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Emma Becker : pute, mais pas trop

Nous parlions récemment de ces nouvelles pratiques de la prostitution « sans risque » qui attirent tout un tas de petites grues vénales et narcissiques : la domination à distance, le « caming » et autres pratiques nichées du sexe virtuel qui demandent un investissement corporel minimum – mais n’empêchent pas les âmes de ces pauvres filles d’être bruyamment concassées par le Néo-Capital. On ne pourra pas enlever à Emma Becker qu’au moins, elle est allée au charbon. En travaillant deux ans dans plusieurs bordels berlinois, elle est rentrée dans le vif du sujet. Bon, certes elle a préféré les confortables hôtels de passe de la capitale allemande au périphérique nord-parisien et à ses putes à crack édentées... On va dire que c’est une question d’esthétique – mais passons. Dans La Maison, paru en 2019, Becker poussait jusqu’au bout le gonzo-journalisme, par opportunisme, ambition et peut-être même par vice. Pourquoi pas, après tout. Le problème, comme souvent dans ce genre de procédé d’immersion, c’est qu’elle est devenue doublement pute : d’abord avec ses clients, mais ensuite avec son propre milieu d’adoption, qu’elle a quitté un beau matin pour rejoindre le VIè arrondissement parisien. Faire le tapin n’aurait été qu’un hobby particulièrement rentable – si l’on additionne les ventes de La Maison et à ses émoluments de femme à jouir. 

Maman et putain

L’Inconduite sera donc le roman du retour à la vie parisienne et germanopratine. Retour à ses obsessions de petite fille riche : s’envoyer tout ce qui bouge pour tromper l’ennui, et si possible des vieux beaux plus ou moins célèbres, qu’on ne nommera pas dans le livre mais qu’on s’arrangera pour laisser fuiter dans l’exercice promotionnel qui suivra, histoire d’être sûr que tout le monde a compris : Emmanuel Carrère fera donc partie de ces illustres bâtons de vieillesse que la Becker aligne comme des trophées de veines pulsantes, de bonnes vieilles queues couronnées comme elle les aime depuis Monsieur, sa première autofiction confessatoire (c’est sans doute un des rares plaisirs qu’on peut trouver au livre : voir l’insupportable homme-soja des lettres françaises en prendre un peu pour son grade). [...]

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Éditorial culture de septembre : Rentrée dans le rang

La tendance de cette rentrée ? Des romans sans style peignés dans le sens de l’idéologie par palettes entières. Sur les sites des éditeurs, les argumentaires se ressemblent, souvent interchangeables, rejoignant toujours les mêmes thèmes. À ce titre, les éditions du Seuil, qui publient, ou publièrent, par ailleurs, des écrivains audacieux ou de grande tenue, se montrent d’une exemplarité idéologique effrayante. Adrien Genoudet évoque le souvenir d’un ancien maquisard, Kaouther Adimi met en scène des Algériens durant la Seconde Guerre mondiale et dans la période qui suit, Kinga Wyrzykowska, nous offre une fable qui « porte un regard d’une grande finesse sur le climat social et la peur de l’autre »,Diaty Diallo nous présente une bande de potes de cité et « le harcèlement policier qu’ils subissent quotidiennement »,Nadia Yala Kisukidi, spécialiste des études postcoloniales défend son premier roman, quand Cloé Korman donne un récit « des traces concrètes de Vichy dans la France d’aujourd’hui ».…

[Cinéma] Avec amour et acharnement : naufrage total
Claire Denis, c’est plutôt le haut du panier et la certitude a minima d’une recherche plastique : depuis Beau Travail jusqu’à High Life en passant par le magnifique Vendredi soir, voilà une bonne trentaine d’années que son œuvre travaille une forme singulière, et propose autre chose qu’un récit illustré – en somme Claire Denis essaye de faire du cinéma. Dommage, ici, elle s’est acoquinée avec la sinistre Christine Angot pour cette adaptation du non-moins sinistre Un tournant de la vie: soit un compendium des obsessions pathétiques de la romancière – marivaudages sans passion, immigrationnisme complètement hors-sujet, et sécheresse infinie de son cœur de bourgeoise avariée. [...]
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[Cinéma] Memories : fleuron de l’animation
Le film à sketches, assez répandu dans les années 90, était un moyen pour les cinéastes d’animation japonais de se faire la main et d’expérimenter leurs techniques. Conçu sous la houlette de Katsuhiro Otomo, ce Memories méritait bien une ressortie cinéma. Outre le très bon Cannon Fodder, réalisé par Otomo, plan séquence virtuose qui explore le quotidien d’un enfant dans un univers militariste et ubuesque, le film vaut surtout pour l’incroyable Magnetic Rose. Réalisé par Koji Morimoto, génie de l’animation malheureusement un peu oublié aujourd’hui, Magnetic Rose se veut à la fois un hommage au Kubrick de 2001, aux films de maison hantée et à l’opéra italien. [...]
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[Cinéma] Vesper Chronicles : SF poétique
Alors qu’Hollywood disloque peu à peu son savoir-faire dans ces machines à broyer l’imaginaire que sont Disney +, Marvel et consorts, un vent de renouveau de la science-fiction souffle à l’est. Co-production franco-lituanienne, ce très beau Vesper Chronicles n’invente pas grand-chose mais rend hommage à ses maîtres tout en renouvelant avec poésie certains concepts. Dans un pays et dans un futur institués, on suit l’errance d’une gamine qui tente de redonner du sens à sa vie – et accessoirement de sauver son père paralytique dont la conscience a été téléchargée dans un drone rouillé. [...]
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Gilbert Houbre : quand l’énergie se propage
En regardant les toiles de Gilbert Houbre, on devine immédiatement le geste du peintre, sa rapidité, sa force, sa nécessité. La fulgurance du geste palpable. Il y a quelque chose de vital dans cette peinture-là. On sent bien qu’il y a eu combat, et que ce que nous voyons en est non pas le résultat, mais son expression permanente, comme si rien n’était jamais figé. Le combat a lieu entre ce que le peintre a observé et la traduction intérieure qu’il opère. Cela passe par un corps-à-corps, Houbre fait vite, comme s’il fallait qu’il laisse à la toile une chance de survivre toujours au combat. [...]
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Les critiques musicales de l’été

