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Réponse à Jean-Patrick Domecq après sa tribune pourrie dans Le Monde

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Publié le

6 mai 2019

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Le 18 avril dernier, Jean-Patrick Domecq, dont on parla beaucoup en 1984 (la plupart de nos lecteurs n’étaient pas nés), se fendait d’une tribune dans Le Monde pour condamner la remise de la Légion d’honneur à Michel Houellebecq.

 

On s’étonne dans un premier temps de l’étonnement de Jean-Pat. Au XXe et au XXIe siècle, le hochet inventé par Napoléon récompense à peu près n’importe qui (Mussolini passe encore, mais Ali Bongo, Sheila, Mimi Mathy, le bouddhiste New Age Matthieu Ricard, Maylis de Kerangal, Jean d’Ormesson, toute la clique des Bleus…), on ne peut pas dire que la sélection soit spécialement drastique. « Sauf à considérer qu’une récompense républicaine n’a plus de sens, commence Jean-Patrick, on ne peut laisser sans discussion l’octroi de la Légion d’honneur à Michel Houellebecq. »

 

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On ne savait pas Napoléon Ier républicain, ni sa récompense, mais Jean-Patrick est du genre à annexer la Légion d’honneur à la République et la République à sa gauche à lui qu’il imagine seule religion respectable. La première critique de Jean-Pat concerne l’hommage de Macron à Jean d’Ormesson, qu’il estime, à juste titre, disproportionné. Certes, Macron est à Bonaparte ce que Jean d’O était à Chateaubriand, et le premier, en flattant le délire du second, s’est pathétiquement conforté dans le sien. Mais Domecq reprend ensuite un argument de Markowicz qui reproche au cadavre de d’Ormesson d’avoir rassemblé « la vieille droite », et il voit, Jean-Patrick, dans ce lieu commun, un exemple de l’esprit de finesse qu’évoquait Pascal.

Pascal aurait juste jugé d’Ormesson médiocre et sans âme ; estimé Markowicz attendu et dégénéré ; et Domecq une saloperie d’athée juste bon à rôtir en enfer avec tous les demi-habiles qui le pavent de bonnes intentions. Mais passons… « Tout un lectorat qui n’a pas de leçon d’ouverture d’esprit à recevoir a fort bien perçu que chaque narrateur des romans de Houellebecq exprime son dégoût de l’émancipation. » L’ouverture d’esprit, il y a des lectorats qui sont suffisamment diplômés sur ce point pour pouvoir anathémiser qui ils veulent. Voilà un argument imparable.

 

© L’Incorrect

 

Et ce lectorat ouvert aura donc bien perçu à quel point Houellebecq est dégoûté par ce que Jean-Pat appelle « l’émancipation », comprenez: l’écrivain ose critiquer une batterie de valeurs soixante-huitardes qui ont balisé notre espace moral, il se permet de tirer sur les idoles de l’époque (qui sont les doudous de Jean-Pat), le métier de n’importe quel écrivain conséquent, et cela est jugé impardonnable par le commissaire politique Domecq qui sort illico son tampon « social-traître ». Houellebecq serait coupable de faire des romans « porte-voix d’une idéologie… nauséabonde ».

Oui, il l’a dit. Jean-Pat a bientôt 70 ans, qui s’affirme écrivain et qui vient de lâcher l’épithète la plus galvaudée du temps, la plus impraticable par quiconque a un rien d’esprit ou juste dix centimètres de recul sur les événements. De là à comparer Houellebecq au Rebatet des Décombres et de dévaler les lieux communs qui s’ensuivent, Domecq ne s’en prive pas, il est en schuss, genoux pliés, tête baissée, droit devant – papy bluffe tout le monde sur la piste noire. Qu’il y ait chez Houellebecq du « sociologisme », oui, certes, mais il y a surtout chez l’écrivain une ironie froide et dévastatrice.

 

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C’est cette ironie, qui fait si cruellement défaut au pauvre Jean-Patrick, qui contamine la cérémonie de remise de Légion d’honneur, atteint Macron lui-même, subvertit toutes les mises en scène du pouvoir, ridiculise un président un peu contraint d’honorer l’écrivain français le plus célèbre au monde, un président dont la fatuité-même est minée par le dispositif houellebecquien.

La Légion d’honneur ne vaut plus rien, Jean-Pat, et Houellebecq le sait très bien, mais en l’acceptant, Houellebecq mine bien davantage le pouvoir officiel que ceux ou celles qui la refusent. C’est lui qui domine le registre symbolique. Pas comme un nihiliste, mais comme un révélateur du néant des autres. Celui du consommateur de base, celui de Jean-Patrick, celui d’Emmanuel. Et c’est ainsi que Michel est grand.

 

Romaric Sangars

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