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Charles Millon : « Le malaise français, c’est de ne plus savoir où sont prises les décisions politiques »

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10 décembre 2018

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Il y a vingt ans, alors que Lionel Jospin était Premier ministre et Jacques Chirac président de la République, un fort séisme secouait la droite à l’occasion des élections régionales. Plusieurs barons du RPR ou de l’UDF choisissaient de braver les consignes de parti empêchant toute discussion avec le Front national. Charles Millon fut de ces courageux-ci, dont la carrière politique fut brisée en plein vol. Vingt ans après, les choses ont-elles changé, et la liberté politique a-t-elle crû ? Entretien avec un politique enraciné. En 1998, le Conseil d’État casse votre élection à la présidence du Conseil régional de Rhône-Alpes. Quel était le motif invoqué ? Petit rappel : j’ai été réélu en mars 1998 président de la région Rhône-Alpes au deuxième tour de scrutin, après un vote sans appel et une forte majorité (95 voix contre 61 à la gauche). Le Conseil d’État casse cette élection à l’automne 98, soit plus de huit mois après que celle-ci a eu lieu… Et sur la base d’arguties juridiques discutables. Dans le chaudron politique de l’époque, cette décision était totalement téléguidée : les raisons invoquées furent un échange en séance, à l’issue du premier tour de scrutin, entre le leader du groupe FN (35 élus) et moi-même concernant mon programme. Or, une disposition législative votée quelques semaines avant interdisait le débat lors de l’élection du Président d’un exécutif régional. Au passage, interdire le débat dans une assemblée est cocasse dans le fond. À cette époque, vous qui êtes un puissant baron de la droite, dans quel but acceptez-vous les voix du FN : pour gouverner localement ou en visant une union des droites plus générale ? Présider une Région revient à animer un « gouvernement » local, c’est donc la mission de soumettre des projets auxquels souscrivent des conseillers régionaux, eux-mêmes choisis par les électeurs de la Région. C’est l’intrusion de la politique nationale dans les élections territoriales qui les a pervertis. Oui, j’ai accepté les voix des conseillers régionaux FN qu’avaient élus les rhône-alpins, au même titre que j’aurais pu accepter des voix d’élus écologistes, indépendantistes, ou autre. Pendant mes dix années de présidence de 1988 à 1998, j’ai toujours gouverné avec des majorités différentes : sur l’aménagement du territoire avec les voix des conseillers communistes ; sur la liberté d’enseignement avec les votes FN ; sur les questions écologiques avec les voix du groupe écologiste. Chaque fois des majorités d’idées différentes, sans s’enfermer dans un système où un seul parti aurait imposé son diktat. Cela a permis à Rhône-Alpes de devenir l’une des régions françaises les plus innovantes et les plus attractives de l’hexagone. La campagne des régionales de 1998 était difficile ; la droite sortait KO debout de la dissolution perdue de 97 et de l’arrivée au gouvernement de Lionel Jospin. Les partis politiques étaient aux abonnés absents, il fallait retisser le lien avec les citoyens. À découvrir dans le dernier numéro de L’Incorrect et en ligne pour les abonnés.
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