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Ajaccio, laboratoire de la bataille entre les blocs progressiste et conservateur

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Publié le

14 décembre 2019

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Contrairement aux propos tenus par Aurélien Pradié dans LIncorrect, il y aura bel et bien une alliance aux municipales entre Les Républicains (LR) et la République en Marche (LREM) dans au moins une ville et pas nimporte laquelle : le berceau de Napoléon, Ajaccio. Bien avant lexclusion dÉrik Tegnér, la cité impériale est depuis quelques semaines, le théâtre dun rassemblement entre LR et la majorité présidentielle.

 

« Réveille-toi, ville sacrée » : lAjaccienne a du mal à comprendre « son fils prodigue », le maire dAjaccio, Laurent Marcangeli qui a décidé, dans le cadre de la campagne des municipales, douvrir sa liste du centre-gauche aucentre-droit. Dans une ville classée à droite et probablement très conservatrice, ils sont nombreux à s’étonner du choix politique déclaré à maintes reprises dans les colonnes de la presse insulaire par le premier édile. Petite rétrospective pour comprendre la situation ajaccienne.

 

Lire aussi : Érik Tegnér exclu des LR : les coulisses de son éviction

 

Lors des primaires de la droite fin 2016, le maire dAjaccio alors député apportait son soutien à Alain Juppé. Cette décision suscitait une première fissure dans sa majorité municipale avec quelques élus locaux mécontents, proches de Nicolas Sarkozy. Les résultats dAjaccio lors des primaires donnèrent une confortable avance à l’ancien Président de la République au premier tour (43 % contre 34% pour Alain Juppé) avant que François Fillon ne lemporte au second (56% contre 44%). Le deuxième round intervint quelques mois plus tard lors de l’élection présidentielle de 2017 : Marine Le Pen obtenait 33% des voix au premier tour tandis que François Fillon en récoltait 23%. Le candidat Macron, de son côté, se hissait à la troisième place avec 18% des voix. Cest d’un fifrelin (50,1%) qu’il battait la candidate de lex-Front National lors du second tour. Qui a dit que les blocs progressiste et conservateur nexistaient pas ?

 

Autre grand reproche des militants et élus « sarkozystes » d’Ajaccio : la volonté du maire douvrir pour la constitution de sa liste aux prochaines municipales ses rangs à de nombreux cadres dEn Marche mais aussi à d’anciens militants socialistes tout en conservant des LR qui lui sont restés fidèles. Dans son équipe, on a déjà largement admis l’idée que François Baroin pourrait devenir le prochain Premier ministre dEmmanuel Macron en 2022.

 

Dans la foulée de la présidentielle, les législatives voyaient la Corse basculer dans lautonomisme avec l’élection de trois députés sur quatre. Seule la circonscription dAjaccio fut conservée par Les Républicains avec le docteur Jean-Jacques Ferrara, ancien suppléant de Laurent Marcangeli. On connait la suite : la ligne Wauquiez seffondra lors des élections européennes, contraignant le président de LR à démissionner. Lorganisation des nouvelles élections internes au parti a été l’occasion de remodeler la ligne idéologique et de préconiser de nouveau louverture : au centre, chez les électeurs pourtant partis depuis belle lurette à LREM !

Le jeu de la politique locale tend également à brouiller les pistes : sport « national » en Corse, la politique est le théâtre des affrontements, des manigances et des intrigues les plus iconoclastes. Dailleurs, ce constat fait dire à bon nombre dobservateurs quun Corse qui ne réussit pas en politique dans l’île pourrait sans problème se faire élire député ou sénateur sur le continent tant le chemin ressemble davantage au parcours du combattant qu’à une promenade sur la Baie des Anges.

 

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Mais passons cet intermède pour revenir au sujet qui nous préoccupe : avec larrivée de Christian Jacob aux commandes des LR, le parti a décidé de nommer Jean-Jacques Ferrara Secrétaire national délégué pour la Corse. Ce qui sapparente à une véritable reprise en main du parti par Laurent Marcangeli, pourtant proche dÉdouard Philippe, au détriment des fidèles sarkozystes qui nont jamais pardonné au maire dAjaccio son soutien à Alain Juppé. Marcel Francisci, lancien président des LR rumine son amertume tout comme Guy Castellana qui fut nommé par Laurent Wauquiez chargé de mission pour la Corse du Sud. Prendre la fédération LR relevait pour Laurent Marcangeli dune nécessité politique avant les municipales. La situation ajaccienne aurait pu ressembler à s’y méprendre à celle de Nice où Christian Estrosi sest félicité de l’éviction d’Éric Ciotti. Les choses sont toujours plus complexes en Corse où les partisans de la droite « forte » n’entendent pas se laisser faire.

