Culture
Vous souhaitez lire la suite ?
Débloquez tous les articles de l’Incorrect immédiatement !
Depuis le 1er décembre, le monde ne tourne plus tout à fait sur son axe : la palme, parfaitement officieuse, de meilleur film de tous les temps est devenue belge. Tous les 10 ans, la revue britannique Sight and Sound organise un grand sondage pour élire les 100 Meilleurs films de l’histoire du cinéma auprès des critiques internationaux et, depuis 1992, auprès des réalisateurs dans une liste annexe. En 1952, le premier vainqueur fut Le Voleur de bicyclettes de De Sica puis de 1962 en 2002, Citizen Kane, Welles finissant par être détrôné en 2012 par Vertigo. Cette année, Hitchcock cède donc la place à une cinéaste belge/juive/lesbienne, Chantal Akerman, avec Jeanne Dielman, 23 Quai du commerce, 1080 Bruxelles.
Lire aussi : [Enquête] Culture : bilan d’une année woke
Les changements d’une décennie sur l’autre obéissaient jusque alors à une lente tectonique des plaques critique. En seulement deux éditions, Akerman est passée de la 35ème place à la première, et Beau travail de Claire Denis, l’unique autre réalisatrice représentée en 2012, de la 84ème à la 7ème , juste devant Mulholland Dr de David Lynch (qui fait son entrée dans les dix premiers à la 8ème place, seule bonne nouvelle ici). Dans le même temps, les réalisatrices font une percée inespérée (Agnès Varda, Maya Deren, etc.) ; Céline Sciamma et l’odeur de peinture encore fraîche de son navet anosmique, Portrait d’une jeune fille en feu, se retrouve à la 30ème place. Idem pour les réalisateurs de couleur dont le mieux loti, Spike Lee, rentre glorieusement à la 20ème place avec le très daté, pour rester poli, Do the right thing. Les tout aussi médiocres mais plus récents Parasite (Bong Joon-Ho) et Moonlight (Barry Jenkins) montrent que la prétendue valeur n’attend pas le nombre des années. Ce rabattage des cartes critique s’explique par la volonté de « foutre le feu au canon du réalisateur mâle blanc et hétéro », selon la formule de Girish Shambu, consultant de Sight and Sound pour cette édition. D’où le grand Shambulement du nouveau classement sans Bunuel, Altman, Polanski et tant d’autres qui ont l’inconvénient de leur sexe. [...]
Vous souhaitez lire la suite ?
Débloquez tous les articles de l’Incorrect immédiatement !
Par quels moyens ? Déjà, en exigeant la déprogrammation des œuvres pouvant froisser la sensibilité diversitaire : à Noël, plus de Casse-Noisette, avec ses danses exotiques et autres stéréotypes eurocentrés. Ensuite, en veillant au respect d’une nouvelle éthique théâtrale (codifiée entre autres dans un rapport de Pap Ndiaye pour l’Opéra de Paris) : point de chanteurs blancs grimés dans Otello ou Aida – que Lotte de Beer, à l’Opéra Bastille, remplace par une marionnette noire – quand bien même un chanteur blanc serait encore autorisé à incarner le Maure de Venise ou la princesse éthiopienne.
Mais surtout, au lieu d’éclairer la dramaturgie, la mise en scène doit servir désormais un propos militant : renverser les dominateurs ayant, de tout temps, opprimé telle ou telle minorité. Ainsi des Noces de Figaro version 2022 au Palais Garnier, où Netia Jones invente un soulèvement féministe aux allures syndicales. Ou du Parsifal déconstruit de Richard Jones, à l’Opéra Bastille, où le souffle mystique de Wagner est désacralisé, voire tourné en dérision. [...]
Vous souhaitez lire la suite ?
Débloquez tous les articles de l’Incorrect immédiatement !
Quand on écoute France Inter, comme c’est le cas de l’auteur de ces lignes, afin d’être tenu au courant des balises de la pensée autorisée et se trouver en mesure, donc, de distinguer parmi ses propos ceux qui relèvent du « dérapage », soit du blasphème, et de pouvoir ainsi blasphémer, mais en conscience, il paraît évident que les dogmes du wokisme sont devenus l’arrière-fond moral implicite de l’époque, du moins sur la scène médiatique et culturelle.
Ce qui eût semblé incongru il y a à peine quelques années : qu’un humain n’a pas vraiment de sexe défini, que chacun est avant tout ce qu’il décrète être, qu’il y aurait un lien entre les oppressions des femmes, des homosexuels, des Noirs et des transsexuels mais aussi des personnes frigides, enfin, « asexuelles », et que cette oppression serait de nature « systémique », si bien qu’il y aurait des oppresseurs et des oppressés structurellement par essence, et quoique l’essentialisation soit par ailleurs proscrite, tandis que nos frères noirs, après avoir été privés de leur singularité ethnique à l’époque de l’ancien antiracisme selon lequel la race n’existait pas, sont désormais des « racisés », et la récupèrent, cette singularité, mais par l’œil coupable de l’oppresseur blanc, comme une illusion produite par la volonté de nuire.
Pourtant, dès qu’on sort de la seule sphère médiatique officielle, cette omniprésence du discours woke se dilue assez rapidement
Toutes ces idées qui semblent relever d’un marxisme nouvelle manière dont la dialectique de classes se serait reconfigurée en liguant le reste du monde prolétarisé contre le supposé oppresseur blanc, mâle, hétérocisgenre. Comme toutes les idéologies niant l’évidence du péché originel et prônant une refonte intégrale des structures du monde, le wokisme appréhende la culture comme un vecteur de rééducation des masses. Et ça, ça désespère autant les esthètes que les femmes libres. Il fallait donc, en leur nom, enquêter sur l’emprise réelle de cette idéologie dans la création contemporaine. [...]
Vous souhaitez lire la suite ?
Débloquez tous les articles de l’Incorrect immédiatement !
Vous souhaitez lire la suite ?
Débloquez tous les articles de l’Incorrect immédiatement !
Vous souhaitez lire la suite ?
Débloquez tous les articles de l’Incorrect immédiatement !
Vous souhaitez lire la suite ?
Débloquez tous les articles de l’Incorrect immédiatement !
L’Incorrect numéro 73
Retrouvez le magazine de ce mois ci en format
numérique ou papier selon votre préférence.