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Les feuilles mortes sont-elles de droite ?

Je contemplais l’autre jour une carte de France des plus belles couleurs d’automne, incomplète mais aimable. On pouvait rêver aux aiguilles jaunes des mélèzes du Mercantour ou au bel orange des châtaigniers pyrénéens. Mon automne s’annonçait feuillu et déjà je songeais à des bouquets sans fleurs et à des feuilles égarées dans les livres, petites banquises du souvenir dérivant dans le futur où surgiraient alors de lointains automnes. 

Mais voilà que BFM me révèle l’atroce vérité : les arbres perdent leurs feuilles et c’est un « véritable danger » pour les cyclistes, ces gens vertueux qui se dévouent sans compter pour sauver la planète. Comme « véritable danger » risquait de ne pas être bien compris, le journaliste enfonçait le clou : « Les feuilles mortes sont un calvaire pour les cyclistes en Ile-de-France ». Un calvaire, rien de moins. Ces malheureux vivent un chemin de croix quotidien dès octobre. J’avais déjà lu il y a quelques années un prospectus de la SNCF qui expliquait que les feuilles mortes accumulées entravaient la circulation des trains plus sûrement qu’une grève de cheminots, une absence de conducteurs ou la décision de fermer des lignes. [...]

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Partout, les saints : sainte Marie-Madeleine

On croit connaître Marie-Madeleine : elle échappe à toutes les tentatives. Est-elle Marie la Magdaléenne, venue de la ville de Magdala, ou Marie « la Tour » (migdal en hébreu), la Grande, l’Intangible ? On sait que Jésus (selon saint Luc) la délivra de sept démons. Est-elle pour autant confondue avec Marie de Béthanie (sœur de Lazare), avec la prostituée repentie, présente chez Simon le Pharisien, et avec la femme qui, chez Simon le Lépreux, oignit Jésus d’un parfum coûteux et lui essuya les pieds avec ses cheveux ? La tradition de l’Église n’est pas univoque à ce sujet. 

Ce que l’on sait, c’est que Marie-Madeleine était au pied de la Croix avec la Sainte Vierge et deux autres femmes, qu’elle fut le premier témoin de la Résurrection du Christ, et qu’une légende populaire la fait accoster, avec Marie Salomé et Marie, mère de Jacques, sur nos côtes méditerranéennes, aux Saintes-Maries-de-la-Mer, justement. Selon cette version, elle serait enterrée à Saint-Maximin, au pied de la Sainte-Baume (et aurait bien de la chance).

Lire aussi : Partout, les saints : saint Michel Archange

La tradition populaire en a fait l’idéal de la pécheresse repentie, grande amoureuse, qui avait littéralement le diable au corps. Éclairée par la charité, elle utilisa sa nature de feu pour faire le bien, avec le même enthousiasme et la même abnégation. Un tableau de La Tour la représente, dans une attitude à la fois chaste et séduisante, à la lumière – évidemment – d’une bougie. [...]

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Les fausses coudières

Depuis quelques années, en effet, on peut acheter, un peu partout, des vêtements neufs munis de coudières, qui servent habituellement à cacher un trou dans un vieux vêtement. Cette passion du « faux vieux », comparable aux chaussures pré-patinées, aux jeans prétroués ou aux meubles pré-abîmés, est celle d’une société du toc, qui n’a pas le temps d’attendre l’usure normale des choses, et frappe en priorité ceux qui veulent se rendre intéressants. Les coudières de couleur n’en sont que le signe le plus visible : le paroxysme est atteint avec l’achat de chemises – voire de marinières – à coudières.

Entre les coudières et l’uniforme bleu marine et blanc, interchangeable, du monde politique, il y a sans doute une place pour une expression personnelle, irréfutable parce que discrète

L’histoire de l’élégance française est celle d’une double tradition?: celle de l’Ancien Régime, qui met en valeur une certaine magnificence frivole, et sert à afficher ses moyens autant que son originalité ; celle de l’époque contemporaine, liée à l’austérité bourgeoise de la révolution industrielle, et qui envisage l’habillement comme une succession d’uniformes adaptés aux circonstances, uniformes dans lesquels seules quelques variations discrètes distinguent les individus. Les coudières, qui laissent entendre la (fausse) pauvreté des habits rapiécés, et qui prétendent montrer qu’on fait le malin d’une manière voyante, vont à l’encontre de tout cela. [...]