 

Lire aussi : Érik Tegnér, Marion Maréchal : Aurélien Pradié s’explique dans un entretien exclusif

 

Autre grand reproche des militants et élus « sarkozystes » d’Ajaccio : la volonté du maire douvrir pour la constitution de sa liste aux prochaines municipales ses rangs à de nombreux cadres dEn Marche mais aussi à d’anciens militants socialistes tout en conservant des LR qui lui sont restés fidèles. Dans son équipe, on a déjà largement admis l’idée que François Baroin pourrait devenir le prochain Premier ministre dEmmanuel Macron en 2022. En fondant son propre mouvement local en septembre 2018, « Ajaccio, Le Mouvement » (LM pour Laurent Marcangeli comme EM), Laurent Marcangeli déclarait : « Je reste une homme de droite, de centre-droit, comme je l’ai toujours dit. Mais aujourd’hui, sur la gestion locale, je trouve qu’il y a des clivages qui doivent être dépassés. Qu’on soit de gauche, de droite ou nationaliste… »

Les militants de la ligne « dure » ont utilisé la colère ressentie envers le maire dAjaccio pour se structurer. Depuis septembre, Guy Castellana, François Filloni (adjoint au maire), Isabelle Feliciaggi (conseillère municipale déléguée aux handicaps et conseillère territoriale), Antoni Chareyre, Nathalie Ruggeri (adjointe au Maire et ancienne conseillère départementale), Marie Zuccarelli (adjointe au maire et ancienne conseillère départementale) ont démissionné de leurs fonctions au sein du conseil municipal. Une première vague dont on dit quelle serait suivie dune seconde en janvierCe petit monde soutenu dans lombre par Marcel Francisci a prévu de constituer une liste aux municipales qui serait menée par François Filoni (et non François Fillon !).

 

Lire aussi : Brexit : sortie de l’UE par la droite

 

En parallèle, le jeune Antoni Chareyre, Jordan Bardella insulaire (se revendiquant souverainiste et conservateur) est pressenti pour devenir le prochain délégué du Rassemblement National en Corse. Par ailleurs, la liste Filoni a dores et déjà reçu le soutien de la Droite populaire de Thierry Mariani, lun des principaux artisans de lunion des droites. Dans les colonnes du Parisien, ce dernier avait fustigé l’attitude des LR qui se situent de plus en plus « dans une politique de collaboration avec En Marche ! »

Pour Antoni Chareyre : « Il existe deux pôles aujourd’hui en France : les souverainistes, conservateurs et les mondialistes que l’on appelle pompeusement les progressistes ». Au journaliste Corse Matin (seul quotidien de l’île) qui linterroge « sur les soupçons d’une liste RN déguisée », Antoni Chareyre renvoie la balle à Laurent Marcangeli : « Y a-t-il une liste La République en Marche ? »

Enfin, les membres de la liste Filoni nexcluent pas des rapprochements avec dautres listes dont des nationalistes pour faire tomber Marcangeli dont ils dénoncent la « gestion autoritaire et la prédominance dans les affaires de la ville de son cabinet ».

 

Pour Antoni Chareyre, « Il existe deux pôles aujourd’hui en France : les souverainistes, conservateurs et les mondialistes que l’on appelle pompeusement les progressistes. »

 

Dans le département de Corse du Sud, on observe avec attention les actes de cette tragicomédie. Jean-Michel Mosconi, délégué LR de la 2e circonscription voisine et membre dOser la France de Julien Aubert développe son analyse : « La problématique des LR au niveau national se matérialise à Ajaccio avec un maire qui affiche son soutien au Président de la République tout en gardant des liens avec LR. De nombreux élus sont sur cette ligne qui consiste à profiter électoralement dune opinion favorable au gaullisme et au courant conservateur tout en souvrant aux progressistes par intérêt personnel. La stratégie du « un pied dedans, un pied dehors » est un slogan politique qui tend à s’affirmer pour les prochaines municipales. Au sein de la direction nationale des LR, on acte, après la ligne Wauquiez, le virage centriste. On peut ainsi discuter avec LREM mais on ne doit pas parler aux gens dune droite plus forte sous peine dexclusion. La seule option aujourdhui est d’être macron-compatible, toutes les validations au bureau, toutes les nominations vont dans ce sens. »

Âgé d’une quarantaine d’années, Jean-Michel Mosconi sapprête à mener une liste dans la troisième ville de Corse, Porto-Vecchio. Pour lui, lexclusion dÉrik Tegnér marque « une double faute politique et électorale : politique car il faut du débat d’idées dans un mouvement et électorale car cela va à contre-sens de lhistoireOn le voit avec la récente victoire de Boris Johnson et des conservateurs britanniques qui prouvent les aspirations des peuples occidentaux à retrouver leurs propres souverainetés. Chez les LR, il faut être dans le sens de la direction du parti qui va soutenir dans les territoires des personnes à contre-courant de ce que vivent et ressentent les populations. »

Quant à Ajaccio, le mois de mars sera Austerlitz pour les uns, la Bérézina pour les autres !

 

Jean-Pierre Nicolai

Correspondant en Corse

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