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Antoine Volodine : sublime cauchemar

C’est dans un futur délabré et insituable, au sein d’un asile en ruines, que Breton, schizophrène persécuté par la police, voit surgir depuis l’espace noir des filles armées venues venger Monroe. Exécuté par le Parti, celui-ci, depuis sa mort, prépare la purge des traîtres et la reprise en main de l’appareil politique. Dans ce monde concentrationnaire où règne une ambiguïté permanente, l’administration fonctionne pourtant toujours, presque à vide, pour un monde d’insanes et de déjà-morts qui répètent comme des mantras des slogans politiques désuets dont l’optimisme et le volontarisme jurent avec le panorama désastreux. Il pleut en permanence, les lampes diffusent une lumière hésitante et faible, les minuteries renvoient les passants aux ténèbres, les rails du tramway sont déserts et des câbles pendent sans plus rien transmettre : cette atmosphère rappelant Eraserhead de Lynch donne lieu à une profusion d’images bizarres et saisissantes dignes de toiles de Bosch qui illustreraient un enfer récent.

Une obsession toujours neuve

Plus beckettien que jamais, Volodine nous livre un « En attendant Monroe » aux ressorts théâtraux qui lui permettent de renouveler l’art du dialogue. Breton, schizophrène, se dédouble, se conseille, se critique, se conforte ; les morts usent d’un langage grossier et ne répondent aux questions qu’on leur pose qu’en passant par un tiers dans un état semblable ; les arbres font de bons confidents durant l’errance, fût-ce à l’état de porte ; les facultés télépathiques de certains personnages rompent l’équilibre normal de l’échange. L’humour du désastre caractéristique du post-exotisme gagne ainsi de nouvelles modulations caustiques et c’est l’un des miracles de l’art volodinien que de déployer sans cesse des ressources formelles inédites pour ruminer le même matériau obsessionnel et sombre. Le rapport entre différence et répétition s’y joue dans une formule exaspérée. [...]

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Sélectron : les plus belles femmes de Bébel

12 - Marie Laforêt dans Les Morfalous (1984)


11 – Marlène Jobert dans Les Mariés de L’An II (1971)


10 – Jean Seberg dans À bout de souffle ( 1960)


9 - Marie France Pisier dans L’As des as (1982)

Lire aussi : Bébel, le bonheur d’être Français

8 - Gina Lollobrigida dans La Mer à boire (1963)


7 – Ursula Andress dans Les Tribulations d'un Chinois en Chine (1965) [...]

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Le cinéma français est-il de gauche ?

En 2019, plus de 180 films d’initiative française agréés par le CNC (Centre National du Cinéma) ont inondé les salles obscures. À de rares exceptions près, le cinéma français est médiocre, répétitif, sans audace ni ambition, il n’inspire plus personne et la question même de savoir ce qu’est le cinéma l’émoustille autant qu’un rasoir dans les mains d’un taliban... Mais il n’est pas forcément de gauche, quoiqu’il semble pris en otage par cette idéologie.

Lire aussi : Bébel, le bonheur d’être Français

Cinématographiquement, il l’a été, un peu, avant Mitterrand, quand le pouvoir était de droite et qu’on appelait ça le « cinéma engagé » : Yves Boisset chargeait les flics dans Un Condé, rejouait l’affaire Ben Barka dans L’Attentat et « dénonçait » le racisme du Français moyen dans Dupont Lajoie. Costa-Gavras tapait sur la CIA (État de siège), Mocky moquait les cathos dans Un Drôle de paroissien et prêchait la révolte dans Solo. Ces cinéastes voyaient le monde en noir et blanc, mais on y croisait Piccoli, Montand, Bourvil, Ventura et Crémer. Boisset savait raconter une histoire, Costa-Gavras maîtrisait les tensions dramatiques et Mocky pouvait être drôle. En 1981, la gauche récupère les clés du pays et Jack Lang le carnet de chèque de l’État, les rebelles s’embourgeoisent, on finance les copains, on pétitionne et on s’indigne à tour de bras depuis le VIe arrondissement. L’imbécile Goupil s’imagine cinéaste, Guédiguian tente de croire que la gauche s’intéresse encore aux classes populaires et le film social devient dès la décennie suivante le genre préféré de la profession. Les bourgeois « fils de », comme Kassovitz et Cassel, s’engagent pour la cité, Cannes s’embrase, le nouveau siècle n’est pas loin et son cortège de navets.

