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Fabien Bouglé : « Emmanuel Macron ne place pas le nucléaire français dans une logique ambitieuse »

Sur 30 milliards d’euros, Emmanuel Macron n’allouera que 1,5 milliard pour la filière nucléaire, tout en maintenant la filière dite « renouvelable » qui a, elle, bénéficié de 250 milliards d’investissements. Que pensez-vous de cette annonce ?

Cette différence d’investissement entre les énergies renouvelables et la filière nucléaire interroge. Il s’agit d’un pur effet d’annonce. Le président de la République ne place pas le nucléaire français dans une logique ambitieuse qui impliquerait des financements très importants. Or, les enjeux énergétiques auxquels nous faisons face méritent une attention beaucoup plus forte portée au nucléaire. C’est donc une annonce très décevante sur le plan financier.

Emmanuel Macron défend désormais le nucléaire français qui permettra selon lui de  devenir le « leader de l’hydrogène vert » d’ici 2030. Quel est l’intérêt de ce projet ?

Il faut d’abord comprendre que dans l’énergie que nous utilisons, il y a 25 % d’électricité et 75 % d’autres énergies, la plupart fossiles. L’électricité sert pour une part de notre consommation domestique et industrielle. Les autres sources d’énergies, elles, servent à alimenter les voitures, le chauffage, les transports collectifs, etc. Aujourd’hui l’électricité française est presque décarbonée grâce au nucléaire. Les marges de manœuvre qu’il reste pour diminuer nos émissions de gaz à effet de serre se situent donc dans les autres types d’énergies.

L’objectif d’Emmanuel Macron est d’utiliser le nucléaire pour produire de l’hydrogène « vert », c’est-à-dire décarboné. Pourquoi cela ? Parce que l’hydrogène peut remplacer les énergies fossiles comme le gaz, le charbon ou le pétrole. Or, l’hydrogène est fabriqué par électrolyse, donc grâce à l’électricité. Si vous fabriquez de l’hydrogène avec de l’électricité issue d’énergies fossiles, votre hydrogène n’est pas décarboné, et n’a donc aucun intérêt. En revanche, si vous fabriquez de l’hydrogène grâce à une électricité décarbonée – en l’occurrence issue du nucléaire – votre hydrogène est « propre », ce qui vous permettra de compenser voire de remplacer les énergies fossiles dans votre consommation énergétique.

Malgré une volonté affichée de régler la question des déchets nucléaires, l’État ne porte aucun intérêt à cette innovation de rupture, française de surcroît

Parmi les annonces du plan 2030, figure le déploiement de petits réacteurs modulaires. Est-ce une bonne solution ?

Aujourd’hui nous avons des centrales à eau pressurisée avec des réacteurs de 900 mégawatts. Ils seront progressivement remplacés par des EPR : de gros réacteurs de 1600 mégawatts, dont celui en construction à Flamanville sert de prototype. Six EPR sont déjà prévus.  

Mais à court terme, pour aider les vieilles centrales en activité, il faut développer cette nouvelle catégorie de réacteurs que l’on nomme « petits réacteurs modulaires ». Ce sont des réacteurs nucléaires miniaturisés – les mêmes que ceux des sous-marins nucléaires. Il y a une véritable course mondiale pour cette technologie, et le fait que la France y investisse est une très bonne chose. Mais 1 milliard ne sera absolument pas suffisant. Il ne s’agit que d’un effet d’annonce, puisqu’EDF y travaille depuis des années avec le projet NUWARD. Les fonds alloués par M. Macron ne serviront qu’à accélérer les travaux déjà en cours.

Le Président a vanté des innovations de rupture en matière de retraitement des déchets nucléaires. Pouvez-vous rappeler en quoi consistait le projet Astrid, qu’il avait abandonné en 2019 ?

Le projet Astrid avait pour ambition de créer de nouveaux réacteurs, capables d’utiliser une partie des déchets des vieilles centrales. L’uranium appauvri rejeté par une centrale classique allait ainsi alimenter les nouvelles centrales à neutrons rapides dénommées « Astrid ». Ces déchets allait servir de matières premières pendant des années. Il s’agissait d’une avancée considérable, abandonnée pour des raisons politiciennes. Lors de son discours, il a appelé à des innovations quant au retraitement des déchets nucléaires, sans évoquer un relancement d’Astrid. C’est très regrettable. [...]