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Casse-Pipe : le tour de main des artisans pipiers

Au départ, il y a les Indiens. Le 12 octobre 1492, Christophe Colomb, le premier des conquistadors, jette l’ancre dans les Bahamas, face à l’île Guanahani. Quelques jours plus tard, il voit les premiers indigènes fumant des feuilles de tabac enroulées. C’est l’aube d’une grande passion qui va gagner la planète. 

Certes, les débuts sont poussifs. De retour en Espagne, un des matelots de Christophe Colomb, a la mauvaise idée de fumer à tout-va. Soufflant de la fumée par la bouche et le nez, les passants sont effrayés et pensent qu’il est possédé par le diable. Le tribunal de l’Inquisition l’envoie en prison pour dix ans. Ces mésaventures ne découragent pas les addicts. Progressivement le tabac s’introduit dans les classes supérieures. Il est apprécié pour l’esthétisme de ses grandes feuilles et ses propriétés médicinales. Étourdi par la fumée, le patient oublie sa douleur !


L’introduction du tabac en France fit de Saint-Claude la capitale mondiale de la pipe en bruyère

Les XVIIe et XVIIIe siècles constituent l’apogée de la pipe. À cette époque, elle n’est pas en bois mais en terre cuite. Les pipes en argile sont produites dans de vastes fours. 1 000 à 5 000 unités sont cuites en même temps. Le fumeur achète une douzaine d’entre elles à la fois, car la pipe en argile est fragile.

Au XIXe, la pipe actuelle en bruyère apparaît. Poussant sur le pourtour de la Méditerranée, la bruyère est un arbuste aux racines profondes qui présentent des nœuds compacts. Secs et légers, les nœuds sont taillés pour constituer des pipes robustes. Les tourneurs de Saint-Claude s’emparent de ce nouveau bois. Lieu de pèlerinage, ce bourg jurassien était connu jusqu’alors pour sa production d’objets religieux en bois. L’introduction du tabac en France fit de Saint-Claude la capitale mondiale de la pipe en bruyère. [...]

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Ode à la baguette

De l’eau, de la levure, de la farine, du sel. Il ne faut rien de plus, mais rien de moins pour obtenir ce sommet absolu de l’art et de la gastronomie, j’ai nommé la baguette de pain à la française. 250 gr de perfection et de bonheur indicible. Osons-le dire : un avant-goût du paradis.

Ou plutôt si, il faut quelque chose en plus. Des siècles de patience et d’amour, de savoir-faire et d’art de vivre. Cela s’appelle la civilisation.

L’UNESCO vient enfin de faire accéder la baguette à cette consécration universelle qu’est l’inscription au patrimoine immatériel de l’humanité, où elle rejoint, pêle-mêle, la construction et l’utilisation des pirogues monoxyles expansées dans la région de Soomaa en Estonie et les danses croates de la Saint-Tryphon. Il était temps.

À l’annonce de cette belle nouvelle, une inquiétude nous envahit cependant. Le classement par l’UNESCO n’est-il pas une forme de sacralisation des chefs-d’œuvre en péril ? À l’image des monuments historiques, seul ce qui subit les outrages du temps et est menacé de disparition mérite d’être épinglé au panthéon des gloires universelles de l’humanité, avant de n’être plus qu’un lointain souvenir qu’on évoque d’une voix tremblante avec un soupir.

À l’image des monuments historiques, seul ce qui subit les outrages du temps et est menacé de disparition mérite d’être épinglé au panthéon des gloires universelles de l’humanité

Dans les années 1990, la baguette a bien failli disparaître. Un temps pas si lointain, celui de l’enfance du modeste auteur de ses lignes, qui se rappelle quand il fallait parfois faire des kilomètres pour dénicher l’objet rare, une baguette à la croûte dorée et croustillante à souhait, avec une mie délicatement alvéolée, à la couleur écrue tirant légèrement sur le bistre. [...]