Revanche sur le bon goût

There is no time, church of the cosmic skull, Septaphonic, 13 €

Les sectes et cultes divers ont toujours fait bon ménage avec la pop music. On se souvient de Father Yod à Los Angeles, gourou illuminé qui, entouré de ses adeptes, sortit des albums psychédéliques dans les années soixante-dix. Genesis P Orridge, de Psychic TV, était un personnage ambivalent qui utilisait son groupe pour promouvoir son « Temple Ov Psychic Youth ». Les sept membres de la Church of the Cosmic Skull, avec leurs costumes immaculés, pourraient donner l’impression de succéder à de tels mouvements. Alors qu’en réalité, ce groupe prône la liberté de penser et n’utilise les artefacts de la culture pop-sectaire que pour mieux la détourner. Avec ce quatrième album, la bande à Bill Fisher (« Brother Bill ») affine son art en nous offrant un mélange entre glam, hard, progressif et rock FM. Pensez à un mélange entre Black Sabbath, Electric Light Orchestra, ABBA ou encore Fleetwood Mac. Après une grande vague de « bon goût » indé imposé par les tenants d’une certaine critique post-Inrockuptibles, l’heure de la revanche a sonné. Jean-Emmanuel Deluxe


Éspiègleries équatoriennes

Karishina, Helena Recalde, Finca Sud, 17€

« Bayé Oyo » en ouverture donne le ton, c’est que l’album Karishina ne plaisante pas ! Enfin une création andine qui bouleverse les codes et fait voler en éclat les stéréotypes du genre ! Bassiste, contrebassiste et chanteuse équatorienne, Helena Recalde exploite la nostalgie de l’enfance, les rythmes de la côte Pacifique et les partitions andines, le tout dans la justesse de la simplicité. Un trio de choix et quelques invités à la hauteur, le tout mené de main de maître par les lignes de basses de Recalde, plutôt directives et sensuelles. S’ajoutent aux compositions quelques reprises rondement menées, comme « No Valentin », une pépite traditionnelle de l’Amérique du Sud. Son hardi « Campoazul » ose se mesurer – avec succès – au légendaire « Afro Blue » créé par la figure de proue du jazz latin, le percussionniste et chef d’orchestre cubain Mongo Santamaria. Ce morceau a été repris par toute une génération de grands noms du jazz, dont John Coltrane en 1966. Joli culot et brillant second album, mademoiselle Recalde ! Alexandra Do Nascimento [...]

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Virginie Despentes : la moraline en rotant

Cher Connard, le livre-choc de cette rentrée littéraire permet à l’immortelle autrice de Vernon Subutex de frapper encore un grand coup. Toujours aussi dérangeante dans le propos et virulente dans la forme, elle met en scène avec brio les grandes tensions de l’époque afin de nous ouvrir l’esprit en nous coupant le souffle… Je plaisante. Il s’agit là (en mieux écrit), de ce que vous trouverez dans Télérama, L’Obs ou Les Inrocks, les clichés des critiques dociles empapillotant comme il se doit le silo de clichés littéraires que transporte le roman le plus surévalué de l’an 2022, L’Obs dépassant même ses rivaux en comparant le pensum de Despentes aux Liaisons dangereuses, tout ça parce qu’il est présente sous forme de correspondance. Elle aurait raconté son retour compliqué d’Istanbul qu’on nous vendait L’Odyssée du XXIe siècle.

L’écrivain branché Oscar Jayack, en pleine tourmente « MeToo », ayant vanne la célèbre actrice Rebecca Talle sur Instagram, celle-ci lui envoie un mail d’insultes. Il s’excuse, déroule ses déboires et ses souvenirs. Elle répond tout en prétendant n’en avoir rien à foutre (une vraie pétasse de troisième). La version de sa victime, Zoe Katana (Despentes reste fidèle a son onomastique de manga criard), est exposée sur son blog. On s’explique avec plus ou moins d’hystérie (Rebecca beaucoup, Zoe davantage, Oscar aucune – il déprime), c’est ce qui distingue essentiellement les personnages, lesquels, pour le reste, écrivent tous dans le même débraille oralo-numérique larde d’anglicismes et de jeunismes plus ou moins périmés. [...]

L’Incorrect numéro 73

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