Se nourrir permet de se rattacher à un lieu défini, qui fait que les produits que nous consommons s’inscrivent dans une géographie. Ce lieu apporte avec lui son histoire, son climat, son imaginaire, tout ce que l’on nomme le terroir.
Le grand défi des cent cinquante dernières années fut d’apporter l’abondance alimentaire. Des produits comme le sucre, le café, l’huile, qui étaient rares et chers dans les années 1950, sont aujourd’hui de consommation courante. Le grand défi des années à venir est de rattacher cette abondance à des lieux : savoir d’où vient ce que l’on mange, qui l’a produit, comment. Les hommes ont besoin de savoir qui sont leur père et leur mère tout autant que d’où vient ce qu’ils mangent. C’est en cela que l’alimentation est fondamentale dans la construction des êtres. C’est là le danger d’une industrie agroalimentaire hors-sol et sans traçabilité, qui remplit les estomacs, mais qui ne nourrit pas. Or depuis une dizaine d’années, de nombreuses entreprises sont nées qui mettent en avant leur ancrage local et surtout qui expliquent ce qu’elles font. Jouant à la fois sur le modèle rétro et sur les codes marketing les plus en pointe, elles ont créé ou relancé des marques et renoué avec d’antiques traditions culinaires. En 2012, Marc Neyret fonde la brasserie de Vézelay, au pied de la basilique dédiée à sainte Madeleine, là où saint Bernard prêcha la croisade. Il utilise les eaux et le bois du Morvan pour produire sa bière, et s’inscrit résolument dans sa région. Le succès est au rendez-vous et ses bières sont maintes fois récompensées au Concours général agricole. À Paris, les années 2010 voient l’ouverture de nombreuses brasseries (...)
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