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Les dessous des GAFAM du X

Associations de protection de l’enfance et pouvoirs publics s’inquiètent depuis plusieurs années de l’influence de la pornographie en ligne sur les cerveaux adolescents. Depuis l’apparition des « tubes », la consommation de porno n’a cessé d’augmenter, accoutumant la population mondiale à une sexualité à la carte immédiatement disponible. Longtemps interdite et vendue sous le manteau aux élites fortunées, la pornographie est progressivement devenue mainstream dans les années 1960 et 1970. Il fallait alors être majeur pour s’encanailler devant ces films sulfureux, mais semblables à d’aimables bluettes si on les compare à ce qu’on peut trouver aujourd’hui en deux clics. Il était aussi nécessaire de se pencher sur la question, d’aller au sex-shop acheter des VHS ou des magazines faisant apparaître les icônes de la sexualité débridée d’antan. Pour ceux qui ont vécu dans les années 1980 et 1990, se procurer les œuvres de Traci Lords, Tabatha Cash, Draghixa, Marilyn Jess ou Julia Channel demandait des trésors d’ingéniosité ou la complicité d’un buraliste « plus ouvert ».

Mais aujourd’hui la perspective d’une interdiction d’accès aux fournisseurs de pornographie gratuite en ligne se fait de plus en plus sérieuse. C’est d’abord la loi sur les violences conjugales du 30 juillet 2020 qui a quelque peu durci les règles, son article 23 exigeant que l’éditeur d’un site pornographique prenne impérativement « toute mesure de nature à empêcher l’accès des mineurs au contenu incriminé ». Avec près d’un tiers des mineurs de 12 ans ayant déjà consulté un site à caractère sexuel interdit aux moins de 18 ans et deux tiers des 13-17 ans dans ce cas, l’accès massif à la pornographie entraîne de véritables bouleversements anthropologiques.

Dernièrement, les associations e-enfance et la Voix de l’enfant ont assigné en référé six opérateurs télécoms devant le tribunal judiciaire de Paris, leur demandant de bloquer l’accès des sites pornographiques aux mineurs. La difficulté tient dans le fait que les grandes plateformes ont leur siège social hors de France, qu’il s’agisse de Mindgeek (Pornhub, YouPorn) ou donc du groupe WGCZ (XVidéoss) du secret Pacaud. Pour l’heure, un internaute cherchant à se connecter sur un site de ce type ne subira que des phrases d’avertissement. [...]

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Quotidien : la conjuration des avortons

C’est la rentrée pour Yann Barthès et son équipe de journalistes en Stan Smith. On en attendait beaucoup et forcément, on n’est pas déçu. Yann Barthès a fait peau neuve, l’histoire ne nous dit pas si c’est la trithérapie ou le mono-régime à base de chou kale, mais sa maigreur confine désormais à l’atrophie. Sa grosse tête rasée pour l’occasion a l’air encore plus énorme, posée comme une bogue sur son minuscule torse de bébé à bascule. Le tout dodeline sagement derrière son bureau en fibre de verre, affichant toujours cette condescendance odieuse qui est la marque des plus fameux copronymes.

On a presque envie de les aimer, au fond, ces bateleurs de la pensée confite, parce qu'ils n'ont plus l'air de croire eux même à leur mélasse publi-rédationnelle

Ses chroniqueurs ne sont pas en reste. Crise sanitaire oblige, on les a éloignés au maximum les uns des autres : par l’effet d’un ridicule effet de perspective, ils ont l’air de lilliputiens. D’ailleurs tout est rachitique sur le plateau du Quotidien, à commencer par les idées et par ces micro-reportages d’opinion qu’ils voudraient nous faire passer pour du journalisme d’investigation. Paul Gasnier, dégaine de modèle photo pour Getty Images, lorgne toujours le prix Pulitzer : on lui a désormais alloué un « 20h15 Info » où il affiche une mine grave et circonstanciée, taclant les dérives extrémistes de la droite française avec la pusillanimité d’un comptable de Car Glass. Bienheureuse peste brune qui n’aura pour la contrer que ces lombrics allaités au jus d’avoine. […]

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Peine de mort : l’option préférentielle pour les assassins

Le quarantième anniversaire de l’abolition de la peine de mort en France est l’occasion pour la caste dirigeante de s’auto-congratuler, de se rengorger devant le miroir de ses « valeurs » et de se trouver merveilleusement « humaniste » et « courageuse ». Ah, quel moment agréable et quel dommage qu’on ne puisse pas célébrer ce genre d’anniversaire plusieurs fois par an !

