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Le Sénat a voté cette semaine l’ouverture de la PMA aux femmes seules et aux couples de femmes. Mais le comble pour une assemblée censée être à droite, c’est qu’elle a aggravé le projet gouvernemental en y introduisant une disposition clairement eugéniste. Un zèle bien étrange.
On croyait le Sénat à droite. On croyait qu’il jouait son rôle d’opposition et de contrepoids à l’Assemblée nationale. On croyait que nos barons locaux issus des « territoires » – terme abscons désignant de manière condescendante nos provinces françaises – avaient conservé ce bon sens qui fait souvent défaut aux élus macronistes urbains et déracinés. On espérait que la chambre haute puisse être l’un des rares pôles de résistance au progressisme dominant. Fut un temps où le Sénat s’appelait officiellement conservateur. C’était, certes, il y a longtemps, sous le Ier Empire, mais on aurait pu penser qu’il en serait resté quelques traces.
Las, il faut malheureusement constater que la commission spéciale du Sénat sur la bioéthique a voté comme un seul homme mardi 7 janvier l’ouverture de la PMA à toutes les femmes. Certes, Bruno Retailleau, président du groupe LR et la co-rapporteuse du projet Muriel Jourda ont bien tenté de s’y opposer en soumettant au vote un amendement contestant l’élargissement de la PMA aux couples homosexuels et aux femmes seules mais celui-ci fut rejeté par 18 voix contre 14, ce qui montre à quel point le progressisme a pu gagner la haute assemblée.
La commission spéciale du Sénat sur la bioéthique a voté comme un seul homme mardi 7 janvier l’ouverture de la PMA à toutes les femmes.
Toutefois, seules les PMA effectuées pour pallier l’infertilité du couple seront remboursées par la Sécurité sociale, ont décidé les sénateurs, ce qui exclut de facto le remboursement des PMA effectuées par les couples de femmes et les femmes seules. Mais, cette question – pour importante qu’elle soit dans son principe car il s’agit de ne pas élargir le bénéfice de la solidarité nationale à des actes non-médicaux – n’est pas non plus au cœur du sujet.
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À noter également l’adoption d’un amendement proposé par Bruno Retailleau interdisant la transcription totale dans l’état civil français de l’acte de naissance étranger d’un enfant né d’une GPA lorsqu’il fait mention du parent d’intention, contrairement à ce qu’avait décidé la Cour de cassation en 2019. Et ce, afin de lutter efficacement contre la GPA et d’éviter l’hypocrisie d’une interdiction en France qui serait systématiquement contournée à l’étranger.
Désormais n’importe quel couple effectuant une PMA pourrait solliciter un DPI au terme duquel on lui confirmera – ou pas – que son embryon est porteur d’une anomalie génétique, afin d’éviter que celui-ci soit implanté dans l’utérus de la mère.
Mais ces deux tempéraments ne sauraient faire oublier le plus grave. Le Sénat a en effet voté un amendement proposé par la co-rapporteur LR Corinne Imbert, visant à autoriser l’extension du diagnostic préimplantatoire aux aneuploïdies, c’est-à-dire aux embryons porteurs d’une anomalie chromosomique, au premier rang desquelles la trisomie 21. Concrètement, cela veut dire que désormais n’importe quel couple effectuant une PMA pourrait solliciter un DPI au terme duquel on lui confirmera – ou pas – que son embryon est porteur d’une anomalie génétique, afin d’éviter que celui-ci soit implanté dans l’utérus de la mère. Même Agnès Buzyn s’y était opposée lorsque cette mesure avait été proposée à l’Assemblée, y voyant un risque de basculement total vers l’eugénisme.
Mais il faut croire que les sénateurs LR n’ont pas eu les mêmes scrupules éthiques ou qu’ils préfèrent favoriser le lobby des marchands de tests génétiques qui ont trouvé là une bien sordide manière de développer leurs activités commerciales.
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À la suite de ce vote, nous avons interrogé Bruno Retailleau qui nous a répondu ceci : « Ce qui s’est passé à la commission spéciale ne reflète pas la réalité sénatoriale. Je suis persuadé que la majorité du groupe LR est hostile à la PMA sans père, qui est profondément injuste pour les enfants qui seront concernés et qui ouvrira la voie à la GPA. Dans le débat qui va s’engager, je ferai aussi valoir deux choses. D’une part, le Sénat ne peut cautionner un bricolage juridique qui aboutirait à bouleverser notre droit de la filiation. D’autre part, le principe de précaution doit nous conduire à refuser toute expérimentation hasardeuse, comme les embryons chimères, qui témoignent d’une conception techno-marchande du corps ou l’extension du diagnostic pré-implantatoire qui nous conduira à une dérive eugéniste. Ce n’est pas ma conception de la dignité humaine ».
Si l’on peut saluer une telle prise de position, on peut tout de même se demander si Bruno Retailleau parvient à contrôler ses propres troupes au Sénat. Le projet de loi sur la bioéthique sera examiné en séance publique au Sénat à compter du 21 janvier prochain, c’est à ce moment-là qu’il faudra être vigilant. Quoiqu’il en soit, la cause des trisomiques n’a pas l’air d’intéresser beaucoup nos hommes politiques, pourtant il en va du respect des plus fragiles et des sans-voix.
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