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Qui, mais qui ? Peter Doherty

Qui, mais qui peut dire ce que je serais aujourd’hui si je n’avais pas été ensorcelé à quatorze ans par le charme espiègle, insolent et tendre de Peter Doherty ? Le coup de foudre eut lieu au début des années 2000. Au milieu d’une ennuyeuse après-midi comme seule la province en fabrique, résonna « Time For Heroes » des Libertines et cette première phrase éclatant comme un verre de cristal au sol: « Did you see the stylish kids in the riot? » (« As-tu vu les gamins stylés au sein de l’émeute? ») Ce fut comme une apparition.

Période libertines

Pete Doherty est né à Haxham, dans le Nord de l’Angleterre, quelques jours avant le printemps et quelques mois avant la sortie de London Calling. Il grandit entre une mère institutrice et un père officier (il faudra un jour rendre compte du nombre de merveilleux artistes instables que nous auront offerts le professorat et l’armée). Sa jeunesse est une tempête de délicieux clichés qui désormais semblent presque exotiques : goût pour la poésie décadente, le punk de 1977 et la pop anglaise ; errances dans les cimetières anglicans, petits boulots misérables et premières ivresses. Le jeune Doherty rencontre alors Carl Barat. C’est le début d’une relation à la fois fraternelle et amoureuse, orageuse et sentimentale, mais d’abord et surtout musicale. Ces jeunes gens connaissent leurs classiques. Il y a eu Lennon-McCartney, Richards-Jagger, Morrissey-Marr: il y aura Doherty-Barat, qui forment bientôt (e Libertines pour sortir, à la fin de l’année 2002, l’album Up The Bracket, produit par Mick Jones du Clash. Rarement on avait réussi pareil cocktail de fougue et de nonchalance. Doherty sait ce qu’il veut: comment fringuer ses acolytes, quelle guitare choisir et que dire dans les interviews pour hameçonner les journalistes. Plus sa vie est dissolue, plus sa garde-robe est élégante. Ainsi, ses miroirs seront toutes ces caméras, ces paparazzis, ces admirateurs, ces tabloïds, pour le pire et le meilleur. Après un second album aussi foutraque que charmant, les Libertines se séparent en 2004, peu de temps après avoir atteint le sommet des charts avec leur single « Can’t Stand Me now ». [...]

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Plumes : cauchemar contemplatif
L’ombre du réalisateur thaïlandais Apichatpong Weerasethakul plane sur ce premier film égyptien: plans fixes, souvent décadrés, à la plastique irréprochable, et suggérant par l’hors-champ un monde inquiétant, insitué dans le temps. Sur un prétexte surréaliste – un père de famille disparaît pendant une séance de magie, remplacé par un poulet – Omar El Zohairy dresse le portrait terrible d’une mère de famille hébétée par la misère, dans un pays entrevu comme une gigantesque friche industrielle, régulièrement menacé par un brouillard chimique qui fait peser sur tout le film un danger imminent, digne d’une bande-dessinée d’Enki Bilal. [...]
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Berlin Berlin : humour noir, folie rouge

Gérald Sibleyras: J’ai un lien avec la RDA, ma mère était berlinoise, elle a fui le régime communiste dans les années 50, sa famille est restée, pensant que ça s’arrangerait. Je suis né en 1961, comme le mur. Lorsque j’étais enfant, nous allions en vacances visiter la famille à Berlin Est, ce qui n’était pas la destination touristique la plus courue, sauf pour les jeunesses communistes. Il y a quelques beaux films allemands sur le sujet, La Vie des autres, bien sûr, mais aussi Goodbye Lenine, qui est une sorte de comédie, Le Vent de la liberté, Barbara (très beau film). Il me semble que les intellectuels et les artistes français ont souvent été complaisants avec les communistes depuis la fin de la guerre, c’est peut-être la raison pour laquelle ils n’ont pas utilisé les régimes de l’est comme décor.

Et vous, Maxime d’Aboville, comment avez-vous composé ce personnage d’agent convaincu de la Stasi qui semble inaccessible au doute tant politique que sentimental ?

Maxime d’Aboville: Il ne faut jamais oublier qu’un personnage sort d’abord de l’imaginaire d’un auteur. La mission de l’acteur est ensuite de se glisser dans cet imaginaire et, malgré lui, d’y apporter sa singularité. Ce qui m’est venu d’emblée (et sans réflexion) pour le personnage, c’est une tonalité très « bonne famille » française, entre Jean d’Ormesson et Christian Clavier, alors que le personnage est allemand et, par définition, de gauche ! Je crois que ça renforce le ridicule du personnage, la dimension totalement improbable de ce type. Ça me permet aussi de jouer d’un milieu social que je connais bien et de l’image que certains pourraient avoir de moi… Disons que j’en rajoute et ça m’amuse ! [...]

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Azuro : conte d’été
Farniente dans un pays méditerranéen imaginaire : un groupe d’amis diversement accompagnés ou non (famille avec enfants, couple, célibataire) profite de la mer quand surgit un bel inconnu à gros bateau. La tentation saisit l’épouse ; saura-t-elle y résister? Premier film réalisé en France après le confinement de 2020, Azuro, adapté des Petits chevaux de Tarquinia, rend compte de la bulle sanitaire dans laquelle il a été tourné. Les acteurs sont heureux de jouer entre eux, et ils saisissent le texte de Duras avec une légèreté singulière. Le grain de la pellicule fait ressentir la chaleur sur la rocaille et les feux incessants qui entourent les vacanciers. [...]
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Jean-Jacques Schuhl : Autoportrait au stroboscope

Écrivain culte et rare (six livres en cinquante ans), Jean-Jacques Schuhl cultive dès sa bibliographie le mystère et les contrastes, passant de l’ombre de deux romans restés inaperçus dans les années 70 (Rose poussière et Télex n° 1) au Goncourt 2000 pour Ingrid Caven. Ce dernier livre, inspiré par sa compagne, actrice et chanteuse allemande, oscille encore entre l’intime, le masque et le glamour, contribuant à donner de l’auteur l’image d’un dandy étrange et fabuleux ne livrant de lui que quelques textes miroitants et impeccables à intervalles irréguliers. Vingt-deux ans après sa grande mise-en-lumière, Schuhl est toujours très loin au-dessus de la production moyenne : avec moins d’une centaine de pages, ses Apparitions concentrent même à elles-seules suffisamment de génie littéraire pour les dix ans à venir.

