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La Fabrique de la famille ? Un guêpier juridique

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Publié le

9 juin 2020

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Famille homo

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Une fois le confinement terminé, le gouvernement n’a rien trouvé mieux que remettre à l’ordre du jour le projet de loi sur la PMA, sans pour autant fixer un calendrier. Une folie anthropologique qui nous déshumanisera de plus en plus, et déstructurera la famille.

 

Revoilà l’ancien monde avec la PMA retardée pour cause de coronavirus. Cette fois sous la plume de Guillaume Chiche, député des Deux Sèvres : « Chaque jour qui passe est une chance de moins de pouvoir mettre au monde un enfant pour celles qui le désirent et lui transmettre son amour. Il est indispensable de mettre fin à cette discrimination insupportable. » Lui fait écho, dans Le Journal du Dimanche du 7 juin, une tribune, signée par 45 députés de tout bord ainsi que par des représentants de la société civile demandant au gouvernement d’insérer le texte législatif dans le calendrier, dès septembre 2020. Alors, nous, on leur dit à ces gens pressés : « On se calme !  Il y a le chômage, la dette, la pauvreté, les scandales, les comptes à rendre et à faire. » Il faudra quand même se rendre un jour à la raison : cette loi est infaisable.

 

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Le 2 juin, la chaîne Arte, diffusait dans son émission « Le monde en face » un documentaire sur le quotidien des enfants nés par PMA intitulé  « Les enfants ont la parole » Une petite fille donna sa définition de la famille coulant de source : » Une famille, c’est trois êtres vivants, un plus petit que les deux autres qui s’aiment ». Quelle maturité et quelle fraîcheur ! Pour faire vrai, on ne ménagea pas les ombres dans le tableau familial. Ainsi Lucie demande un jour à sa « maman solo » pourquoi son père ne voulait pas la rencontrer. Un jeune homme, vivant avec deux femmes, demanda à être adopté par son oncle.

 

Quant au témoignage d’une jeune femme de 25 ans, devant sa bibliothèque et près d’une harpe, née par PMA, on ne pourra le connaître, en raison de problèmes techniques de retransmission. Dommage, car elle était la fille de deux lesbiennes qui avaient été les pionnières de la PMA, avaient vécu en couple, et s’étaient séparées : bref, une enfant devenue adulte. En tout cas, le message, appuyé, de l’émission d’Arte était clair : la parole des enfants était mûre, heureuse, libérée.  C’était le regard de la société qui devait changer. On ne le dirait jamais assez.

 

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Sur le plateau, deux invités dont la cofondatrice de l’association « Mam’en solo » qui milite pour la PMA. Mère d’une petite fille, elle lève un voile sur son histoire personnelle. Sur le point de faire une PMA avec un homme qui la quitte — et le temps passant —elle décide de se faire inséminer en Belgique. Soutenue par son père, veuf, dans son projet parental, elle se dit hétérosexuelle, et est prête à rencontrer l’amour avec un autre homme. Elle parle de sa santé procréative : il ne faut pas « figer l’amour ». A ses côtés, un psychiatre de la Salpêtrière, Serge Hefez, auteur d’un livre « La Fabrique de la famille ». Le psychiatre est l’invité obligé de ce genre d’émission car le projet de loi nécessite souvent un accompagnement spécifique.

 

Pour lui, le donneur n’est pas le père mais, le don ayant sa dignité, « le donneur donne un engendrement » , Il faut donc donner sa dignité au donneur qui a une importance primordiale dans l’imaginaire et le psychisme de l’enfant. Aussi ce psychiatre, ouvert et bienveillant, milite-t-il depuis toujours pour la levée de l’anonymat du donneur. Un couple hétérosexuel qui reçoit un don par tiers donneur est libre de dire — ou pas—à l’enfant le secret de fabrication car le couple jouit du principe de « la présomption de paternité. » La vérité, pense le psychiatre, est toujours préférable. En tout cas, si l’anonymat spécifique à la France était levé, ce serait une première dans notre droit français.

 

Le mérite de l’émission fut non pas de libérer la parole des enfants mais celle des adultes. Fini le slogan phare des défilés « Non à la PMA sans père » sans jamais parler du tiers donneur. Si le tiers donneur a pour vocation à se faire oublier, comme dit Christian Flavigny, ce n’est plus le cas dans les débats. Le donneur est même omniprésent non en tant que père mais géniteur absent. Aussi faut-il pour certains enfants nés de sperme inconnu quelque chose qui ressemble à un père. Un référent autre que les deux mères. Ce père de substitution peut-être un grand-père, l’ami de la famille. Ou bien une grand-mère, comme l’avait dit Madame Buzyn.

