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Le 16 novembre dernier, la formule « nègre littéraire » a définitivement été bannie du langage officiel et doit dorénavant être remplacée par le vocable « prête-plume ».
Le 16 novembre dernier, la formule « nègre littéraire » a définitivement été bannie du langage officiel et doit dorénavant être remplacée par le vocable « prête-plume ». C’est en tout cas ce que le Conseil représentatif des associations noires de France aura obtenu du ministère de la Culture au terme d’une bataille linguistique de plusieurs mois sur fond d’antiracisme et d’anticolonialisme. Une recommandation sera ainsi envoyée aux professionnels de l’édition et aux médias pour que ces derniers en tiennent compte et modifient leurs usages en conséquence.
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L’initiative aurait de quoi faire rire tant elle s’apparente à l’humour délibé- rément absurde d’un Alphonse Allais. Mais les hérauts de ce combat sont sérieux et considèrent que le langage est malgré nous un vecteur du racisme. On voudrait convoquer Camus, leur rétorquer que le langage n’est pas autre chose que l’expression d’une dialectique entre le verbe et la raison, que l’un n’est pas l’hypostase de l’autre, qu’il n’y a d’ailleurs pas nécessairement de rapport logique entre le signifiant et le signifié, que les limites du langage marquent les limites de l’esprit… Mais à quoi bon ?
Leur iconoclasme exacerbé s’inscrit dans les pas de l’euphémisation du langage et de l’écriture inclusive. Et c’est précisément parce que nous ne parlons plus le même langage qu’on ne peut rien espérer d’un débat qui ne pourra que constater son infertilité immanente.
Prenons acte de cette évolution. Rebaptisons le Cap Nègre, le roman policier d’Agatha Christie, et la pâtisserie danoise. Les quelques mots aux assonances similaires doivent aussi disparaître (il y en a au moins un : le Charnègre, race de chien aujourd’hui disparue). Il conviendra aussi de renommer le mouvement littéraire d’Aimé Césaire. Par extension, dans un souci de parfaite égalité, on proscrira le substantif « blanco », et avec lui le correcteur liquide de nos années scolaires, le livre relié des imprimeries, et la fameuse jurisprudence fondatrice du droit administratif.
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Dans un souci d’égalité et de respect pour nos amis asiatiques, le pastis ne se commandera au bar que sous sa dénomination commerciale. Il en sera ainsi du vin, qu’il soit de la couleur du mets ou de celle de l’entremets. Les idées, la crasse, la nuit, la malice, la trahison, l’humeur, le chagrin, le souci, l’ingratitude, la calomnie devront se départir de l’épithète que l’on aime tant leur accoler. Les expressions d’usage (« Un combat de nègres dans un tunnel », « Nègre-blanc », « montrer patte blanche », « regarder dans le blanc des yeux ») seront frappées d’excommunication.
Alors sûrement notre monde perdra des racistes. L’humanité se tiendra main dans la main dans un daltonisme joyeux. Et un jour viendra la question innocente d’un enfant trop intelligent pour son siècle. Lorsqu’il interrogera les siens sur la disparition du vocable « nègre littéraire », un autre viendra peut-être lui répondre que savoir écrire admirablement bien au point de devenir l’écrivain d’un autre ne pouvait revenir à un homme de couleur.
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