« Je » est partout

Autoportrait en trompe-l’œil, chambre d’échos et diffractions, le projet, à l’objectif évident – se peindre soi-même – se déploie pourtant aussitôt en un somptueux vertige. « You. », telle est la personnalité de l’année élue par le magazine Time à l’heure des réseaux sociaux, une suggestion d’outre-Atlantique que l’écrivain, en liminaire de son livre, choisit de prendre au sérieux, si l’on veut, se décrivant avec les mots de Jacques Rigaut: « Yeux : yeux / Oreilles: oreilles / Nez : nez… » avant d’admettre s’être souvent trouvé des traits de comparaison avec un autoportrait de Dürer jeune, le prétexte d’une pose jugée suspecte pour notre « outsider silencieux en bout de table » qui se lance dans des jeux de réflexions et de transparence avec des images de journaux éclairées laissant apercevoir leur verso, ou des inconnus auxquels il s’identifie, ou encore, se remémorant une amie qui ne lui pardonna pas la description qu’il avait donnée d’elle dans un livre, s’avouant qu’il avait en fait surtout décrit par ce croquis d’une autre un aspect de lui-même. Le reflet de soi selon Schuhl est une porte-miroir où tout se répercute avant de pivoter et de s’ouvrir sur l’ombre. [...]

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Octantrion : audace nordique
une violoniste formée à l’Institut Erik Sahlström en Suède et un compositeur passionné de lutherie et d’histoire, Octantrion a des références sérieuses en musique traditionnelle scandinave. Les pays du nord, comme ceux du bassin méditerranéen, sont des terres de mandoles et d’instruments à doubles cordes où la musique se compose avec des quarts de ton (les pays européens jouent sur douze demi-tons). Cette subdivision peu courante peut d’ailleurs parfois sembler étrange. Deux morceaux de II sont de purs traditionnels nordiques: Ragnarök, dont on ne sait s’il date du Moyen Âge ou de la Renaissance et En Gang När Jag Ska Dö, un traditionnel suédois. Le reste de l’album prend plus de liberté avec les codes folkloriques tout en exploitant toutes les possibilités des instruments scandinaves: vièle à archet, nyckelharpa alto ou ténor ou cistre basse nordique dans une perspective parfois quasi expérimentale. [...]
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Les critiques musicales de mars

Fly me to the moon

Chrysalis, Joon Moon, LDDC / Musique Sauvage, 15€

Inclassables, les compositions et ambiances du pianiste Julien Decoret ainsi que la voix de Liv Warfield – ex-protégée de Prince – continuent de relater les tribulations de la fictive Joon Moon, actrice hollywoodienne des années 1950 et 1960 qui prête également son nom au groupe. Quelques titres, cependant, auraient mérité d’être plus audacieux. On appréciera avant tout ce fantasme-prétexte permettant de s’inspirer d’une époque sans souci d’aucune contrainte et la faculté de Joon Moon pour le détournement sonore. Du velours ! Alexandra Do Nascimento

Envoûtant

Hannet Lekloub, ŸUMA, French Flair, 15 €

Le troisième album de Ÿuma permet les retrouvailles de Sabrine Jenhani (chant) et Ramy Zoghlami (chant, guitare), dont les parcours s’étaient un moment dissociés. On se laisse à nouveau envoûter par cet « indie folk » identifiable chanté en arabe tunisien et ses mélodies nostalgiques. « L’album parle de l’aisance d’être romantique, ou non. Comment évoluer dans un pays qui n’est pas du tout stable ? La Tunisie est un pays de rêveurs, et là, nous sommes concentrés sur un seul but : comment remplir le frigo. Tant de choses se sont passées, nous avons pris de la distance ». Réalisé aux Pays-Bas, le disque, qui comporte des sons et des rythmiques de l’électro nord-européenne continue d’être un merveilleux support au voyage poétique. Alexandra Do Nascimento [...]

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Maxime Dalle : rallumer l’esprit corsaire

En septembre 2020, le directeur des revues Raskar Kapac et Phalanstère s’embarquait à bord du Pink Floyd avec un petit équipage sous la houlette de Patrick Tabarly, frère du célèbre navigateur, pour chercher dans les lieux de ses exploits les échos du plus célèbre corsaire français derrière Surcouf : Jean Bart. À la manière d’un Sylvain Tesson retraçant en sidecar la retraite de Russie de la Grande Armée, Maxime Dalle a mêlé récit d’aventure direct, pèlerinage évocatoire et méditation engagée pour nous confectionner ce beau boulet de canon et lancer Le Pari corsaire comme une salve à réveiller les morts et les héroïques-zombies, pour paraphraser Todd, qui s’ennuient dans l’hiver français. À l’abordage !

Traquer les fantômes est l’une de mes activités favorites

Tu es toi-même descendant de corsaire. Jean Bart, qui est une légende nationale, était-il aussi une légende familiale ?

Le sang des corsaires dunkerquois coule dans les veines de ma famille paternelle depuis des siècles.…

L’Incorrect numéro 73

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