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La Roumanie enterre son Roi

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Publié le

16 mars 2019

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La maison royale de Roumanie a souhaité ramener le corps du père du roi Michel Ier dans la nécropole royale de Curtea de Arges.

 

Enterré à Estoril en 1953, Carol II fut un prince controversé qui a longtemps divisé les Roumains. Ses frasques amoureuses ont alimenté les gazettes people de l’entre-deux-guerres et sa montée sur le trône a conduit son pays vers un absolutisme qui sera fatal à sa dynastie.  

 

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Le 9 mars coïncide avec la fête des Quarante martyrs de Sébaste que l’écrivain Guillaume Apollinaire célébra dans un poème intitulé « la chanson du mal aimé».  Le titre résume Carol II. Le cercueil est recouvert du drapeau de la maison royale de Roumanie. Les pas des militaires qui le portent vers sa dernière demeure sont lents.

Les princesses Sofia et Maria ont accompagné le prince Radu, époux de la curatrice du trône et fille du roi Michel Ier, la princesse Margarita. Paul Lombrino est aussi venu avec sa famille rendre hommage à son grand-père, mais « Sa Majesté Margarita », comme l’appelle les Roumains, n’a pas souhaité y participer.

 

 

Elle entend maintenir la même position que son père envers Carol II. En 2003, le corps du roi avait été rapatrié à la demande du gouvernement roumain qui le place à l’extérieur de la nécropole royale, Michel Ier refusant d’assister à la cérémonie.

Pour comprendre une telle retenue de la famille, il faut revenir en arrière. L’enfance de Carol est jalonné par les disputes incessantes entre sa mère Marie d’Edimbourg et son grand-oncle, le roi Carol Ier, fondateur de la Roumanie moderne, concernant l’éducation à donner à l’héritier au trône.

 

La réconciliation n’est pas simple mais la Roumanie a refermé un des épisodes les plus troublants de son histoire.

 

Il est le premier prince de la maison royale des Hohenzollern-Sigmaringen à parler le roumain. Les vertus prussiennes de sa famille lui sont étrangères. A l’heure des querelles byzantines au sein du parlement et de la montée du fascisme roumain de « l’archange » Corneliu Zelea Codreanu, futur leader de la Garde de fer, Carol se passionne pour les sports de vitesse, l’aviation et les femmes.

Ces écarts de conduite provoquent de vives tensions avec sa mère et son père le roi Ferdinand Ier. Sa liaison avec Jeanne « Zizi » Lambrino est passionnée et il ne la cache pas. Pis, il l’épouse le 31 août 1918 à Odessa, en Ukraine. Le scandale est à la mesure de la colère de ses parents.

 

 

Comment le prince héritier a-t-il pu épouser sans leur consentement la fille d’un officier de l’armée ? La mésalliance pousse le puissant premier ministre Bratianu à accuser le prince de « trahison ». Le roi et le gouvernement font annuler le mariage sept mois plus tard. Le prince est prié de trouver une épouse de sang royal.

Ce sera Hélène de Grèce qui tombe amoureuse de ce prince dont elle n’ignore pourtant pas la vie dissolue. Une alliance politique qui doit contrer les visées expansionnistes bulgares. Le 10 mars 1921, le mariage est célébré, couronné de la naissance de Michel, son …deuxième fils.

 

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Car bien que son premier mariage ait été déclaré nul et non avenu, le prince a continué à voir Zizi Lambrino et de lui donner un fils, Mircea (1920-2006).  Les deux époux se séparent rapidement et Carol se réfugie dans les bras d’une autre femme, Magda Lupescu, la fille d’un pharmacien juif. « La goutte qui fait déborder le vase » pour les partis politiques roumains gagnés par l’antisémitisme.

Le prince est forcé à renoncer au trône le 28 décembre 1925 en faveur de son fils Michel, et part dilapider sa rente dans les casinos de Monaco.

 

 

Le prince conserve des partisans, les carlistes, qui entendent bien le remettre sur le trône à la mort de son père Ferdinand en 1927. Au cours d’une aventure rocambolesque, Carol revient en Roumanie en juin 1930 pour prendre possession du trône, laissé à son fils Michel.

Agacé par les agissements du parlement qui a pourtant contribué à faire annuler son acte d’abdication, Carol II décide de régner de manière plus personnelle et de se débarrasser des leaders de la Garde de Fer qui le voient comme un « parasite ». Le roi, méprisé par ses sujets, génère de la méfiance.

 

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Les partis politiques ne supportent plus ce souverain épicurien et autoritaire. Lorsque la seconde guerre mondiale éclate, la Roumanie demeure neutre tout en subissant les assauts diplomatiques de l’Union soviétique et du IIIème Reich. Piètre politique, le démembrement de la Grande Roumanie précède le coup d’état de 1940 qui porte au pouvoir le maréchal Antonescu, tuteur du prince Michel.

Carol II prend une nouvelle fois le chemin de l’exil. Sa mort à 59 ans est entourée de légendes. Certains cherchent encore son trésor à Nice quand d’autres attribue son décès à un orgasme ou même un complot des anciens de la garde de Fer qui auraient mitraillé son train alors qu’il quittait le pays.

 

© DR

 

Michel Ier ne reverra jamais son père. Ses relations avec lui furent exécrables tant il n’oublia jamais les humiliations faîtes par son père à sa mère. Aucun roumain ni pays étrangers ne voulut reconnaître sa dignité royale ni sa tentative de former un gouvernement en exil.

Prince détesté, il le resta comme simple citoyen d’une monarchie qui tombe en 1947 avec la poussée soviétique. Sa famille ne lui pardonne pas un remariage qui continue d’empoisonner les relations entre les Lambrino et la maison royale.

 

Alin Valentin Borcea

 

Aujourd’hui, « c’est un moment historique. Carol II occupe la place qui lui revient. Nous faisons aujourd’hui la différence entre sa personnalité, sa vie privée et ce qu’il a contribué à réaliser pour la Roumanie » déclare l’étudiante Ana Maria Bonciu. Porté par le 33ème régiment de chasseurs alpins, le cercueil du roi rejoint son fils sous une dalle de marbre blanc, bénie par l’archimandrite.

 

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Le soleil est au rendez-vous mais la froideur de la journée semble réveiller l’animosité qui règne entre les deux branches de la famille. En accompagnant le petit-fils adultérin de Carol II, la branche légitime a lancé un signe d’apaisement vers les Lambrino qui ont revendiqué aussi le trône et qui avait tenté, en vain, l’expérience électorale au début des années 2000.

 

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Pas un mot avec Paul Lombrino n’aura cependant été échangé avec les membres de la famille royale. Tout au plus avec Nicolas Medforth-Mills, un autre mal aimé de cette dynastie. Il est vrai que Paul Lambrino avait refusé cette ré-inhumation, affirmant que rien dans le testament ne l’évoquait avant que l’église n’arrive à le convaincre.

La réconciliation n’est pas simple mais la Roumanie a refermé un des épisodes les plus troublants de son histoire.

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