Docteur Fourcade, comment la SFAP soutient-elle aujourd’hui les soins palliatifs en France ? Qui représentez-vous ?
La SFAP est une société savante. Notre objectif est d’augmenter les savoirs, de faire avancer la recherche et la technique. Il y a une société savante dans chaque discipline médicale mais en soins palliatifs nous n’avons pas que des médecins. La SFAP est donc pluridisciplinaire, comme les soins palliatifs. Nous regroupons à peu près dix-mille soignants de soins palliatifs et plus six-mille acteurs bénévoles d’accompagnement. C’est tout à fait original dans le paysage des sociétés savantes. Elle est à la fois dans la recherche de progression des savoirs mais aussi de militer pour le développement des soins palliatifs. Nous sommes donc aussi un mouvement militant.
Vous adressez-vous uniquement au personnel soignant ou tentez-vous aussi de sensibiliser le grand public ?
La SFAP est composée de docteurs en soins palliatifs mais parle au-delà du monde soignant, au grand public. Nous lançons une grande campagne d’information destinée au grand public.
Effectuez-vous un travail d’influence ?
Notre mission consiste aussi en un travail d’information. La SFAP est un acteur de référence au niveau professionnel: le seul représentant officiel en soins palliatifs, et l’interlocuteur des pouvoirs publics en ce qui concerne ces questions. Qu’il s’agisse d’écrire de nouveaux protocoles ou de réfléchir aux politiques de fin de vie.
L’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité (ADMD) revendique 71 % de médecins favorables à la légalisation de l’euthanasie ou du suicide médicalement assisté. Quel est l’état de la fracture entre les partisans et les opposants à l’euthanasie au sein du personnel médical ? N’êtes-vous pas minoritaires ?
C’est difficile à estimer. Le seul sondage qu’il y ait eu est un sondage du Conseil de l’Ordre qui a au moins 12 ans. Il montrait surtout que parmi les médecins, plus on est proche de la fin de vie, moins on est favorable à une aide médicale à mourir quelle qu’elle soit. Et plus on est éloigné de la mort, plus on a une position qui se rapproche de celle de la population générale. Un dermatologue ou un médecin de santé publique aura un point de vue assez proche de celui de la population générale. En soins palliatifs c’est tout à fait différent. L’été dernier, après l’épisode de la proposition de loi Falorni en faveur de l’euthanasie, nous avons organisé une grande consultation des acteurs de soins palliatifs. Nous leur avons demandé ce qu’ils pensaient du calendrier législatif sur ce sujet. Et les chiffres que nous avons recueillis sont complètement différents : 96 % des acteurs de soins palliatifs sont opposés à l’euthanasie, dont 98 % des médecins. C’est sans appel. La conclusion est que pour les acteurs de soins palliatifs, donner la mort ne peut pas être un soin. Ce qu’on dit, c’est que l’euthanasie, faite par des soignants, ce sera un « non » catégorique. Il n’y a pas moyen. Le cadre législatif actuel nous permet, à nous soignants en soins palliatifs, d’accompagner correctement nos patients. Nous manquons de moyens, mais le cadre législatif est satisfaisant.
La loi Claeys-Léonetti fait-elle toujours loi à l’hôpital ?
Oui, ce sont les retours que nous avons. Ce qui est difficile c’est que ce sont des sujets très complexes dans la pratique quotidienne et la loi Claeys-Léonetti est mal connue. Il y a une grande méconnaissance par la population en générale : des soignants, des possibilités, des obligations de soulager, de l’interdiction de l’obstination déraisonnable. Beaucoup de patients ne savent pas que tout cela est déjà possible avec la loi actuelle. [...]
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