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Les critiques littéraires de mai

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Publié le

23 mai 2022

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Chaque mois, L’Incorrect sélectionne pour vous le meilleur et le pire de l’actualité culturelle. Perles rares ou navets survendus, authentiques exploits ou pathétiques arnaques, ici se poursuit l’ambition de distinguer. À rebours de la tyrannie du médiocre, du politiquement convenable et du consensus, nos critiques vous redonnent le sens des hiérarchies. Place aux critiques littéraires de mai.
critique

Méditation confinée

Le testament breton, Philippe Le Guillou, Gallimard, 152 p., 16€

Philippe Le Guillou a souvent écrit sur sa Bretagne natale, et c’est naturellement sur elle qu’il a écrit de nouveau lorsqu’il s’est trouvé confiné comme nous tous au printemps 2020, dans sa maison de Kerrod. De là ce Testament breton, mi-livre de souvenirs, mi-célébration de la Bretagne dans toutes ses dimensions – minérale, maritime, religieuse, traditionnelle, paysagère, historique, quotidienne. Avec, comme de juste chez cet amoureux de filiations littéraires, toujours reconnaissant à ses maîtres, l’hommage à quelques grands, en l’occurrence ici Gracq, Anatole Le Braz et Yves Tanguy. La Bretagne comme identité, en revanche, ne lui dit rien; il n’a pas la fibre militante, son rapport à sa « terre de granite recouverte de chênes » n’est pas politique mais esthétique, poétique et génétique – et tant pis pour ceux qui lui reprocheront de la célébrer comme décor plutôt que comme patrie. « Aux racines, restrictives, je préfère les linéaments schisteux, les lignes de crêtes, l’entaille des rivières, les vallées boisées ouvertes aux vents: elles sont en résonance naturelle avec le large et l’infini ». Bernard Quiriny


Requiem pour un chantier

De notre monde emporté, Christian Astolfi, Le Bruit du monde, 184 p., 19€

De notre monde emporté, c’est le roman de la désindustrialisation française et de la disparition de la classe ouvrière. Le narrateur entre dans les années 1970 aux chantiers navals de la Seyne-sur-Mer, comme son père. Il découvre cette énorme boîte, « une entreprise digne d’un roman de Jules Verne », le gigantisme des pétroliers réhabilités, la fierté des ouvriers, leurs bleus « maculés de suie, de limaille de fer et de poussières fibreuses ». Mais la concurrence étrangère asphyxie les chantiers; les restructurations se succèdent, l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 n’y change rien. Le couperet tombe : fermeture. Les employés se divisent; faut-il prendre la prime et partir, ou tenir et réclamer un reclassement? Notre héros prend la prime, 200 000 francs. « J’avais l’impression d’être un tueur à gages que l’on payait pour sa propre exécution ». Il lui faut s’inventer une nouvelle vie, ce à quoi il parvient tant bien que mal. Mais le « monde emporté » des chantiers lui colle aux basques: des ex-collègues tombent malades, à cause de l’amiante. Le combat reprend, cette fois-ci à l’hôpital et au tribunal… De notre monde emporté traite d’un sujet social mais n’est pas un roman militant; c’est la chronique mélancolique de l’effacement d’un univers, de l’engloutissement d’une sociabilité et d’une éthique professionnelles, d’une culture industrielle et locale ; la description, aussi, de la façon dont les changements structurels (la fin des Trente Glorieuses, le désengagement de l’État, etc.) bouleversent la vie des hommes tout en bas de l’échelle, si petits, si faibles. Un beau roman, historique et intime, écrit dans un style élégant et sobre, avec ici et là de belles formules qui font mouche. BQ [...]

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