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Partout, les saints : saint Michel Archange

Saint patron de la France, des boulangers, des tonneliers et des parachutistes, honoré dans l’ébourifiant mont éponyme, saint Michel représente toutefois un modèle (un tout petit peu) moins humain que les fêtards convertis ou les jeunes filles contemplatives, par exemple. Son nom signifie « Qui est comme Dieu ? », le célèbre « Quis ut Deus ? » qu’il prononça, dit la tradition, en chassant Satan et les anges rebelles hors du paradis. L’Église catholique le fête le 29 septembre, en compagnie de deux autres archanges dont les noms nous sont connus, Gabriel (celui de l’Annonciation) et Raphaël (l’agent secret du Bon Dieu : je vous conseille le récit de son intervention dans le livre de Tobie – qui prend un « e » à la fin et n’est donc pas un chien dans un dessin animé japonais). Nos frères orthodoxes fêtent également les trois archanges le 8 novembre, sous le nom de « fête des Archistratèges de la Milice Céleste, Michel et Gabriel, et des autres Puissances célestes et incorporelles ».

Saint Michel est, de manière générale, celui qui règle les problèmes, le Joe Pesci de Dieu

Saint Michel est, de manière générale, celui qui règle les problèmes, le Joe Pesci de Dieu. En 1884, après une messe, le pape Léon XIII entendit la voix du diable demander à Dieu de lui accorder cent ans pour détruire l’Église catholique – et Dieu acquiesça. Effrayé, le pape composa une prière à saint Michel qui fut longtemps récitée après les offices. À la suite du concile Vatican II dont on ne doit pas prononcer le nom, la prière fut raccourcie. [...]

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Qui a tué le colonel moutarde ?

Connaissez-vous la dernière blague ? Un homme s’énerve à propos de la file d’attente qu’il doit faire pour prendre de l’essence. Il finit par exploser : « Je vais aller à l’Élysée et je vais tuer Macron ». Lorsqu’il revient, les autres dans la file lui demandent : « Alors, as-tu tué Macron ? Non, là-bas la file d’attente est encore plus longue ».

Depuis quelques mois, la France découvre les pénuries. Réveil brutal ! La société de consommation nous avait habitués à l’abondance, pas aux linéaires vides, façon bloc de l’Est. Les queues interminables et les tickets de rationnements appartenaient au passé. Alors face à l’épreuve, hauts les cœurs ! il nous reste l’humour.

La moutarde dijonnaise est composée de graines du Canada, broyées par un ouvrier tchèque dont les patrons Anglo-bataves payent leurs impôts en Irlande

Autre pénurie, autre blague : la disparition de la moutarde de Dijon. Jusqu’à présent, l’esprit cartésien situait la moutarde de Dijon à... Dijon. Nenni, nenni monseigneur, la moutarde dijonnaise est composée de graines du Canada, broyées par un ouvrier tchèque dont les patrons Anglo-bataves payent leurs impôts en Irlande. Si l’appât du gain est triomphant, la mondialisation trouve aujourd’hui ses limites : en juillet 2021, le Canada subit un dôme de chaleur qui provoque la mort de 700 personnes. La destruction des champs de moutarde entraine la chute de la production. Elle passe de 100 000 tonnes à 50 000 tonnes. Dans la capitale mondiale de la moutarde, les industriels s’agitent en tous sens. Pour éviter la pénurie, ils se tournent vers l’Est. La Russie et l’Ukraine sont les deuxième et quatrième producteurs mondiaux de graines de moutarde. Hélas, nos fabricants bourguignons débarquent en pleine dispute conjugale entre Popof et Popova. À l’Est, pas de salut et inutile de se tourner vers les agriculteurs français : la culture de graines de moutarde a presque disparu du pays depuis la Seconde guerre mondiale. [...]

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