Le mot caste est ici parfaitement approprié, car ce qui rend la position abolitionniste si agréable, c’est qu’elle s’accompagne d’un intense sentiment de supériorité morale sur la stupide populace qui reste, elle, en dépit de toutes leçons qu’on lui prodigue, globalement favorable à la peine capitale. Quelle meilleure preuve du fait que le peuple a besoin d’être conduit par une élite éclairée, et n’ayant pas de comptes à lui rendre, que l’attachement obstiné de celui-ci à la peine de mort ? Et qu’il est donc plaisant de se souvenir qu’on a contrarié le Français moyen en n’exécutant plus les assassins !

Rousseau disait des « esprits forts » de son époque que, dans bien des cas, il aurait suffi de les reléguer parmi les athées pour les ramener au pied des autels. De même pourrait-on dire de bien des plus fervents avocats de l’abolition qu’il suffirait de les reléguer parmi un peuple abolitionniste pour les ramener au pied de la guillotine, tant est transparent l’orgueil de classe qui est au fond de leur position.

Lire aussi : Béatrice Brugère : « Il n’y a pas de rupture entre la police d’un côté et la justice de l’autre »

Je n’ignore pas que l’opposition à la peine de mort est parfois motivée par des motifs honorables – bien qu’à mon avis erronés – comme une préoccupation sincère pour la question de l’erreur judiciaire, ou par une sensibilité trop tendre pour contempler en face l’idée du châtiment suprême, mais tel n’est pas le cas de la caste abolitionniste, à commencer par leur pape incontesté, Robert Badinter. [...]

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Zemmour en Corse : « Elle te plaît pas, ma sœur ? »

« Qu’on en dise du bien ou du mal, quand tout le monde en parle, c’est un succès », disait Boris Vian. La stratégie de la conquête trumpienne de 2016 reposait sur cette phrase. En attendant d’en savoir plus, Éric Zemmour poursuit cette philosophie pour la promotion de son dernier livre, La France n’a pas dit son dernier mot !

C’est donc ce territoire si particulier, cette terre qui a, depuis longtemps, mis son peuple sous la protection de la Vierge Marie, cette île qui cultive ses différences et ses querelles avec l’État que l’écrivain pas encore candidat a découverte les 7 et 8 octobre. À Sartène, la ville de Letizia Ramollino, la mère de l’Empereur puis dans la capitale impériale, Ajaccio, Éric Zemmour est venu troubler un début d’automne traditionnellement calme et serein. À Sartène, la visite guidée était assurée par le professeur émérite d’histoire grecque, Olivier Battistini. Dans sa demeure, le maitre de conférence présente au polémiste des trésors de littérature souvent méconnus.

« Les Corses ne cèdent pas à l'idéologie dominante et j’aime cet état d’esprit ! »

Éric Zemmour

Le directeur de communication de M. Zemmour, Olivier Ubida nous arrange un entretien d’une dizaine de minutes avec l’ancien éditorialiste du Figaro. Éric Zemmour peut répondre à quelques questions sur la mentalité insulaire qu’il considère comme un véritable rempart contre les idéologies menaçantes : « On a une idéologie venue des États-Unis qui désire nous effacer de la surface de la terre, de notre propre pays, de l’histoire du monde. Aux États-Unis et en France c’est le même phénomène, on dit aux peuples qu’ils sont coupables, les blancs sont coupables par essence. Ces populations se sentent tellement coupables et tellement malheureuses d’être coupables que pour obtenir le pardon, pour obtenir l’expiation, elles sont prêtes à détruire leur propre civilisation. Elles sont prêtes à se désagréger au profit d’autres civilisations qui ne demandent qu’à les remplacer. Il y a une alliance entre l’esprit de conquête de l’Islam qui nous menace depuis mille ans et la culture woke qui veut effacer l’homme blanc, hétérosexuel et catholique. C’est pour cela qu’il faut combattre sur les deux fronts afin de maintenir notre civilisation. Voilà pourquoi j’aime les Corses, qui ont compris cela, qui ne se laissent pas culpabiliser, qui ne se laissent pas soumettre. Je ne dis pas cela par démagogie, c’est ce que j’admire dans le peuple corse. Les Corses ne cèdent pas à cette idéologie dominante et j’aime cet état d’esprit ! » [...]

