants présentant des dessins spécifiques, fête de Saint-Martin, eurythmie, travail du bois, etc.). Évidemment, l’éveillé Steiner était tout à la fois « philosophe, théologien, poète, économiste, botaniste, diététicien, artiste, historien, dramaturge » et « ne dédaignait pas non plus l’architecture » …

Il a, en tout cas, laissé derrière lui une entreprise qui ne connaît pas la crise. Numéro un des cosmétiques biologiques en France et en Allemagne, les laboratoires Weleda ont réalisé 401 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2017, en vendant dans le monde entier lotions capillaires au romarin, pâtes dentifrices au ratanhia, huiles essentielles anticellulite au bouleau, ainsi que pour 109 millions d’euros de « médicaments anthroposophiques ». Deux actionnaires de référence, la Société anthroposophique universelle et la clinique anthroposophique d’Arlesheim, voisine du Goetheanum, détiennent 33,5 % du capital de l’entreprise et 76,5 % des droits de vote de Weleda. À Bruxelles, les anthroposophes disposent d’un lobby pour défendre leurs intérêts auprès des institutions européennes : l’Alliance européenne d’initiatives pour l’anthroposophie appliquée (Eliant). Parmi les nombreux partenaires de ce groupe de pression, on compte le Conseil européen pour l’éducation Steiner-Waldorf (ECSWE), la Fédération internationale des associations médicales anthroposophiques (IVAA), une antenne Demeter International, ainsi que la Fondation Rudolf Steiner. Ces cinq structures ont une même domiciliation. Ils ont donc de gros moyens pour diffuser leurs croyances, tout en se donnant des airs de neutralité scientifique et rationnelle.

Les adeptes eux-mêmes semblent parfois découvrir la doctrine et les croyances de Rudolf Steiner, auquel ils font sans cesse référence tout en s ’en détachant quand ils sentent que ce te accointance pourrait les gêner

Quels sont les liens entre le cœur ésotérique de l ’anthroposophie et ses divers paravents exotériques, ayant pignon sur rue ? Rudolf Steiner semble s’être reproduit dans les esprits de ses fidèles. Nous avons face à nous un mouvement très original : sans gourou vivant, sans représentation officielle, sans organigramme limpide. Les adeptes eux-mêmes semblent parfois découvrir la doctrine et les croyances de Rudolf Steiner, auquel ils font sans cesse référence tout en s ’en détachant quand ils sentent que ce te accointance pourrait les gêner. Deux spécialistes de l ’occulte ont été contactés pour les besoins de cette enquête. Christian Bouchet, qui a écrit l'un des rares livres français sur Rudolf Steiner, et Jean-Paul Bourre, grand connaisseur des contre-cultures ésotéristes des années 1960 et 1970. Les deux ont tenu des propos comparables, Jean-Paul Bourre allant jusqu’à déclarer considérer l’anthroposophie comme une « une secte dangereuse et depuis longtemps », tenant du « luciférisme », ayant le « goût du pouvoir, de l’embrigadement des jeunes », et récrivant complètement « à sa manière délirante, le social et le métaphysique ». Ce luciférisme se retrouve dans l ’accomplissement de certains rituels, notamment la « spirale de l ’avent » qui, de l ’aveu d ’anciens membres du groupe, est un moment très traumatisant pour les plus petits.

