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Affaire Méric : sick sad world

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Publié le

8 septembre 2018

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Cinq ans après les faits, le procès lié à la mort de Clément Méric a enfin été ouvert. Une affaire qui aura déchainé, cinq ans durant, l’intégralité des médias français et des partis politiques. À l’origine ? Une bagarre de rue entre une bande de « skins natios » et des « antifas » qui a dégénéré, provoquant la mort du jeune étudiant de Sciences Po Paris répondant au nom de Clément Méric. Pourquoi ce fait-divers a-t-il été l’un des plus commentés des cinq dernières années ?

 
L’affaire Méric est devenue politique à peine quelques heures après la commission des faits, dès le moment où les trois accusés, dont Esteban Morillo, ont été identifiés et placés en détention. La première personne à annoncer la mort cérébrale de Clément Méric fut d’ailleurs Alexis Corbière, alors secrétaire national du Parti de gauche. À cette occasion, il tint le propos suivant sur son blog personnel : « Le Parti de gauche interpelle le Ministre de l’Intérieur et exige que les forces de police agissent dans les plus brefs délais pour retrouver les responsables de ce crime odieux. Le PG exige également la dissolution des Groupes d’extrême droite qui multiplient les actes de violence à Paris et à travers le pays depuis plusieurs semaines ». Le lendemain, des milliers de militants antifasciste se massaient dans les rues pour rendre un dernier hommage à Clément Méric, avant que la classe politique n’entre dans la danse, jusqu’au sommet de l’Etat.
 
Avant le procès devant les tribunaux, il y eut donc un terrible procès médiatique, dévastateur pour les accusés, littéralement jetés dans la fosse aux lions. On pourrait même aller jusqu’à parler d’un délit de sale gueule, d’un déni de justice pour raisons politiques, voire d’un mépris de classe. Le groupe des accusés est, en effet, composé de personnes issues des classes populaires, à l’image d’Esteban Morillo, jeune boulanger fils d’un immigré espagnol. De l’autre côté, Clément Méric était un fils de la bourgeoisie de gauche bretonne, dont les parents étaient des connaissances de Jean-Jacques Urvoas. Le meneur du groupe d’antifas, Matthias Bouchenot, sur lequel nous reviendrons, est quant à lui auteur d’ouvrages sur la violence politique, professeur d’histoire et géographie, fils d’un journaliste de France 3 en région. Des pedigrees éloquents, similaires à celui d’Antonin Bernanos, descendant direct du célèbre écrivain catholique condamné pour avoir jeté un engin incendiaire sur une voiture de police, qui ont pu rendre plus complexe la recherche de la vérité factuelle, tant le groupe des « antifas » a pu bénéficier de soutiens médiatiques, mais aussi d’une éducation et d’une culture lui offrant une défense plus articulée.
 
Pour les accusés, enfants de peu, le système médiatique a immédiatement été perçu comme hostile, menaçant. Et pour cause, les « antifas » et leurs familles, appuyés par toute l’intelligentsia de gauche, ont transformé ce qui était une rixe entre grands enfants en crime politique, en assassinat idéologique prémédité. Qu’on s’entende bien : ce qui est arrivé à Clément Méric fut un drame déchirant. Clément Méric était un enfant. Un enfant qui portait lui aussi son lot de traumatismes et de fêlures. Atteint d’une leucémie, Clément Méric avait quelque chose à se prouver, à l’âge où on veut tout accomplir, à l’âge de tous les espoirs. Idéaliste ? Probablement. Complexé ? Peut-être aussi. Il n’est pas normal de mourir à cet âge. On ne peut qu’imaginer la souffrance des parents de voir ainsi disparaître leur fils, encore un bébé à dix-huit ans tout juste. À l’identique, les parents d’Esteban Morillo, enfermé en prison, le visage exhibé sur toutes les chaines de télévision, dépeint en monstre, ont dû être aussi très durement affectés par cet épisode.
 

 

C’est l’irresponsabilité de la classe politique qui est ici en cause. Ceux qui ont récupéré l’affaire l’ont fait sans se soucier une seconde des vies des accusés, sans se préoccuper de morale élémentaire, sans même inviter les « antifas » à renoncer à la violence qu’engendre le cycle de la vengeance. Ils avaient besoin de cet événement pour leur narration, qui tient en une sentence définitive : « l’extrême droite tue ». La réalité semble pourtant bien différente de l’histoire qui nous est contée depuis cinq ans. Pour s’en convaincre, les témoignages des différents protagonistes de l’affaire suffisent. Ainsi du susnommé Bouchenot, dit « le boxeur », qui, pour se dédouaner de toute responsabilité, a déclaré : « On a toujours revendiqué dans les milieux d’extrême gauche l’autodéfense populaire (…) notamment contre l’extrême droite ». Ce qui signifie, en langage quotidien, que parce qu’il est « antifasciste », il avait le droit de provoquer un conflit violent, le droit d’interdire l’accès d’une vente privée à des « skins natios ».
 
Ce procès étonnant réunit d’ailleurs à peu de choses près l’ensemble de la sociologie française : les lettrés aisés d’extrême gauche, les prolétaires d’extrême droite, le « punk à chien » témoin, les vigiles beurs et africains, les vendeurs de polos Fred Perry, et, bien sûr, des journalistes un peu perdus, surpris par le déroulement de l’audience. Quid de ce vigile qui a durement regardé Matthias Bouchenot, vraisemblablement ému, le désignant comme le provocateur de la bagarre, celui qui a poussé le frêle Clément Méric dans l’arène ? « S’ils avaient pris mes propos en considération, on serait pas là aujourd’hui. Ca fait un moment que j’attends de lui dire en face, au boxeur ». Quid de ce vendeur déclarant « Mon avis personnel c’est que des deux groupes, c’est celui de Méric qui voulait être agressif » ? On le voit, il sera difficile pour certains de tirer les conclusions qui s’imposent, de dénouer le fil complexe d’un fait-divers qui n’en est plus vraiment un.
 
Des vies brisées des deux côtés, pour un conflit de territoire entre la politique et la rébellion adolescente. Reste donc une question centrale, pas encore élucidée : pourquoi cette affaire a fait un tel bruit ? Et subséquemment, pourquoi est-elle désormais si emblématique ? À vous de deviner.

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