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Nouvelle-Calédonie : nous vous avons compris !

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Publié le

2 novembre 2018

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NOUVELLECA

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Le 4 novembre prochain, les habitants de la Nouvelle-Calédonie seront appelés à se prononcer en faveur ou non du maintien du « Caillou » au sein de la république française. Sur les 175000 électeurs an âge de voter, plus d’un tiers d’entre eux appartiennent à des générations de métropolitains installés sur l’archipel, français depuis un décret impérial de 1853. L’indépendance ? Une perspective que les caldoches sont résolus à empêcher.

 

A presque une journée de vol d’avion de Paris, la Nouvelle-Calédonie semble loin des esprits de la mère-patrie. Située dans l’océan pacifique, l’île est divisée principalement en deux groupes ethniques importants, les kanaks et les caldoches. Ces derniers, 27% de la population actuelle recensée dans l’archipel, viennent principalement d’Alsace-Lorraine, du Nord-Pas-de-Calais, du sud de la France ou encore de l’île de la Réunion.  Et si on distingue plusieurs vagues différentes de colonisations, pénales comme bourgeoises, entre la fin du XIXème siècle et le début du siècle suivant, les caldoches forment aujourd’hui une communauté quasi comparable aux pieds noirs d’Algérie française. Colonie de bannissement à ses débuts (notamment pour les communards de Paris), les nouvelles autorités françaises ont fort à faire pour mater les révoltes des kanaks, ces mélanésiens dont le nom, qui prend tout son sens à l’approche du référendum, signifie « homme libres ». Priés de se conformer aux règles de l’administration coloniale, les kanaks seront soumis à la loi de l’indigénat, véritable code de ségrégation raciale qui sera vigueur dans tout l’empire français jusqu’en 1946. La fin de la seconde guerre mondiale permet rapidement l’émergence de mouvements nationalistes qui vont rapidement s’opposer aux caldoches, soucieux de préserver leurs droits et privilèges.

Si on distingue plusieurs vagues différentes de colonisations, pénales comme bourgeoises, entre la fin du XIXème siècle et le début du siècle suivant, les caldoches forment aujourd’hui une communauté quasi comparable aux pieds noirs d’Algérie française

L’élection de François Mitterrand va susciter de nombreux espoirs de changements. Mais rapidement déçu par les propositions des socialistes, le Front de libération national kanak socialiste (FLNKS) décide de chasser en 1984 les éleveurs caldoches, ce que l’on appelle les broussards dont l’allure tient plus à des cow-boys du Far West qu’à des agriculteurs de la Creuse, implantés notamment dans le nord et l’est de l’île. D’affrontements armés larvés sur fond de racisme, le conflit foncier va atteindre son paroxysme lors des événements du 22 avril 1988. La gendarmerie de Fayaoué est soudainement attaquée par les indépendantistes. 4 fonctionnaires sont brutalement assassinés et 16 autres vont être pris en otage. La France est en pleine élection présidentielle et l’opération gène les deux principaux candidats. Ordre sera donné de libérer les otages. Le GIGN lance l’opération Victor et tue 19 indépendantistes dans des conditions que le gouvernement reconnaitra, «contraire au devoir militaire ». L’accord de Matignon signé à Nouméa, la capitale, entre les indépendantistes et le gouvernement français en août suivant, mettra fin temporairement aux hostilités.

 

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L’épisode va profondément marquer les deux communautés. Lorsque sort en 2011 le film de Mathieu Kassovitz, « L’ordre et la morale » sur ces journées tragiques, le seul distributeur de Nouvelle –Calédonie, Douglas Hickson, patron de CinéCity, décide de l’interdire de diffusion sur l’ile. L’acteur et réalisateur est accusé d’avoir une vision manichéenne de ces épisodes sanglants de l’histoire néo-calédonienne, susceptible d’attiser les « rancœurs et d’ «affaiblir les forces du consensus ». Une censure qui sera d’ailleurs peu commentée dans la presse métropolitaine.  Seul état fédéral de la république, kanaks et caldoches se partagent le pouvoir. Avec le Nord pour le premier, le sud pour le second. Fondé en juillet 1977, le Rassemblement pour la Calédonie dans la France est dirigé par la dynastie Lafleur. Jacques (1932-2010), inamovible président de la province sud de 1989 à 2004, chef du camp anti-indépendantiste est un caldoche de souche. Son successeur, un autre poids-lourd de la vie politique caldoche, Philippe Gomès est venu d’Algérie française. Ce pied-noir, aujourd’hui proche du mouvement La République En Marche, va diriger cette même province puis le gouvernement mixte de Nouvelle-Calédonie de 2009 à 2011. Proches de l’ancien RPR de Jacques Chirac, les caldoches sont toutefois très divisés politiquement mais unis face aux indépendantistes dans le référendum à venir et tiennent fermement les mannes de l’économie locale entre leurs mains.