Grégoire Perra en fait ce commentaire : « Dans le dispositif symbolique de la “spirale de l’Avent”, la grande bougie placée au centre de la Spirale représente plus précisément l ’archétype du “Moi”, le Christ cosmique, où les âmes humaines sont invitées à allumer leurs propres petits “moi”, par un acte de communion sacramentel avec ce te divinité. Ainsi, l ’enfant qui va allumer sa petite bougie au contact de la flamme au centre de la spirale est en fait impliqué dans un rituel dont le but est de provoquer une rencontre avec l ’être suprasensible du “Christ cosmique” qui, selon l ’anthroposophie, est l ’archétype primordial des “moi humains”. Le fait que la bougie de chaque enfant soit plantée dans une pomme (qui veut évoquer la “Chute” biblique) est une manière de symboliser le fait que le “moi humain” est entaché par la Faute originelle liée à l ’action des entités lucifériennes. Ces entités font partie de la cosmologie des anthroposophes, qui ne font ici qu’emprunter et récupérer un terme biblique. Ce sont d ’ailleurs ces entités suprasensibles du Mal qui, pour les anthroposophes, sont à l ’œuvre derrière le phénomène physique de l ’obscurité de la saison hivernale. Ainsi, le moi humain chargé de la Faute luciférienne doit-il, pour son salut, aller allumer l ’étincelle divine qui est en lui en allant chercher, au centre de lui-même, la présence du Christ cosmique. Voilà le véritable sens de ce te cérémonie de la Spirale de l ’Avent dans les écoles Steiner-Waldorf. Il aurait cependant été de la plus élémentaire déontologie d ’informer les parents des arrière-plans d ’un dispositif religieux auquel on fait participer leurs enfants ! ».

Cette tentative de rationalisation du domaine préternaturel, où le naturel est méprisé et le surnaturel travesti, peut avoir un caractère aliénant et destructeur

Sorte de pont intellectuel et théologique entre la gnose rosicruço-martiniste, le spiritisme dix-neuvièmiste de Kardec ou l’abbé Julio, et le récent mouvement new age californien des années 60, l’anthroposophie offre une vision du monde, sensible et suprasensible, suffisamment complète pour séduire un nombre croissant d’individus perturbés par les affres de la modernité. Savent-ils tous ce qu’ils font ? Quelles entités sont évoquées au cours de ces rites étranges qu’on pourrait croire sortis d’une vision de Lovecraft ? Il faut, pour bien saisir la portée de cette pensée, avoir quelques bonnes bases théologiques, philosophiques et historiques. Cette tentative de rationalisation du domaine préternaturel, où le naturel est méprisé et le surnaturel travesti, peut avoir un caractère aliénant et destructeur. Il suppose d’ailleurs, par les exercices spirituels, une suppression de l’« ego », de la personnalité, vue comme le simple vêtement de l’âme véritable censée ne faire qu’Un avec le tout. Ici, pas plus le véritable christianisme que les spiritualités indiennes traditionnelles ne sont respectées, comme l’a notamment expliqué le père Joseph-Marie Verlinde dans son passionnant ouvrage L’Expérience interdite[...]

Ils profanent le tombeau de l’Empereur !

Non satisfait de lancer une querelle inutile sur la célébration (l’horreur ! quasiment le nazisme) du bicentenaire de la mort de Napoléon, pour ensuite se contenter d’une commémoration plus neutre, l’État s’abaisse et diminue la France pour préférer la profanation à coup de subventions.

Le projet avait déjà été annoncé dès décembre 2020 lors d’un entretien aux Invalides, mais n’a enflammé les réseaux sociaux que cette semaine, provoquant des appels à son annulation : l’artiste contemporain Pascal Convert, en collaboration avec le Musée de l’Armée et, pour couronner le tout, avec l’aide de la perfide Albion par l’entremise de leur National Army Museum, a conçu pour œuvre d’art la suspension du squelette de Marengo, le cheval de l’Empereur, au-dessus de son tombeau sous le Dôme.

Lire aussi : Faut-il commémorer ou non le bicentenaire de la mort de Napoléon 1er ?

Inspiré par les anciens rituels celtiques et slaves qui voulaient que le cavalier soit inhumé avec son cheval, Pascal Convert voulu réunir Napoléon et Marengo – le fidèle destrier qui accompagna l’Empereur lors de nombreuses victoires, dont Marengo, Iéna et Wagram… mais aussi l’ultime défaite de Waterloo, où il fut capturé par les Anglais et ensuite exposé aux touristes, devenu le symbole de leur victoire et dont les os sont toujours précieusement conservés à Londres. [...]

