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Espionnage, la guerre numérique

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Publié le

22 janvier 2021

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David Omand, diplômé de l’Université de Cambridge, a occupé les fonctions de coordinateur de la sécurité et du renseignement britannique, responsable auprès du Premier ministre du contre-terrorisme et de la sécurité intérieure, directeur du GCHQ (Global Communications HeadQuarters, l’équivalent britannique de la NSA), secrétaire principal à la Défense durant le conflit des Malouines, et conseiller britannique à la défense au sein de l’OTAN. Auteur d’How spies think : 10 lessons in Intelligence (Penguin Books, 2020), il a accepté de répondre à nos questions pour partager avec les lecteurs de L’Incorrect ses vues sur le métier du Renseignement, la relation transatlantique ou le combat contre le terrorisme.
omand

Les espions pensent-ils différemment à l’ère du numérique ?

Le constant avantage que nous possédons en tant qu’espèce ayant développé une intelligence réside dans le fait d’améliorer notre capacité de décision, pour réduire notre ignorance dans les situations dangereuses auxquelles nous pouvons faire face. Ce but constant s’applique au domaine du renseignement et des services secrets, parce qu’ils servent à améliorer la capacité de décision des gouvernements en leur fournissant les informations que ceux qui ne nous veulent pas de bien – dictateurs, terroristes et criminels de haute volée – cherchent à nous empêcher d’avoir. Le besoin de collecter et de traiter les renseignements n’a pas changé. L’ère numérique suppose cependant que les officiers du renseignement envisagent de nouveaux moyens (ce qui inclut les algorithmes de l’intelligence artificielle) de trier l’information en fonction de sa pertinence à travers une vaste quantité de données globales, de rejeter les informations objet, fausses ou trompeuses et de produire et distribuer les résultats beaucoup plus rapidement qu’avant, pour répondre à l’accélération des besoins opérationnels et à la demande des décideurs politiques, du commandement militaire, du contre-terrorisme et de la cybersécurité.

Ces « 10 leçons sur le renseignement » sont donc elles-mêmes nouvelles à l’ère numérique ?

Non. Ce sont des conseils vieux comme l’Histoire mais qui prennent un sens nouveau dans cette époque. La première leçon est une vérité fondamentale en ce qui concerne notre rapport à la réalité : notre connaissance du monde est toujours fragmentaire, incomplète et souvent fausse. C’est aussi vrai à l’ère numérique que ce pouvait l’être sous l’Ancien Régime. Mais cela a plus de sens encore aujourd’hui parce que les distorsions, les demi-vérités, la désinformation et la manipulation caractérisent beaucoup plus ce que l’on trouve sur les médias et réseaux sociaux. Les opérations de manipulation ont toujours existé, mais elles sont bien plus faciles à exécuter dans l’univers numérique.

Les réseaux sociaux et les nombreux bouleversements entraînés par les technologies numériques changent-ils radicalement la manière dont sont conduits l’analyse et le traitement de l’information de nos jours ?

La seconde leçon en matière de renseignement est aussi une vérité fondamentale : les faits demandent à être expliqués. Le simple fait d’observer une corrélation entre des données n’implique pas forcément une causalité. Même certains faits bien établis peuvent amener à produire des interprétations différentes, comme le sait n’importe quel juriste. Les analystes qui travaillent dans le renseignement doivent répondre à des questions qui commencent par « pourquoi ? » et « comment ? » afin de pouvoir, par exemple, déterminer les responsabilités dans une attaque terroriste ou une cyberattaque. Ces analystes doivent cependant, de nos jours, se fier moins à l’instinct et à l’expérience qu’à des méthodes scientifiques d’analyse de situation pour savoir ce qui se passe sur le terrain ou dans le cyberespace. Ils doivent ensuite justifier leurs conclusions en comparant systématiquement celles-ci avec des hypothèses alternatives et sélectionner celle qui rassemble le moins d’éléments contre elle – et pas forcément celle vers laquelle pointent le plus d’éléments – car si vous cherchez vraiment, vous trouverez toujours une preuve pour confirmer votre hypothèse. C’est exactement le type d’erreur commise en 2003, durant la guerre d’Irak. [...]

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