
Culture


À l’acéphalie des programmes conçus pour le tout-venant, au déballage de vulgarités peroxydées et à ces réalités diminuées dans lesquelles évoluent pantins de chair gonflés à l’hélium et hyper-sottes kardashianisées jusqu’à la trogne, on pourra toujours préférer la culture subventionnée, celle qui toque à la porte aux heures tardives, emmenée par des émissions littéraires dont le succès confidentiel fait malgré tout le bonheur de ses producteurs, persuadés qu’ils font preuve de résistance en invitant à 23 heures un grand pope du romanesque avalisé, si possible femelle, de type Cécile Coulon ou Agnès Martin-Lugand. On aurait tort.
L’émission littéraire, voilà bien l’ultime saloperie dont est capable la télévision, qui non contente de traîner la culture dans la boue, lui érige des mausolées en stuc. L’ignoble Bernard Pivot a heureusement disparu du PAF, remplacé par le benêt François Busnel sur France 5. Sans doute moins nocif mais tout aussi redoutable lorsqu’il s’agit de mettre à mort ce qui nous reste de littérature. Jour sombre que ce mercredi 23 mars où le bougre, probablement certain d’œuvrer pour le bien, se met en tête de consacrer une émission entière à la poésie. On en tremble d’avance. Car nous le savons déjà, la poésie, c’est comme la philosophie : elle ne peut pas exister en même temps que la télévision. Cela relève de la physique pure et simple. [...]
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Les souffrances du jeune Stromae
Multitude, Stromae, Polydor, 15,99€
Cela faisait neuf ans – et pas un de moins – que l’on n’avait pas eu de nouvelles du maestro du plat pays. En effet, après la sortie de Racine carrée en 2013, le chanteur s’était fait très discret, préférant se consacrer à son label Mosaert et à sa ligne de vêtements unisexe. La faute à un burn-out artistique, paraît-il, mais aussi à une santé défaillante. Le voilà enfin de retour avec Multitude, un nouveau disque aussi riche musicalement que trivialement neurasthénique. En effet, si l’album commence sur une note optimiste et combative avec le morceau « Invaincu » inspiré par la victoire du chanteur sur la maladie, on glisse rapidement dans le pathos avec des morceaux larmoyants à souhait. En petit Schopenhauer de la pop belge, le jeune Stromae explore les affres de l’existence humaine en abordant des thèmes aussi contemporains que la dépression (« Mauvaise journée »), les couples mal assortis (« Pas vraiment ») ou la solitude (« La solassitude »). Il est vrai que la musique de Stromae n’a jamais été un hymne à la joie – la faute sans doute à l’histoire personnelle du chanteur – mais on aurait préféré moins de misérabilisme. Au niveau des textes, on frôle parfois le grotesque le plus accompli voire le scatologique franc comme dans le titre «C’est que du bonheur » qui aborde la question de la paternité sous l’angle des couches-culottes maculées. Sans doute l’influence d’Orelsan qui, comme l’a avoué l’intéressé dans une récente interview pour le média Brut, donnerait régulièrement au chanteur un coup de main sur la rédaction de ses textes? Bien sûr, tout n’est pas à jeter dans l’océan de tristesse qu’est Multitude: l’interprète de « Formidable » a toujours le pouvoir de susciter des émotions sincères, qu’il aborde la tragédie du suicide dans « L’enfer » ou qu’il fasse l’éloge des invisibles de la République avec « Santé » ou encore qu’il se mette dans la peau d’un fils de prostituée dans « Fils de joie ». Jamais moralisateur, Stromae évite tout parti-pris politique à l’exception d’une timide dénonciation du machisme sur la chanson « Déclaration ». Musicalement, Stromae a choisi de miser sur l’exotisme de la musique du monde mais l’utilisation d’instruments méconnus comme la vièle chinoise erhu, la flûte persane ou la charango andin dissimule mal l’indigence des rythmiques que l’artiste compose dissimulé derrière l’écran de son ordinateur. Décevant. Mathieu Bollon

Irrésistible
Hima, David Aubaile & Julien Tekeyan, Profile-on-air, 14,99€
Voici un album qui ne s’entend pas mais qui s’écoute… et plusieurs fois, probablement, avant de rentrer dans « La Décadanse, The Avengers » en référence à «Chapeau Melon et bottes de cuir », « Kobagna », «Caterpillar », autant de titres qui ne livrent pas leur substance si aisément. HiMA, (« maintenant » en arménien) est rythmiquement imparable, et mélodiquement imprévisible. C’est fou, libre, ça se paie des faux-airs de Capharnaüm mais cela retombe toujours sur ses pattes! On comprend pourquoi en faisant un tour dans la biographie du pianiste-flûtiste David Aubaille. Quant à Julien Tekeyan, qui avoue rechercher en permanence profondeur, rondeur et chaleur dans son jeu de batterie et percussions, c’est précisément ce qui fait mouche ici. Curiosité et improvisation en chemins inconnus: voici les fils conducteurs de leurs explorations sonores imposant une vitalité formidable d’une joie contagieuse. Alexandra do Nascimento [...]
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En 2019, lorsque Downtown Abbey débarque sur grand écran quatre ans après la "n de la série au succès international, l’attente et l’appréhension sont de rigueurs. On ne transpose pas aussi facilement un format TV dans une salle obscure. La déception est grande, du moins pour ceux qui espéraient quelque chose. Trois ans plus tard, les créateurs remettent le couvert: non seulement on ne s’y rend pas en traînant les pieds mais on s’émous- tille même aux premières notes de piano du fameux générique. Finalement, on n’abandonne jamais des compagnons d’écran de cinq ans aussi facilement, quand bien même ils seraient anglais.
Pour ceux qui sont passés à côté de l’une des plus belles créations de cette dernière décennie, Downton Abbey suivait les aventures de Lord Robert Crawley, comte de Grantham, de sa famille et de leurs domestiques. Un petit bijou d’écriture créé par Julian Fellowes, scénariste de Gosford Park, qui brossait avec délicatesse un portrait de l’Angleterre de 1912 à 1925, entre tragédie intime et grande Histoire. D’un anti-conformisme revigorant, la série ne cessait de rappeler qu’il n’y a point de civilisation sans convention, que le « l’abîme de l’histoire est assez grand pour tout le monde », comme l’écrivait Valéry et que le conservatisme est son salut. Cette nouvelle ère, comme l’annonce le titre, s’ouvre sur le mariage de Tom Branson (le gendre veuf de Lord Grantham) et de sa fiancée Lucy. La caméra précède les mariés sortant de l’église, l’occasion de croiser tous ses personnages découverts au fil de six saisons. Tous ont répondu présents pour un nouveau tour de piste. Puis la vedette apparaît enfin, majestueuse, éternelle : le château. [...]
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