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Thierry Lentz : « L’affaire de Rouen prouve que le danger de la cancel culture est réel »

La statue équestre de Napoléon à Rouen a été enlevée en juillet 2020 pour être restaurée, mais n’a toujours pas été remise en place. Le maire de la ville a exprimé son souhait de la remplacer par une statue de Gisèle Halimi, et les élus ont dernièrement ouvert un débat autour de la représentation des femmes dans l’espace public. Entre temps, un Bonaparte en livreur Deliveroo a été installé sur le socle. Que cette séquence vous inspire-t-elle ?

L’attitude des élus rouennais, sur laquelle nous alertons depuis maintenant un an, confirme que les forces de déconstructions et d’effacement de certains pans de notre histoire sont « en grande forme » et osent à peu près tout, sous couvert des sensibilités contemporaines surjouées. Elles ont été contenues au cœur du bicentenaire napoléonien parce que leurs animateurs ont bien senti un rejet de leurs thèses par une majorité de la population que les événements organisés à cette occasion ont passionné. Ajoutons que la prise de position du président de la République a été décisive pour siffler la fin de la récréation, quand bien même elle a été en-dessous de ce que qu’on pouvait espérer.

Lire aussi : Cancel culture : effacer l’historique

Mais comme je l’ai écrit à plusieurs reprises, rien n’est gagné dans ce domaine, même si la France résiste plutôt mieux que les pays anglo-saxons à la « cancel culture ». L’affaire de Rouen prouve que le danger est réel. Voici une municipalité bigarrée qui, pour maintenir sa cohérence, laisse la main aux éléments les plus radicaux pour effacer. Car il ne s’agit pas d’autre chose : la statue de Napoléon est à cette place, devant la mairie, depuis près de 150 ans ; elle fait partie du paysage urbain ; elle a été érigée pour témoigner de l’intérêt que Napoléon a eu pour Rouen et des bienfaits dont il a couvert cette ville. Le maire et son équipe ont décidé de n’en tenir aucun compte, de n’en faire qu’à leur tête, d’imposer à la majorité silencieuse leurs lubies, arguant de leur légitimité représentative dont ils devraient tout de même se rappeler parfois que, si elle n’est pas contestable en droit, est le résultat d’une élection où 70% des électeurs se sont abstenus.

Comment interpréter ce possible passage de l’homme Napoléon, associé à une période glorieuse de notre histoire, à la femme Gisèle Halimi, l’un des grands soutiens du FLN ?

Il semble que le maire soit revenu sur son idée de remplacer Napoléon par Gisèle Halimi, dont vous avez raison de rappeler qu’elle fut un soutien et le défenseur des terroristes du FLN. On ajoutera qu’ambassadeur de France à l’UNESCO, elle a été rapidement remplacée pour avoir refusé d’appliquer les instructions du gouvernement et s’être comportée en diva dans une instance en principe feutrée et modeste. Sa personnalité dont on a seulement voulu retenir sa juste lutte pour l’égalité entre les sexes est apparue bien plus complexe qu’attendue par des élus qui, sans doute, avaient oublié de se renseigner avant de parler.

Le maire a donc rétropédalé et appelé à choisir entre une liste de femmes où Simone de Beauvoir, Olympe de Gouges et même Jeanne d’Arc ont fait leur apparition. On aimerait lui demander ce que ces personnalités – mis à part la Pucelle, mais elle est déjà bien présente dans la ville – ont fait pour Rouen, comparativement à Napoléon. Mais, bien sûr, cette question les intéresse moins que le « coup » qu’ils croient faire pour satisfaire les activistes de tout poil. [...]