«François, nous voulons rester français !».  10 000 néo-calédoniens se sont rassemblés sous ce slogan pour accueillir le président Hollande en 2014, alors en visite sur l’archipel. Comme 26 ans auparavant, ils ont sorti les drapeaux tricolores, battus le pavé au rythme de la musique country, mis des autocollants sur le cœur. « Restons français ». Leur message ne laisse pas de place aux doutes. Mais n’est pas général de Gaulle qui veut et la visite du président François Hollande sera un désastre que souhaitera éviter son successeur Emmanuel Macron lorsqu’il débarque à son tour en mai 2017. Célébrant ces« kanak, caldoches, zoreilles, polynésiens, tonkinois, javanais, japonais, et tous les autres, qui ensemble ont construit la Calédonie d’aujourd’hui» déclare t-il afin d’apaiser les tensions qui sont vives sur l’archipel, il va  multiplier les séquences mémorielles qui vont finir par irriter les caldoches qui se lassent de cet énième sketch macronien. Comme les pieds noirs en 1962, les Caldoches doivent-ils craindre de subir le même sort dans quelques jours ? Si les accords de Matignon confèrent de facto une nationalité à ces descendants des premiers colons qui cultivent un patois difficile à saisir si on n’est pas un broussard du coin, les sondages s’assemblent et se ressemblent. Tant et si bien que la campagne des partis en présence n’a même pas été médiatisé en France alors que le scrutin est d’une importance économique forte pour la république. « L’État injecte chaque année quelque 1,25 milliard d’euros dans l’économie locale. Ses diverses contributions représentent 13 % du PIB du territoire, soit beaucoup plus que le nickel, sa principale ressource (4 %) » peut-on lire dans une édition du magazine Jeune Afrique qui analysait l’échec prévisible des indépendantistes pour ce scrutin.

Comme les pieds noirs en 1962, les Caldoches doivent-ils craindre de subir le même sort dans quelques jours ?

En effet, plus de 60% de néo-calédoniens devraient voter en faveur du maintien de l’île contre à peine 30% pour l’indépendance. La perspective de perdre les acquis sociaux de la métropole devrait suffire pour convaincre une partie des électeurs de ne pas suivre les consignes de votes des indépendantistes (Union calédonienne, Union nationale pour l’indépendance ou Parti de libération kanak) qui dénoncent le système colonial en vigueur dans le « Caillou », entouré de superbes lagons turquoises. D’ailleurs, en cas de victoire inattendue, les caldoches préviennent à l’image de Ghislain Santacroce qui déclarait en mai dernier sur BFM TV : « ils m’ont expulsé une première fois. Si cela recommence, cela ne se passera pas de la même manière ». Afin de prévenir tous risques d’embrasements, le premier ministre Edouard Philippe a d’ores et déjà annoncé sa venue sur l’île au lendemain du scrutin. « Je ne prendrai pas parti dans ce référendum qui vient, pas pour me soustraire à une responsabilité, mais parce que ce n’est justement pas ma responsabilité» avait déclaré le président Emmanuel Macron au cours de sa visite. Avant de rajouter de manière très paternaliste : « ce que je veux vous dire du fond du cœur […], c’est que la France ne serait pas la même sans la Nouvelle-Calédonie car la Nouvelle-Calédonie n’a jamais manqué à la France. Dans les heures les plus difficiles de notre histoire, elle était là ». Difficile de ne pas voir de quel côté penche la balance de l’Elysée qui serait bien malheureux de voir un des confettis restant de son empire, tomber dans l’escarcelle d’une Chine déjà tapie dans l’ombre. 

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