Des Bobos subventionnés ?

Ce préjugé n’est pas totalement faux. Qui paye une place pour un film de Philippe Garrel ? Le réalisateur français sort un film tous les deux ans depuis 1968, que personne ne va voir. Son fils Louis, bon acteur, se met à la réalisation : La Croisade, son nouveau film présenté à Cannes cette année met en scène des bobos en prise avec leur gamin prêt à tout pour sauver la planète. C’est beau, ça coûte pas cher et ça rapporte des subventions, puisque les belles causes suffisent. Sinon comment expliquer l’attribution de cette aide à Titane en dépit d’un scénario aussi débile que confus ? [...]

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Matthieu Falcone : collisions en France périphérique

Allo ? Matthieu ?

– Oui !

Je n’arrivais pas te joindre... Déjà à l’apéro ?

-Non, non, j’étais en « communication » comme on dit

Il faudrait qu’on présente ton bouquin aux lecteurs de L’Inco...

- Allons-y !

Excellente, ta scène d’ouverture, avec ce slam citoyen imposé aux paysans qu’on empêche de picoler tranquille ! En fait, aujourd’hui, la propagande est partout, c’est un peu ce que tu dis : dans le moindre sketch et jusqu’au thème du carnaval annuel au fin fond de nos campagnes.

– Toute expression culturelle officielle devient un vecteur de propagande, oui. Cela étant, il reste deux types de campagnes en France. Celle qui n’a toujours pas bougé depuis un siècle et où la vie est particulièrement rude, et celle où des saltimbanques fumeurs de haschich récemment débarqués assurent (souvent à leur corps défendant) la propagande officielle. On a aussi des citadins qui viennent y fabriquer leur petit Marais local. Avec l’épisode Covid, c’est un mouvement qui ne cesse de croître.

Je crois que c’est l’hypocrisie qui m’énerve. On ne devient pas paysan en trois mois parce qu’on a acheté un lopin de terre

Tu déploies une belle galerie de caractères aussi divers que bien frappés, mais dis-moi : c’est dans le village où tu as vécu une dizaine d’années que tu as puisé l’inspiration ?

– Pour partie oui, j’ai réalisé des synthèses des personnes que j’ai pu y côtoyer, parfois en accentuant le trait bien sûr, d’autres fois en l’atténuant. Robert, le narrateur, en revanche, est plutôt une projection de moi-même qui ferait preuve de davantage de compassion que ce dont je suis d’ordinaire capable. Il observe et tente de trier le bon grain de l’ivraie, notamment dans ce qu’il y a de recevable dans les critiques contemporaines.[...]

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Boîte noire : notre critique
Technicien au BEA, Mathieu Vasseur est propulsé enquêteur en chef sur une catastrophe aérienne sans précédent. L’homme est quelque peu antipathique et le point de vue n’est que le sien, unique, plaçant ainsi le spectateur dans une ambiance cernée de doutes. D’autant plus que l’analyse minutieuse des boîtes noires va pousser Mathieu à mener en secret sa propre investigation… [...]
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Bébel, le bonheur d’être Français

Jean-Paul Belmondo, né le 9 avril 1933 à Neuilly, est le fils d’un sculpteur de renom et d’une artiste peintre. L’art coule dans ses veines, mais s’il débute sur des planches face au public à l’adolescence, ce n’est pas au théâtre mais sur un ring : « Moi, j’aime la boxe parce qu’elle me faisait rêver adolescent », expliquera-t-il. Nous sommes le 21 septembre 1948, et malgré l’heure tardive, près d’une heure du matin, la France se tient éveillée. Comme des millions de Français, la famille Belmondo est réunie autour d’un transistor d’où résonnent les voix de Pierre Crenesse et de Georges Carpentier. L’appartement familial se situe rue Victor Considérant (Paris 14) et le jeune Belmondo ne sait pas encore qu’à quelques encablures de là, dans la rue Campagne Première, Jean-Luc Godard l’immortalisera une première fois douze ans plus tard. Mais ce soir de fin d’été, le cinéma ne l’intéresse guère, son rêve s’appelle Marcel Cerdan.…

Louis-Henri de La Rochefoucauld : le roi n’est pas mort, vive le roi !

