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Avortement : souffre et tais-toi !

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Publié le

5 juillet 2021

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Emmanuel Macron a déclaré au magazine Elle : « Je mesure le traumatisme que c’est d’avorter », un « discours culpabilisant » dénoncé par le Planning familial. En réalité, c’est surtout le Planning familial et ses soutiens qui culpabilisent les femmes confrontées aux séquelles post-IVG. Ayant elle-même avorté, Rose Delattre nous raconte comment les « pro-choix » ont tenté d’étouffer sa parole. Entretien.
avortement

Derrière l’étiquette « féministe » et « pro-choix », les pro-IVG nient et discréditent la parole des femmes traumatisées par l’avortement. Ainsi, ils cherchent à soumettre celles qui témoignent, quitte à les harceler jusqu’à ce qu’elles se taisent. Auteur du livre Pardon les enfants, Rose Delattre avait témoigné dans notre dossier de mars – « Avortement, le grand tabou » – sur l’enfer vécu après avoir avorté. Aujourd’hui elle nous raconte comment le Planning familial et les pro-IVG ont méprisé sa détresse, et lui ont dénié le droit d’en témoigner.

En mars, vous nous aviez raconté ce qu’avait été pour vous l’avortement. Pouvez-vous nous rappeler les séquelles post-IVG que vous avez subies ?

À la suite de mon IVG, j’ai commencé à souffrir atrocement sur les plans physique et psychologique. J’avais des idées noires. Je m’allongeais le soir et je voyais des mouches sortir de ma tête. J’étais rongé par une douleur psychologique intense, quelque chose d’horrible qui me dépassait complètement. Jusqu’à ce que je tente de me suicider, car je me sentais envahie de mort. Ma grossesse suivante s’est terminée par une fausse-couche à cinq mois. Le risque de fausse-couche est une séquelle courante de l’avortement. J’ai pu être soignée en suivant des thérapies qui n’existent pas dans le domaine public car elles ne sont proposées que par des associations chrétiennes. J’ai suivi une session stabat avec l’association Mère de miséricorde. Il existe aussi l’association Agapa qui aide les femmes ayant perdu un enfant que ce soit d’une fausse-couche ou par un avortement.

Lire aussi : Elles ont avorté, elles témoignent

Vous avez ensuite décidé d’agir afin d’éviter ce drame à d’autres femmes. Comment cela a-t-il commencé ?

J’ai décidé d’agir quand j’ai compris que j’avais avorté uniquement parce que j’avais peur de ne pas avoir les moyens d’élever l’enfant, que j’ai su qu’il existait des aides pour femmes enceintes dont le Planning familial ne m’avait jamais parlé, que j’ai donc réalisé que j’aurais pu m’éviter ce drame. Avec un ami, j’ai créé l’association Germinal dans le but d’informer les femmes enceintes en difficulté sur les aides et les solutions alternatives à l’avortement. Au vu des souffrances que j’avais subies et connaissant de nombreuses femmes confrontées aux mêmes douleurs, il fallait prévenir les filles enceintes en détresse que d’autres solutions existent pour arrêter ce massacre et faire respecter le critère du vrai choix. Leur dire que l’avortement n’était pas la seule issue pour s’en sortir.

Le Planning familial ne m’avait pas proposé de vrai choix, et je savais que de nombreuses femmes y seraient encore privées d’informations essentielles. J’ai donc créé un petit guide recensant les aides et associations permettant aux femmes enceintes en difficulté de mener à terme leur grossesse. Je suis allé proposer ce guide au Planning familial, afin que les femmes qui s’y rendent puissent non seulement se renseigner sur l’IVG, mais aussi qu’elles sachent qu’il existe d’autres solutions. Les membres du Planning ont refusé mon guide et m’ont dit qu’il n’était pas question de délivrer ce genre d’informations. Je leur ai demandé si elles avaient conscience que beaucoup de femmes souffrent de leur avortement.

