Sorti en salle mercredi 25 janvier, le film Vaincre ou mourir a déchaîné une armada de plumes. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne s’agit pas de critiques constructives donnant une idée réelle du film, mais bien des attaques portant sur la sensibilité politique des producteurs et le choix de l’histoire contée.
Ces attaques, un journal les concentre toutes. Ce quotidien qui, coiffé de la tiare morale, définit le bien et le mal à ses fidèles en mal de paroles rédemptrices, c’est Libération.
Quand Libé applique la loi des suspects
Le (long) article de Libération commence par un éditorial qui dénonce le fait – horreur ! – que le film soit réalisé par des gens de droite. L’auteur y révèle au monde les indices laissant à penser qu’il s’agit d’une « offensive conservatrice », évidemment très critiquable. Étrange pour des gramscistes de s’offusquer de l’existence du combat culturel… On remercie donc l’excellent rédacteur de cet édito, qui a su décrypter avec sagacité, qu’effectivement, l’industrie cinématographique est un vecteur d’idées et que la droite comme la gauche peuvent s’en servir comme moyen d’expression. [...]
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Les fleuristes en bas de mon immeuble ont de jolies fleurs et savent composer des bouquets. Après avoir choisi les fleurs et demandé leurs noms (que j’oublie aussitôt), je les regarde tourner un faisceau végétal subtilement étagé, arrachant ici ou là une tige en trop et ajoutant avec parcimonie quelques feuillages pour équilibrer le tout. Puis, dernièrement, après avoir roulé avec maîtrise le bouquet dans deux feuilles décalées qu’elles arrachent d’un geste sûr des gigantesques rouleaux accrochés au mur, elles ajoutent une page jaunie arrachée à un vieux livre, choisissant celles qui sont illustrées. [...]
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CE QUE FAISAIT MA GRAND-MÈRE À MOITIÉ NUE SUR LE BUREAU DU GÉNÉRAL,CHRISTOPHE DONNER, Grasset, 316 p., 22 €
Derrière ce titre improbable se cache l’un des romans les plus intéressants de Christophe Donner, en raison sans doute du potentiel romanesque du personnage sur lequel il se penche : Léon Daudet, le « gros Léon » excessif et tonitruant qui compta tant dans le paysage littéraire et politique des années 1920. Donner l’étudie au moment de la mort de son fils Philippe, en 1923, tissant le récit qu’il leur consacre avec un autre sur les rapports de Gaulle/Pétain, et un troisième sur ses propres aïeux, Henri Gosset et son fils Jean. Ces variations sur le thème du rapport père/ fils (biologique ou spirituel) sont serties dans un récit-cadre où l’auteur parle de lui au quotidien, son appartement, ses tractations avec un geek millionnaire qui lui achète les fichiers de son livre au fur et à mesure... On peut trouver que les coutures du texte sont un peu trop apparentes, mais on est cueilli forcément par le coup final qui éclaire rétrospectivement tout le livre et lui confère son unité. Brillant. Jérôme Malbert
ENVOÛTANT
LA MÉMOIRE DE NOS RÊVES, QUENTIN CHARRIER, Grasset, 320 p., 22€
L’annonce de la mort de Franck, à la rue, rassemble Clarisse et Simon, deux trentenaires déçus et anciens membres du même triangle amoureux, ainsi que les souvenirs de leurs trois existences au moment de l’enterrement et du retour au pays natal. Les trois se sont liés avant ou durant l’adolescence, Simon, plutôt privilégié, à qui tout est promis ; Franck, relayant son frère dans le deal après sa mort, pour entretenir sa mère, comme condamné dès l’origine à la violence et au gâchis ; et Clarisse, enfin, qui tente de s’extraire d’un milieu précaire et douloureux par les études, maîtresse furtive du second sans pouvoir se remettre du premier, lequel aura tenté en vain de faire sa vie hors d’elle. Construit d’une manière admirable et décantant l’atmosphère d’une épaisse mélancolie, ce premier roman étonne par sa maîtrise narrative et sa saveur douce-amère. Quentin Charrier y agence peu à peu les pièces éparses des souvenirs en dressant la toile de fond d’une jeunesse à la fin des années 90, une jeunesse qui ne passe pas, des sentiments que le monde adulte ne réussit pas à affadir, des destins qui s’entrechoquent, se ratent, s’éclairent, se perdent – et quoi qu’il en soit nous touchent. Romaric Sangars
GROTESQUE
DICTIONNAIRE AMOUREUX DE L’ÉLOQUENCE,MATHILDE LEVESQUE, Plon, 500 p., 25 €
Il y a de tout dans la collection « Dictionnaire amoureux », y compris des perles comme ce Dictionnaire amoureux de l’éloquence de Mathilde Levesque, prof de lettres tendance Télérama. On trouve une entrée « Annie Ernaux » (dont l’éloquence est connue), une entrée « avocat.e » et une entrée « Momo », l’un de ses élèves devenu champion des concours d’éloquence. Les références ? Taubira, Obama, Joy Sorman, Judith Butler, Hervé Le Bras. On n’apprend rien sur l’éloquence, mais beaucoup sur Mathilde : elle n’aime pas le mot « racaille », elle a pleuré en classe le lendemain du massacre de Charlie Hebdo par peur que ses élèves, « majoritairement musulmans, fassent médiatiquement les frais des dérives radicales et assassines de leur religion de paix », elle est « une fervente admiratrice de tous les travaux de Pierre Bourdieu » (voir « Bourdieu, Pierre »). Au chapitre de l’humour (mais tout cela n’en relève-t-il pas déjà ?), il y a une entrée « Tonton facho », le vieux con « dont l’intervention verbale a le don de pourrir n’importe quel dîner ». Désopilant humour de salle des profs. Comme on voit, ça cause dans le poste. JM[...]