Après La Révolution française en 2013, voici que vous écrivez sur Louis XVI. Est-ce un cycle ?

Il n’y a pas d’un côté l’école Modiano (écrire toujours le même livre) et de l’autre la méthode Bowie (se réinventer à chaque album). La vérité est entre les deux : on va sur de nouveaux territoires tout en repassant plus ou moins malgré soi par les mêmes cases.

Qu’est-ce qui vous plaît chez Louis XVI, pour que vous l’ayez ressuscité lui, plutôt qu’un autre ?

Je suis fasciné par son exécution le 21 janvier 1793 : une des scènes les plus extraordinaires de l’histoire de France. Il est injustement décrié, moqué, alors que sa personnalité est attachante : un homme doux dingue et rêveur, inadapté, à côté de sa couronne, complètement ailleurs. Après lui il y a eu la Restauration (un flop) et la Monarchie de Juillet (un bide). Pour moi c’est avec lui que s’achève la monarchie française. J’ajoute que sans sa mort, Napoléon n’aurait pas eu de destin. En cette année 2021 où tout le monde ne parle que de Napoléon, il était temps de revenir à Louis XVI.

« J’aimais Louis XVI pour des raisons familiales et poétiques plus que politiques », écrivez-vous. Est-ce votre version personnelle du culte mélancolique du passé ?

Le passéisme est une poupée russe : en notre époque étriquée, on regrette le Grand Siècle mais, sous Louis XIV, un type comme Saint-Simon rêvait de Louis XIII ; et sous Louis XIII, il devait se trouver plus d’un nostalgique du règne d’Henri IV... Plus je vieillis, plus j’aime le XVIIe et le XVIIIe siècles, notamment pour cet art de la conversation qui a peut-être culminé dans les années 1780 avec cette fameuse « douceur de vivre » vantée par Talleyrand (ce génie). Je me fous comme de ma première chemise à jabot de l’abolition des privilèges, mais il est vrai que mon histoire familiale (quatorze victimes La Rochefoucauld sous la Révolution) ne peut que contribuer à me faire voir l’Ancien Régime comme un paradis perdu.

Lire aussi : Éditorial culture de septembre : Rendez-vous sur l’embarcadère

Le grand personnage ressuscité est une ficelle inusable. Aviez-vous des exemples en tête ?

Je connais Le Retour du Général de Duteurtre mais ne l’ai pas lu – et je n’ai pas voulu le lire pour que ça ne me bride pas. J’avais en tête deux lectures lointaines (et fantasques) : Le Fantôme de Canterville de Wilde et Le Napoléon de Nothing Hill de Chesterton. Et j’ajoute une troisième influence essentielle : Fouquet et le Soleil offusqué de Morand. J’admire la manière avec laquelle Morand arrive dans ce livre à écrire dans un style à la fois XVIIe et moderne. C’étaient mes modèles, et je m’aperçois que je ne réponds pas à votre question... [...]

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Les Sparks au panthéon pop
Ils étaient apparus au printemps 1974 à l‘émission-institution britannique « Top of the Pops », introduits par un synthé obsédant : tout de suite la voix de haute-contre de Russel Maël et son physique de minet viscontien, et surtout les cheveux gominés, la moustache « chaplinesque » et l’immobilité kraftwerkienne, derrière son clavier, de son grand frère Ron, avaient fait sensation. Comme leur chanson « This Town ain’t big enough for both of us », tube du troisième type avec tir de révolver, guitare hard, synthé baroque, rythme affolé, au service d’une obscure histoire de cannibales, de bombardier et d’amours zoomorphes. Provocation « son et image » totalement réussie, la chanson se classant n° 2 au Royaume-Uni, et honorablement dans le reste de l’Europe. Personne en France, sauf Patrick Eudeline, ne savait que ces deux frères, si anglo-européens par leur musique, commerciale mais subtile, leur dégaine de dandies bizarres et leurs textes tongue in cheek, étaient nés californiens, et avaient sorti, en 1972/73, deux délectables albums pas prophètes dans leur pays, avant de demander l’asile à la patrie des Beatles et de Roxy Music. [...]
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