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Municipales : les marcheurs à l’arrêt

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Publié le

4 février 2020

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La République en Marche se délite. Son groupe parlementaire, se soumettant naguère au bon vouloir du gouvernement, semble aussi traversé par les interrogations. Départs, polémiques et disputes sont désormais le lot quotidien d’un parti créé par et pour Emmanuel Macron. Et si la principale faiblesse du Président était sa majorité ?

 

Souvent moqués pour leur manque d’expérience politique et leur docilité flirtant avec le sectarisme, les députés de La République En Marche ont d’abord été mal élus. Choisis à la va-vite après le blitzkrieg macronien parmi les recalés de longue date de la vie politique française, les socialistes opportunistes ayant quitté le navire avant qu’il ne sombre ou quelques hommes passés par Les Républicains ayant eu le nez suffisamment creux pour sentir le vent tourner, les députés marcheurs l’ont été par défaut. Ils ont été parfois sélectionnés de manière hasardeuse avec pour seul critère leur capacité d’obéissance et leur fidélité à un maître à qui ils doivent tout.

 

Lire aussi : Perpignan, un scrutin capital pour Louis Aliot 

 

Prenons un exemple au hasard : Pierre Cabaré, député de La République en Marche de la première circonscription de la Haute-Garonne. Ce prothésiste dentaire toulousain n’était naguère qu’un politicien médiocre ayant perdu toutes les élections auxquelles il avait participé sous les couleurs du mouvement de Corinne Lepage ou diverses formations du centre-droit. Désinvesti le 31 mai 2017 par les marcheurs après la révélation de sa condamnation à une peine d’un an d’éligibilité en 2003, il avait déclaré à La Dépêche du Midi : « Une fois élu, je serai, à part entière, parlementaire de la majorité présidentielle pour voter les lois du programme portées par le Président et son Gouvernement. La France gardera ainsi l’élan de la réussite. »

C’est précisément ce discours formaté à mi-chemin entre la « win » du startupper expatrié aux Etats-Unis et le commissaire politique soumis qui a fini par lasser les Français. Tous les élus marcheurs, ou presque, ont tenu des propos du même acabit. Ces soutiens inconditionnels du jeune Emmanuel Macron ne seraient pas là pour lambiner mais bien pour voter à marche forcée les « réformes structurelles » dont le pays avait « tant besoin » pour se « rénover » et « accepter enfin le progrès ».

Il y a eu aussi quelques fritures sur la ligne lors de la désignation de Christophe Castaner à la tête du parti.

Pour voter, ils ont voté. De jour comme de nuit (les séances de nuit étaient autrefois l’exception), ils ont voté tout ce qu’on leur a soumis sans jamais contester ni la méthode ni le fond de la politique gouvernementale.

À une exception près extrêmement révélatrice : le projet de loi asile et immigration porté par Gérard Collomb. Ce projet a été le plus combattu par la majorité présidentielle, celui qui a suscité le plus de défiance dans les rangs. Les anciens socialistes et autres lourdingues leaders – tel que le député Aurélien Taché -, ont pour une fois fait montre de leur pleine et entière détermination : ne pas toucher au sacro-saint immigré étant peut être le seul tabou des temps pour les élites médiatiques. Il y a eu aussi quelques fritures sur la ligne lors de la désignation de Christophe Castaner à la tête du parti, entraînant une centaine de départs d’élus et de militants qui avaient manifesté leur désapprobation sur les colonnes de France Info.

Ces heurts n’avaient néanmoins pas entamé la solidité et la résilience de ce bloc présidentiel. Les élections européennes en furent d’ailleurs la preuve éclatante, montrant un parti relativement en place en dépit d’une très mauvaise tête de liste et d’une intense crise sociale des Gilets Jaunes. Le ver était-il déjà dans le fruit ? En s’accumulant, les tensions et les vexations finissent toujours par produire leurs effets. Il faut aussi que le chef soit incontestable pour que son autorité ne soit pas remise en question.

Il n’y a pas encore de « fronde » comparable à celle que subit François Hollande … mais le terreau est fertile.

Depuis quelques semaines, Emmanuel Macron perd pied et commet des erreurs qui lui sont inhabituelles : déclaration hasardeuse sur la Guerre d’Algérie, port d’un tee-shirt sur les violences policières au festival de la bande-dessinée d’Angoulême ou encore propos étonnants sur la paternité (« votre problème est que vous croyez qu’il faut être un mâle pour être un père »), ou fuite en rase campagne après que l’agitateur d’extrême gauche a signalé la présence du Président dans un théâtre parisien faisant la démonstration de la fragilité de son dispositif de sécurité.

Autant de bourdes qui s’accumulent dans un contexte par ailleurs violent à tous les niveaux. Il n’y a pas encore de « fronde » comparable à celle que subit François Hollande … mais le terreau est fertile. À Paris, Benjamin Griveaux n’imprime pas et coule dans les sondages. La querelle avec le mathématicien Cédric Villani, rencontré par Emmanuel Macron à l’Elysée et depuis exclu du parti, n’y étant d’ailleurs pas étrangère. Dans son sillage, le médaillé Fields a provoqué le départ de quatre députés de la majorité, dont celui de Paula Forteza qui sera sa tête de liste dans le 19ème arrondissement, portant le nombre de départs à un record de 19 élus. Il apparait finalement que les élections municipales et la polémique sur le congé parental fassent plus de tort à la majorité que la crise des Gilets Jaunes ! Contre-intuitive, cette analyse présente l’avantage de démontrer ce qu’est la politique politicienne : la somme des intérêts particuliers convergents d’un groupe d’individus donné à un moment M.

Pour La République en Marche, ces élections municipales seront un supplice. Paris s’offrait à Emmanuel Macron, ils la perdront et finiront certainement en troisième position derrière Rachida Dati. Dans les principales métropoles où se trouve le gros de leur électorat le plus fidèle, les marcheurs devront compter sur des têtes d’affiche venues du Parti socialiste ou des Républicains, sur des accords négociés aux coins de table. Rien de très glorieux. Pire, ils ne seront pas en mesure de présenter des candidats dans de nombreuses villes moyennes, faute d’un ancrage territorial suffisant.

Dans les principales métropoles où se trouve le gros de leur électorat le plus fidèle, les marcheurs devront compter sur des têtes d’affiche venues du Parti socialiste ou des Républicains. 

Dans la ville d’Hénin-Beaumont, où les jeunes avec Macron sont allés pour agiter la traditionnelle « menace fasciste », ils ne présenteront ainsi pas de candidat. À Perpignan, seule ville de plus de 100.000 habitants que le Rassemblement national peut gagner, le candidat marcheur serait désormais largué dans les sondages (derrière Louis Aliot, les Verts et le sortant LR macrono compatible).

 

Lire aussi : Lettre à mes amis parisiens qui m’expliquent les municipales 

 

On dit le duel opposant Macron à Le Pen écrit d’avance. Pour l’heure, c’est le cas. Emmanuel Macron doit pourtant avoir quelques sueurs froides. Si une autre opposition crédible émerge, il pourrait même être absent d’un second tour en 2022. D’ici là, beaucoup de choses se passeront, notamment la répétition générale que seront les élections régionales. En attendant, nous continuerons à regarder notre pays se défaire et sombrer dans la violence politique d’une extrême gauche incapable de gagner des élections … mais rêvant de prendre le pouvoir dans la rue.

 

 

Gabriel Robin 

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