Elle m’a alors asséné : « Si vous souffrez encore de votre avortement, c’est que vous avez un problème et que vous devez consulter un psychologue »

L’une d’elles m’a répondu que « personne ne souffre de son avortement ». J’ai dit : « C’est faux, j’ai moi-même avorté, je suis en souffrance depuis des années et je ne m’en remets pas ». Elle m’a alors asséné : « Si vous souffrez encore de votre avortement, c’est que vous avez un problème et que vous devez consulter un psychologue ». Cette phrase a eu l’effet d’une bombe dans mon cœur. C’était d’une grande violence étant donné ce que j’avais vécu, et vis-à-vis de toutes les femmes inconsolables qui me contactaient après leur avortement et dont j’étais incapable d’apaiser la douleur.

Sous couvert d’agir pour la santé des femmes, le Planning familial nie l’existence des séquelles post-IVG et refusent d’entendre celles qui y sont confrontées. Peut-on parler d’une loi du silence ?

La vérité c’est qu’il y a une omerta sur l’avortement en France. Nous ne sommes pas dans un pays pro-choix, puisque désormais les associations et les particuliers qui tentent de proposer aux femmes des solutions alternatives, ou simplement de les alerter sur les séquelles d’une IVG, sont susceptibles d’être poursuivis pénalement. Pire : on empêche les femmes d’exprimer leurs souffrances après une IVG. En France les femmes n’ont pas le droit de souffrir à cause d’un avortement.

Avec une amie ayant elle aussi subi un avortement, nous avons été soumises à cette loi du silence lorsque nous avons tenté de témoigner sur des forums, notamment Doctissimo et Au féminin.com. Chaque fois que nous essayions de témoigner, afin d’alerter celles qui pensaient recourir à l’IVG, nous étions harcelées de commentaires discréditant notre parole et nous accusant de mentir. Je ne faisais que dire à ces filles : « Réfléchis-y, l’IVG entraîne des séquelles. Moi-même j’ai avorté et je le regrette. Je pense sans cesse à cet enfant que j’ai perdu, à l’âge qu’il aurait etc ». Mais ma parole était insupportable aux yeux des hordes pro-IVG. Nos adresses IP ont fini par être repérées et nous avons été bannies de ces forums.

À la suite de ces bannissements, vous avez trouvé la page Facebook : « IVG : j’en souffre encore, je veux témoigner ». Cette page accueille les témoignages de très nombreuses femmes en souffrance à cause de leur avortement.

Je rêverais que l’on envoie tous ces témoignages au gouvernement et au Planning familial avec la mention : « Ah bon, personne ne souffre ? ». Rien n’est fait pour arrêter ce flot de souffrance de femmes qui n’osent pas témoigner parce que la société française le leur interdit. Tout est verrouillé pour protéger l’IVG. Le traumatisme n’en est que plus grand. Les témoignages sur cette page Facebook embêtent beaucoup le Planning familial qui ne peut pas taxer ces femmes de « cathos anti-IVG ». Impossible pour le Planning familial d’intenter un procès pour délit d’entrave envers une femme dont le témoignage n’est pas idéologique, et qui parle d’une souffrance physiologique. C’est par cette reconnaissance du traumatisme qu’est l’IVG qu’on améliore réellement le droit et la santé des femmes. Le Planning familial prétend lutter pour les femmes, c’est faux : il lutte avant tout pour l’avortement, devenu une idéologie à part entière.

Lire aussi : Pourquoi le site ivg.net est-il la cible de l’Etat ?

Avec l’élargissement du délit d’entrave, informer les femmes, sur internet, des risques liés à l’avortement est désormais passible de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. Que reste-t-il pour aider et alerter les femmes ?

Avec le délit d’entrave, il est très compliqué d’informer réellement les femmes sur les solutions alternatives et surtout sur les séquelles d’un avortement. Les derniers recours sont les sites d’information qui résistent malgré la pression comme ivg.net, et les témoignages de celles à qui l’on n’a pas proposé de choix et qui le regrettent aujourd’hui.

Propos recueillis par 

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