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Financiarisation, numérisation, biopolitique : la démocratie comme technostructure

Pour commencer, il convient de rappeler à quel point la « liberté » n’a jamais été garantie par l’appareil démocratique : si elle figure bien au panthéon de nos valeurs et constitue une sorte d’horizon indépassable du fantasme républicain, rien ne la justifie légalement ou juridiquement dans l’exercice de nos démocraties modernes. Comme le rappelle Castoriadis, nous appartenons toujours à un ensemble plus grand qui en contient un autre, et cette hiérarchisation constitue la toile de fond même de l’entreprise démocratique, la liberté n’étant jamais que le contrepoint fantasmatique, presque névrotique, de cette imbrication sans fin du citoyen dans un système qui le dépasse.

Le pouvoir à l’état gazeux

Nous sommes précisément rendus à ce point où la technologie est devenue suffisamment politique, et le politique suffisamment technique, pour qu’au croisement des deux s’infléchisse ce que Foucault appelait notre « champ d’action éventuel ». Il devient difficile aujourd’hui de discerner ce qui relève du technique et ce qui relève du champ politique tant la démocratie contemporaine semble précisément se situer à l’intersection parfaite des deux. Le trône vide, source de tous les fantasmes complotistes, a ringardisé la question du « je » dans l’exercice du pouvoir : qui décide ? Qui exerce sa volonté réelle au cœur du processus décisionnel ? Y a-t-il encore des acteurs du pouvoir ? [...]

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Mgr Marc Aillet : « Le secret de la confession garantit la liberté de la relation du pénitent avec Dieu »

Les propos de Mgr Éric de Moulins-Beaufort sur le secret de la confession ont déclenché une polémique et de nombreuses attaques. Pouvez-vous rappeler en quoi le sacrement de la confession est indissociable du secret ?

On est dans un ordre qui est au-delà du secret professionnel, que le droit permet de lever dans certaines circonstances, surtout quand il s’agit d’une faute grave. Le secret de la confession est d’une autre nature : c’est la garantie par le droit de l’Église de la confidentialité et de la liberté de la relation du pénitent avec Dieu lui-même – et non pas seulement avec un professionnel de santé morale. Le prêtre n’a pas barre sur cette relation de conscience de la personne qui s’adresse à Dieu dans sa demande de pardon. On ne peut donc pas y toucher. Le prêtre n’est pas le maître dans la relation ; il est le ministre, le serviteur, l’instrument de cette relation très spéciale de l’homme avec Dieu. On est bien au-delà d’une relation purement sociale.

Le secret de la confession est reconnu par le droit français, et ne posait jusqu’ici aucun problème, alors qu’il y a toujours eu des crimes confessés. Sous quel statut juridique cette acceptation se faisait-elle ?

Il y a une jurisprudence qui fait que la République française (comme l’a d’ailleurs souligné Mgr de Moulins-Beaufort dans son communiqué) a toujours respecté le secret de la confession qui touche à la liberté de conscience. L’Église est au service de la conscience. Cela pourrait ne pas être compris dans le monde d’aujourd’hui, surtout avec les scandales qui nous éclaboussent. Pour autant, cela ne veut pas dire que l’on n’aide pas – pour ce qui est de la part humaine du sacrement – le pénitent à parler dans un autre contexte.

Il s’agit de la relation entre le croyant et Dieu, sur laquelle nous, ministres du culte, n’avons pas barre

Le secret de la confession est donc lié à la liberté de conscience. Il implique un facteur proprement religieux qui n’est pas inhérent aux lois de la République, surtout dans le contexte de la laïcité où l’Église et l’État sont séparés. D’ailleurs, l’article premier de la Constitution garantie non seulement la liberté religieuse, mais aussi la liberté de conscience. Et c’est là que l’on se situe d’un point de vue juridique. Il s’agit de la relation entre le croyant et Dieu, sur laquelle nous, ministres du culte, n’avons pas barre. Nous ne sommes que « ministres », c’est-à-dire au service de cette relation. Le pénitent ne vient pas voir le prêtre comme il irait voir un professionnel qui aurait la possibilité de résoudre tous ses problèmes. Il vient voir le Seigneur lui-même qui est source de guérison intérieure à travers le prêtre. [...]

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