 

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Le psychiatre, très sensible au caractère polymorphe des différentes familles et au décloisonnement des rôles dans une famille, comprend la demande du jeune homme, dans le documentaire, d’être adopté par son oncle : ce lien d’adoption juridique est important pour le patrimoine et la sécurité affective de l’enfant lui-même. Ce lien a une valeur pratique et symbolique. Question : en quoi cette nouvelle « famille » s’affranchit-elle du modèle familial patriarcal, archaïque et désuet ? Bien plutôt complique-t-elle le jeu de piste dans « la recherche du père » soit que l’anonymat soit levé soit que les tests génétiques sur internet vous conduisent tout naturellement à la source du don , comme ce fut le cas d’Arthur Kermalvzen, né dans un couple hétérosexuel. Soit enfin qu’on exige d’autres configurations parentales. En attendant, cette « fabrique de la famille » qui n’est rien d’autre qu’une ouverture à la pluriparentalité ouvre sur un guêpier juridique et sur la consanguinité. Les « familles de graines » retrouvées grâce à internet sont ludiques et dangereuses.

 

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Le seul obstacle à la PMA, ce n’est donc pas l’idée du bonheur ni le regard des autres, comme le laisse entendre le reportage, mais la filiation et l’héritage. Si les enfants nés dans et hors mariage ont les mêmes droits, de quel droit priver d’un héritage un enfant, né par PMA, d’un « donneur » qui est peut-être « père » d’une progéniture (sans que sa femme ou sa conjointe le sache d’ailleurs puisque le don de sperme est anonyme ? )

 

La conception du mariage centré sur le couple —monogamie, patrilinéarité— avait fait ses preuves. La preuve en est cette loi des nouvelles familles, conçues comme des associations dont on n’accouche toujours pas. A-t-on jamais vu la nécessité d’un psychiatre ou d’un coach à vos côtés pour créer une famille ? Ajoutons que la levée partielle de l’anonymat par des données non identifiantes, véritable supplice de Tantale, excitera une curiosité et une frustration d’autant plus grandes que la privation d’un patrimoine auquel on aurait droit dans un couple différent sera ressentie comme une injustice à réparer.

N’en déplaise au psychiatre, mieux vaut « le secret des familles » sur le tiers donneur hétérosexuel qu’une transparence absolue qui mettrait fin au principe, toujours valable en droit, de la paix des familles.

Le calendrier de la PMA a été remis aux calendes. Mais certains députés sont intéressés à montrer leur zèle. Les Français sont lassés. À tort. Car cette loi entraînerait une complexité inutile et dommageable dans le tissu social. La parole de l’enfant, muselée dans l’enfance, se libèrera par la voix des avocats dans des procès. La date limite d’un recours en paternité vole déjà en éclats avec les tests génétiques. N’en déplaise au psychiatre, mieux vaut « le secret des familles » sur le tiers donneur hétérosexuel qu’une transparence absolue qui mettrait fin au principe, toujours valable en droit, de la paix des familles.

 

Mieux vaut donc en rester au statu quo de la loi actuelle. Faut-il rappeler, enfin et surtout, une fois de plus, que, si la mère a fait « le choix » d’avoir un enfant avec un don anonyme, l’enfant, lui n’a pas fait celui de ne pas avoir de père ? À moins de contrevenir à l’article 1 de la Convention des droits de l’enfant signée par la France en 1990 : « L’enfant a le droit de connaître ses parents et d’être élevé par eux dans la mesure du possible »

Faut-il rappeler, enfin et surtout, une fois de plus, que, si la mère a fait « le choix » d’avoir un enfant avec un don anonyme, l’enfant, lui n’a pas fait celui de ne pas avoir de père ?

On n’évacue pas aisément la figure paternelle. Dans les Misérables, à Jean Valjean qui lui demande dans la forêt : « Tu n’as dont pas de mère » ? Cosette répond : « Je crois que je n’en ai jamais eu ». Une petite fille, dans le reportage, à qui on demandait qui était son père, répond, dit sa mère : « Il a été mangé par des lions en Afrique ou il est mort à la guerre. » Finalement, le titre du livre du psychiatre aurait pu être : « La fabrique d’orphelins. » Il est vrai que le titre était déjà pris.

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