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Sophie se remémore les vacances d’été passées avec son père vingt ans auparavant. Accentuant le pénible tropisme mémoriel qui s’attache ces temps-ci aux réalisatrices britanniques (voir The Souvenir I et II de Joanna Hogg), Aftersun évide le dolorisme de la perte dans une pseudo-réflexion sur le médium. On ne cesse de revenir sur une vidéo du père défunt présentée à toutes les vitesses de défilement, avance ou arrière rapide. Charlotte Wells semble découvrir avec stupeur – choupette ! – que l’image enregistrée fige dans un présent éternel ce qui n’est pas appelé à durer. [...]
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Pierre, ingénieur se rend dans les Alpes pour son travail. Irrésistiblement attiré par les montagnes, il s’installe un bivouac en altitude, fait la rencontre de Léa et découvre de mystérieuses lueurs. Dans sa calamiteuse tentative de Spielberg à la française, Thomas Salvador a oublié la principale qualité de son modèle, le sens du rythme, qui […]
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Après sa catastrophique Une jeune Femme (pourtant Caméra d’or au Festival de Cannes 2017), soit du mauvais Cassavettes revu par des néoféministes constipées, on n’aurait pas misé un kopeck sur Léonor Serraille. Elle remonte pourtant la pente avec Un petit frère qui suit sur une vingtaine d’années une famille sénégalaise expatriée en France. Cette chronique décente joue un peu trop d’ellipses qui rejettent hors-champ tout ce qui pourrait asseoir clairement les personnages, rendus plus fuyants qu’intrigants. [...]
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Chaque festival international se doit aujourd’hui d’honorer sur la plus haute marche une réalisatrice, si possible peu expérimentée, sous peine de sexisme larvé. Et si l’inclusivité exclut souvent le talent (Titane), il y a des exceptions. Nos soleils – Ours d’or 2022 à Berlin – fait mentir la crainte au premier abord d’un conte gentillet à base naturaliste façon Alice Rohrwacher. Cette chronique d’une expropriation agricole en Catalogne sait prendre le temps et ne forcer jamais la main. [...]
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Précédé d’une rumeur publique élogieuse, de prix dans les festivals et d’un gymkhana d’avant-premières pour en roder le narratif, Retour à Séoul laisse comme deux ronds de flan. On se doutait que le résultat serait inversement proportionnel aux forces promotionnelles, mais quand même. Le film de Davy Chou avait peut-être le principal, un sujet : la quête des origines d’une jeune française d’origine coréenne débarquée par hasard à Séoul. Ce sujet est malheureusement pris sur son versant le plus anecdotique, la recherche des parents vite résolue pour le père, retardée pour la mère. Laissée seule dans le centre d’adoption où elle tente d’obtenir des réponses, Freddie (Park Ji-min) feuillette des papiers et découvre que la guerre de Corée a entraîné l’abandon de dizaines de milliers d’enfants promis à une vie meilleure en Occident.
Le souffle de l’histoire qui parcourt un instant l’écran se révèle un simple courant d’air. Chou ne creusera pas cette piste – qui nécessite, il est vrai, une ampleur de vue dont il ne dispose pas. À la place, on aura la tarte à la crème d’une émancipation, hoquetante et feuilletonnée – voilà la maigre originalité, tout comme la personnalité de Freddie franchement déplaisante, quelque part entre le piteux Orpheline de Arnaud des Pallières ou une héroïne de Mike Leigh, mais privée de l’inscription dans un contexte social que son inadaptabilité mettrait à nu. On ne met rien à nu dans Retour à Séoul. [...]
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