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Les primaires auront-elles été le tombeau de la droite et de la gauche dites « de gouvernement » ? Avec le recul, c’est une quasi certitude. Cependant, ce ne sont pas les primaires en tant que telles qui sont la cause du déclin de ces deux grands partis historiques de la Vème République, mais l’inanité de la formule dans un pays où le bipartisme n’est plus et où le clivage droite-gauche n’est plus l’unique ligne de démarcation idéologique.
Apocalyptiques au sens étymologique du terme, les primaires ont révélé les profondes tensions idéologiques jusqu’alors cachées qui agitaient socialistes et Républicains. Premier parti à avoir importé les primaires « à l’américaine » en France, les socialistes n’en ont fait les frais qu’après leur troisième organisation. Les deux premières n’ont pas produit d’effets immédiatement visibles pour deux raisons. En premier lieu parce qu’elles s’inscrivaient dans un paysage politique fort différent, toujours soumis au fameux « bipartisme » qui a longtemps été la règle sous la Vème République, lequel sans être tout à fait comparable à celui que connaissent les Etats-Unis n’en était pas moins relativement solide. Conséquence directe, les dissensions majeures au sein du Parti socialiste étaient naturellement étouffées par le pouvoir et les privilèges qu’il offre. Quoi de mieux pour calmer un éventuel frondeur que la direction d’une quelconque fondation publique ou un siège dans une institution internationale ? Les choses allaient alors de soi, socialistes et Républicains croyant l’alternance durer 1000 ans.
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Il a fallu l’élection de François Hollande pour assister à un renversement total, dont le climax a été atteint lors des dernières élections européennes. Elu sur un malentendu -ça peut toujours marcher -, François Hollande a patiemment travaillé à sa propre chute, en nommant notamment celui qui allait lui succéder tout en tuant le parti qui l’avait vu naître (notons toutefois qu’Emmanuel Macron était le rapporteur du Rapport Jacques Attali sur la libéralisation de la vie économique commandé par Nicolas Sarkozy). Par son libéralisme assumé, au moins en discours, car personne n’est vraiment « libéral » en France, le libéralisme ne s’évaluant chez nous qu’à votre degré de séparation avec le capitalisme de connivence de la République, Emmanuel Macron entrainait à sa suite les proches de Dominique Strauss-Kahn et quelques élus locaux droitiers plus malins que la moyenne tout en s’arrimant le Modem que François Hollande avait snobé avec un arrogant mépris. De ce fait, il révélait que le Parti socialiste issu du congrès d’Epinay n’était bel et bien plus qu’une fiction depuis déjà longtemps.
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Cette synthèse entre des soc-dems globalistes et des socialistes stricto sensu, parfois issus des trotskismes français comme Gérard Filoche, explosait même en vol pendant l’entre-deux tours des primaires socialistes opposant la Deuxième gauche clémenciste autoritaire de Manuel Valls à la gauche post-moderne de Benoît Hamon, assumant l’utopie et le multiculturalisme. Les tensions entre les deux hommes furent si fortes que des proches de Manuel Valls n’hésitèrent pas à le dépeindre en soumis à l’islam politique et aux Indigènes de la République, manquant de peu d’utiliser le sobriquet d’« imam trappiste » qui faisait alors florès sur les réseaux sociaux. Entre le candidat du revenu universel et de la transition énergétique, demandant à la France d’ouvrir plus encore les vannes migratoires, et l’ancien premier flic de France transgressif inspiré par Nicolas Sarkozy, plus qu’une feuille de papier à cigarettes : un gouffre. Logiquement, les « vallsistes » se reportèrent massivement vers Emmanuel Macron, comme Valls lui-même qui n’en fit pas mystère. Un parti mourait en direct des primaires pour la première fois, faut d’avoir su se trouver un chef naturel. Et pour cause, le sien était si impopulaire qu’il fut le premier Président à ne même pas pouvoir se représenter.
Avec son programme thatchérien et ses manières de gentleman farmer, François Fillon fut malgré lui l’un des fossoyeurs des Républicains.
Côté Républicains, l’agonie fut plus lente – mais pas moins douloureuse -. À l’image de leurs anciens condisciples socialistes avec qui ils pratiquaient le pervers jeu de l’alternance, les Républicains ont organisé des primaires lors desquelles les militants se sont fait plaisir en choisissant un candidat “droitard” appuyé par des organisations en marge du parti, à l’image des futurs cocus de Sens Commun. Avec son programme thatchérien et ses manières de gentleman farmer, François Fillon fut malgré lui l’un des fossoyeurs des Républicains. Oh, il y eut bien sûr les « affaires ». D’aucuns croient que François Fillon aurait été élu sans ces révélations qu’ils jugent « injustes » (elles seront bientôt jugées, et le monsieur propre de la droite avait peut-être trop donné de leçons de morale, mais passons), nous ne le saurons jamais. Cela étant, rien n’est moins sûr tant « l’offre » Macron pouvait satisfaire la droite du ventre comme son pendant de gauche, sans oublier l’habile touche visqueuse de moraline nécessaire à l’estime personnelle de nos compatriotes les plus sensibles lorsqu’ils vont glisser leur bulletin dans l’urne.
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Comme dans le cas socialiste, les primaires des Républicains auront donc agi comme un catalyseur des fractures idéologiques du parti. Centristes, libéraux, crypto-souverainistes, conservateurs, et autres contre-révolutionnaires honteux ne pouvaient bien longtemps tenir tous ensemble sans les « places ». De places, il n’en restera plus beaucoup à partager dans les prochaines années. Et pour cause, La République En Marche occupe l’espace politique de l’UDF naguère incorporé à la synthèse UMP quand le Rassemblement national a peu ou prou repris l’espace politique qui était autrefois dévolu au RPR. Les primaires l’ont prouvé : on ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment.
Gabriel Robin
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