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Les procès des putschistes : à la recherche de l’honneur perdu

On ne peut s’empêcher de penser à l’inversion ô combien ironique de l’histoire française qui, du haut de l’année 1873, exige de nous un peu de recul et de souvenir. Cette année-là, le maréchal Bazaine fut condamné à mort pour avoir traité avec l’ennemi prussien et cédé une partie du territoire français, ayant renoncé au combat sans avoir épuisé tous les moyens de défense. Face au tribunal, Bazaine déclarait : « Que pouvais-je faire ? Les devoirs militaires ne sont stricts que quand il y a un gouvernement légal, mais non pas quand on est en face d’un gouvernement insurrectionnel. Il ne restait plus rien ». Le duc d’Aumale, qui présidait le procès, lui rétorqua cette phrase sans appel : « Il restait la France, monsieur le maréchal ! ».

D’instinct, l’on croit entendre l’écho d’une voix à la BBC, « la France a perdu une bataille, mais la France n’a pas perdu la guerre » ! La France, paraît-il, ne mérite pas cet effort en toute circonstance.

Quel étrange parallèle, en effet, car c’est un gouvernement parfaitement légal, cette fois-ci, reprochant aux généraux Jouhaud, Salan, Challe et Zeller un mouvement insurrectionnel, alors qu’ils cherchaient l’unité plutôt que la division, et la conservation du patrimoine plutôt que sa perte. Quel étrange parallèle que celui de l’Armée qui, cette fois-ci, tentait de poursuivre l’œuvre d’une France éternelle face à un gouvernement et une politique toujours changeante, et face à un chef installé au pouvoir par ceux-là mêmes qui se retrouvaient dans le box des accusés.

Quel étrange parallèle que celui de l’Armée qui, cette fois-ci, tentait de poursuivre l’œuvre d’une France éternelle face à un gouvernement et une politique toujours changeante

Rappelons les faits : le 27 avril 1961, deux jours suivant le putsch, le président de la République décréta la création du Haut tribunal militaire et nomma lui-même ses membres, dont les jugements devaient être sans recours (sauf, bien sûr, celui de la grâce présidentielle). En mai et juin 1961 furent jugés les généraux Challe et Zeller, condamnés tous deux à quinze ans de détention criminelle. En juin et juillet de la même année, d’autres généraux et officiers, dont le commandant Hélie de Saint Marc, furent condamnés à leur tour. L’année suivante, les deux autres figures généralissimes du putsch, Jouhaud et Salan, affrontèrent le tribunal. Le général Jouhaud, adjoint de Salan à la tête de l’Organisation de l’armée secrète, fut condamné à mort le 13 avril 1962. Le 15 mai, le célèbre procès du général Salan s’ouvrit et, dans un retournement inattendu, fut condamné à la détention perpétuelle plutôt qu’à l’exécution.

Le verdict provoqua, outre la fureur du général de Gaulle, bafoué dans ses tentatives d’intimidation, la dissolution du Haut tribunal militaire et la commutation de la peine du général Jouhaud, désormais un non-sens, à la détention à perpétuité. Les procès ne manquèrent pas de drames : le général de Larminat, appelé à présider la Cour militaire de justice en 1962, se suicida pour ne pas avoir à juger ses pairs ; le général Ingold, grand chancelier de l’Ordre de la Libération, s’absenta dès le lendemain de la condamnation du commandant Saint Marc et démissionna en août 1962 ; certains procureurs, notamment le maître Reliquet, refusèrent de réclamer contre les accusés les peines demandées par les pouvoirs publics.

« Le lien sacré du sang versé nous lie à eux pour toujours », déclarait devant le tribunal le commandant Hélie de Saint Marc

Le devoir de l’armée, n’ayant plus été réservé uniquement à l’organisation militaire, avait eu à assumer un devoir plus politique, comme le plaidait l’avocat de la défense M. le Bâtonnier André Toulouse, celui « plus magnifique, plus difficile, celui de représenter vis-à-vis de tous les habitants de l’Algérie la civilisation française, d’être le symbole de la France, et on a demandé à l’Armée de faire comprendre à tous les Algériens ce qu’était la politique de la France ». Cette frontière si floue entre militaire et politique fut longuement imposée par le gouvernement français. Comment alors retirer à ces honorables soldats la responsabilité qui leur imputait et qu’ils assumaient dans l’abandon du peuple qui les avait suivis, voire combattus à leurs côtés, entre autres lors du dernier conflit mondial ? « Le lien sacré du sang versé nous lie à eux pour toujours », déclarait devant le tribunal le commandant Hélie de Saint Marc. Les accusés parlent du sacré, de serments, de la fidélité, puis de la foi comme s’ils provenaient d’un autre temps, plus noble et moins hypocrite[...]

