Joy Division, c’est avant tout un décor, en l’occurrence celui de Manchester au détour des années 1970, ainsi que les banlieues de Macclesfield et Salford d’où étaient originaires les quatre membres : Bernard Sumner (guitare), Peter Hook (basse), Stephen Morris (batterie) et Ian Curtis (chant). Cette ville a été le cœur de la Révolution industrielle, à la pointe question innovation, mais également en première ligne en matière de déshumanisation des grands pôles urbains et de conditions de vie exécrables de la plèbe.
En 1975, c’est dans une ville crasseuse, polluée, tendue, minée par la pauvreté et la violence qu’évoluent les futurs Joy Division. Les usines désaffectées et les taudis côtoient les bâtiments en ruine, vestiges des bombardements de la Seconde Guerre mondiale, bientôt remplacés par des barres en béton dystopiques. Au sujet de ce décor de rêve, Bernard Sumner déclare ne pas avoir vu un arbre avant ses neuf ans et ajoute : « De façon plus ou moins consciente, la laideur environnante te donnait une grande soif de beauté ». Il faut dire qu’entre les grands-parents traumatisés par la guerre, les proches malades ou alcooliques et les bagarres de rue, les disques de rock qu’on s’échangeait à l’époque étaient, pour ainsi dire, l’unique fenêtre sur autre chose que cet horizon sclérosé.
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