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Putsch d’Alger : un enjeu d’honneur pour l’armée française

Le putsch avait-il une chance de réussir ? Ou était-ce un combat perdu d’avance et illusoire organisé par « un quarteron de généraux en retraite » ?

Le putsch a parfaitement réussi sur le plan matériel. Les putschistes ont pris Alger sans difficulté. En revanche, qu’entendaient-ils faire après ? La réponse n’est pas claire, car eux-mêmes ne voulaient pas d’un coup d’État de type « fasciste » pour reprendre une formule de Challe. Cela étant, comment envisageaient-ils la réaction du général de Gaulle ? Comment pouvaient-ils imaginer que Paris resterait inerte ? Sachant que se posait aussi le problème de la reconnaissance internationale de l’entreprise. Le putsch était donc une idée illusoire et aventurée. Pour avoir une chance de succès, encore aurait-il fallu que ses dirigeants aient eu un projet politique. Étant à la fois en butte à la politique gaulliste, au FLN ainsi qu’à une opinion musulmane qui, à ce moment-là est en train de basculer vers le FLN, et refusant au surplus de mettre les civils pro-Algérie française dans la boucle, les putschistes s’enferment dans une spirale d’échecs. Quand on sait que le contingent comme les généraux emprisonnés avaient accès à la radio, il y a dans tout cela une forme d’amateurisme.

Lire aussi : Soixante ans du Putsch d’Alger : Éloge d’un vaincu

Mais comprendre avril 1961 impose de saisir que l’armée entend réitérer le 13 mai 1958 avec l’idée qu’Alger serait capable d’imposer sa voix et de contraindre Paris à suivre ses choix. La grande différence, c’est que le pouvoir politique est dorénavant celui de la Ve République. Sous la IVe, l’armée avait davantage les mains libres face à des institutions civiles faibles. Avec de Gaulle à la tête de l’État, cette manière de faire est finie. En plus, les putschistes saisissent mal les enjeux géopolitiques qui président à la politique gaullienne : pour eux l’Algérie est tout, alors que pour de Gaulle, c’est plutôt la partie d’un tout qu’il n’entend pas voir entraver sa politique étrangère et de défense. [...]

L’IncoDico – Le mot du mois : Woke

Malheureusement, le « wokisme » n’est pas une nouvelle école gastronomique, mais un mouvement d’abrutis néo-maoïstes prêts à détruire l’Occident honni. Sont « woke » les militants défendant les « minorités » et œuvrant contre les haines, à commencer par le racisme ou la misogynie. Mot désignant l’état d’esprit de la gauche progressiste américaine, « woke » est aussi devenu un sobriquet utilisé pour moquer l’intelligentsia hollywoodienne obsédée par l’image et désireuse d’incarner le « bien » sous toutes ses formes.

Lire aussi : Mathieu Bock-Côté : « L’accouplement du multiculturalisme canadien et du racialisme américain est morbide » [...]

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Vaccin et soft power chinois

C’était le 17 février : le président sénégalais Macky Sall se déplaçait en personne à l’aéroport international Blaise Diagne de Dakar pour réceptionner 200000 doses du vaccin anti-covid chinois Sinopharm en provenance de la République Populaire. Selon le journal Le Soleil, elles auraient fait l’objet d’une transaction avec Pékin d’un montant de 2,2 milliards de francs CFA (soit 3,3 millions d’euros).

Lire aussi : La Chinafrique est une machine à fric

 À cette occasion, le chef de l’État s’engageait devant les caméras de la télévision nationale RTS à lancer les premières vaccinations dès la fin du mois. L’événement témoigne de la stratégie du gouvernement chinois pour devancer les puissances occidentales dans la course au vaccin en Afrique. Profitant du retard dans la mise en œuvre par l’OMS de son dispositif COVAX (« COVID-19 Vaccines Global Access ») qui prévoit l’envoi de doses gratuites dans 145 pays d’ici fin juin 2021, l’Empire du milieu a déjà distribué 200000 doses gratuites au Sierra Leone et s’est engagé à en donner 100000 autres à la Tunisie.

Beaucoup moins chers que ceux des concurrents Pfizer-BioNtech, Johnson & Johnson ou Moderna, les vaccins chinois Sinopharm et Coronavac ont également l’immense avantage de pouvoir être conservés au réfrigérateur à une température entre 2 et 8 degrés[...]

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Philippe Grenier : musulman et français toujours

La rentrée parlementaire du 12 janvier 1897 restera dans les annales. Maniant le calembour, Le Matin titre sur la « première séance de l’enfant des douars », qu’il compare à une « représentation du Nouveau-Cirque », ajoutant que « le costume, les génuflexions du député musulman ont fort égayé nos honorables et le public des tribunes ». Le reste de la presse adoptera le même ton, mi-amusé, mi-scandalisé. Il est vrai que l’élection d’un député de confession islamique, le mois précédent, est un événement inédit.

Né à Pontarlier en 1865, fils d’un capitaine de cavalerie et orphelin à 6 ans, Philippe Grenier, handicapé d’une jambe, a connu une enfance solitaire. Il n’en poursuit pas moins de brillantes études de médecine, avant d’ouvrir un cabinet dans sa ville natale, où il soigne riches et pauvres, sans exiger de rémunération. Ce philanthrope assoiffé d’absolu est séduit par la mystique musulmane à la faveur d’un séjour en Algérie. Il se convertit, accomplit le pèlerinage à La Mecque et s’enflamme du zèle des néophytes. Désormais, il revêtira la tenue arabe traditionnelle, gandourah, burnous et turban, chapelet en bois de santal et bottes marocaines de cuir rouge. Il abhorre néanmoins fanatisme et superstition, professant une religion « dégagée de l’édifice des exagérations et des erreurs qu’ont ajoutées les interprétateurs dans la suite des siècles ».

Lire aussi : Et c’est ainsi qu’Allah est grand

D’abord désigné pour siéger au conseil municipal de Pontarlier, le docteur Grenier devient député en décembre 1896, à la suite d’une élection partielle et grâce au désistement de l’un de ses concurrents. La profession de foi de celui qui se proclame « prophète de Dieu » a pourtant de quoi surprendre. Elle commence par l’invocation coranique : « Au nom de Dieu, clément et miséricordieux ! » et s’achève sur cette vibrante péroraison nationaliste : « Dieu et patrie, Honneur et patrie, Humanité, Louange à Dieu seul et vive la France ! ».

Il déclare admirer « les héros de la Première République », tout en saluant « les longs efforts de la royauté pour fonder notre patrie territoriale telle qu’elle est constituée aujourd’hui ». Proche des idées radicales, Grenier prône la justice sociale, mais, avec un « large esprit de tolérance », il refuse l’anticléricalisme et dénonce les tares de la IIIe République en des termes toujours très actuels: « Un luxe inouï, effréné, s’étalant sans pitié en face des pires misères sociales; des dépenses formidables et souvent inutiles; une dette s’accroissant tous les jours; pas de fraternité véritable; tous les ressorts de l’État mis en jeu pour satisfaire les intérêts de financiers peu scrupuleux, ou de castes privilégiées… ».

« M. Philippe Grenier sera donc le premier mamamouchi qui viendra siéger en turban dans une assemblée française. Mais combien d’autres fantaisistes l’ont précédé ! »

Sa première apparition à la Chambre déchaîne les quolibets. Il se prosterne à la porte de l’hémicycle et procède à ses ablutions rituelles dans les toilettes réservées aux parlementaires. La Croix s’indigne : « Le renégat était, il y a encore quelques années, l’être le plus odieux à la France chrétienne ; aujourd’hui, il en est le député ». Mais le Gil Blas lui rétorque avec humour : « M. Philippe Grenier sera donc le premier mamamouchi qui viendra siéger en turban dans une assemblée française. Mais combien d’autres fantaisistes l’ont précédé ! »[...]

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